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Arnaud Taeron – interview

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Partagez l'article !Interview d’Arnaud Taeron/ Propos recueillis par Julie Cadilhac– bscnews.fr/ Au cours d’une de mes tribulations internautiques sur Myspace, mes yeux ont été séduits par le travail d’Arnaud Taeron. Une série de personnages étranges peuple sa page et il est amusant de s’imaginer l’histoire de ses visages asymétriques. Chacun d’eux se voit affublé d’ […]

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Interview d’Arnaud Taeron/ Propos recueillis par Julie Cadilhacbscnews.fr/ Au cours d’une de mes tribulations internautiques sur Myspace, mes yeux ont été séduits par le travail d’Arnaud Taeron.
Une série de personnages étranges peuple sa page et il est amusant de s’imaginer l’histoire de ses visages asymétriques. Chacun d’eux se voit affublé d’ incongruités géométriques, d’humeurs diverses, parfois d’un message mystérieux… Caractères éclectiques allant de l’exhibitionniste sur l’autoroute à la chanteuse de Flamenco, de l’Idiot du village à l’homme-horloge.
Plaisir de voir certains se fondre littéralement dans le décor, d’autres s’étreindre en danses fantomatiques, d’autres encore éclater en touches vermillonnes.
Un coup de coeur pour les nez que je vous conseille vivement d’observer ! Qui, tantôt, sont des prolongements de l’oeil, tantôt semblent fondre en s’étalant sur le menton, tantôt sont cassés, triangulaires, interminables… et donnent à ces êtres taeronniens une personnalité étonnante.
Arnaud expose ( oui, à Rennes surtout), Arnaud compose, Arnaud explose.
Mais le plus simple encore, c’est que vous alliez le retrouver sur: http://www.myspace.com/arnoo8

« Créer, c’est se souvenir » disait Victor Hugo….vos personnages portent-ils une histoire?

Oui, ils portent une histoire. Une histoire de forme, je la veux assez simple, une profonde analyse de l’histoire de l’art pour arriver à la tête à Toto. C’est un peu le degré 0 de la représentation d’un visage, le bonhomme patate, le « Carré blanc sur fond blanc » du bonhomme…
J’ai toujours été séduit par l’évolution de la représentation chez les enfants, l’absence de ventre, de cou, de jambes, les bras qui partent de la tête, les yeux sur le front ou des deux côtés de la bouche… Je suis aussi hanté un peu par Carmen, femme pour moi emblématique que je cuisine un peu à toute les sauces. Elle est brune, c’est plus photogénique, elle a une capacité d’adaptation hors du commun et une vie sexuelle assez débridée… d’où vient elle? Je ne m’en souviens pas…
Cette « forme », j’essaie de la mettre au service du sens, de la narration, elle ne doit pas parasiter l’histoire du dessin ou de la peinture, elle ne doit faire penser à personne (ou à tout le monde). C’est pour cela que mes personnages aussi bien en peinture que en dessin sont bien souvent récurrents. En fait c’est un petit concept… là, on peut se souvenir ou oublier…

Comment s’en déroule la composition ? Que faites-vous en premier? Vous tracez les Arnaud Taeroncontours, choisissez s’il sera en couleur ou pas? Vous imaginez son nez, ses lèvres ? Vous faîtes des croquis préalables?

Pour ce qui est de la composition, des traits, des contours…
Que l’on fasse un trait unique sur une toile de 10 mètres sur 15 ou une multitude sur une gravure de 10 cm sur 10, il faut rechercher la justesse et l’humilité… je pense.
Plus on tend vers cette justesse, dans l’intention, que l’on fasse du paysage, réaliste ou pas, du portrait, du nu, de la BD, de l’abstrait, ou toute forme d’art… plus c’est bon, et, plus c’est dur. Essayez de dessiner Tintin deux fois, vous comprendrez…
C’est Le Trait qui tue… il faut le chercher, quand je l’aurais trouvé, je serais un Artiste. Cette exigence est responsable des oreilles coupées et autres frasques d’artistes qui ont marqué l’histoire de l’art. Des fois ça ne tient pas à grand chose, c’est peut être la différence entre le génie et le ridicule. Il faut essayer de rendre cette justesse de traits perceptible… À qui? C’est une autre question.

« Le véritable artiste crée, même en copiant » ( Gustave le Bon)… Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Quels sont vos mentors portraitistes ou vos contre-modèles? Vous qualifieriez-vous plutôt de surréaliste, de cubiste, ou rien de tout cela? Y-a- t-il un courant dont vous vous sentez proche?

Non, pas de courant.. J’essaie par intérêt et en simple spectateur d’être attentif à la justesse de ce que font les autres, que ce soit sur internet ou dans un bouquin d’art mais c’est évidemment très subjectif.
J’admire, quelque soit le style les artistes ou les auteurs qui tendent vers l’unanimité et comme tout le monde, j’essaie de comprendre ce qu’est un « chef d’oeuvre. »

TrahisonAvez-vous toujours dessiné avec cette technique-là?
Lors de la plupart des expos que j’ai pu faire, il se trouve toujours quelqu’un pour demander si c’est de l’huile ou de l’acrylique… qu’est ce que ça peut bien faire???
En fait, tout simplement comme pour le trait, j’essaie de trouver la solution à mes intentions. Je ne vois pas trop l’intérêt de parler de technique, les artistes qui en parlent m’énervent, il n’y a pas de noblesse dans la technique comme le disent certains, ni dans la matière, ni dans rien d’ailleurs…

Pourquoi choisir le noir et blanc, parfois, plutôt que la couleur?

J’adore dessiner, partout; l’outil le plus simple reste le crayon et le noir et blanc. En fin de compte l’absence de couleur implique qu’il n’y ait pas de rayonnement visible par nos yeux, le dessin reste assez brut et du coup on peut gagner en force. La simple dualité entre le noir et le blanc éloigne le spectateur d’une certaine réalité pour peut être permettre une plus grande « évasion », une distance…
Dernièrement la série Apocalypse sur la dernière guerre, où nombreuses images sont en couleurs, a permis de montrer réellement les horreurs de cette guerre, un Hitler ou un Himmler en couleur, en vrai…
Des films (surtout dans les années 60), parfois par manque de budget, ont été tournés en noir et blanc sans grands moyens techniques ni vedettes hollywoodiennes. Certains d’entre eux nous ont marqué par leur force, leur aspect irréel et effrayant, ou leur beauté.
Le meilleur exemple est sans doute « Psycho » d’Hitchcock où même la musique est noire et blanche.
En fait je pense que la réalité ne fait pas peur, mais elle peut faire vomir… Le noir et blanc exacerbe certains sentiments sans que le réel ne les parasite ou ne les perturbe.Aire d'autoroute

Vous êtes-vous déjà prêté au jeu de la bande dessinée? De l’illustration de récits?

Mes peintures ou mes dessins sont narratifs, j’ai besoin de raconter quelque chose. (Comme tout le monde). La BD est un moyen efficace mais je n’en suis pas capable, trop dur. Par contre, je suis vraiment admiratif du travail de certains mais quel dommage de banaliser un tel boulot. Pour ce qui est de l’illustration de récits, je m’y suis déjà un peu frotté et j’adore ça… mais c’est vraiment difficile de bosser à plusieurs sur un même projet.
J’ai imaginé un personnage simple, en pull marin, sans nom et un lundi de sa vie, où il se rend au boulot dans un monde de légumes un peu irréel. Il est choisi comme employé du mois dans sa conserverie et hérite pour cela d’une peluche pour avoir travaillé plus. Sa femme le quitte par lassitude ce même jour.
L’histoire est d’une banalité navrante, mais écrite et décrite avec pas mal de subtilité par David Anquetil et mise en musique par les Peter’s Uncles Blues Band qui, comme leur nom l’indique font du vieux Blues. Ils se sont calés sur les battements du coeur de mon bonhomme pour l’accompagner tout au long de sa journée noire et blanche.
Titre: Un lundi des cendres. Le boulot est très récent et on cherche un éditeur… à bon entendeur…

Allez, un pêle-mêle de mots spontanément:

Je dis: NOIR…une crise en 1929, non? Il me semble avoir fait une illustration sur la crise et le pouvoir d’achat… boîte de munition vide et plus un radis… Le fond du fond.
Je dis: BLANC et moi noir, mais juste par esprit de contradiction…

Arnaud Taeron Pourriez -vous nous présenter (un de) vos personnages? Comment il est né, a grandi et s’est épanoui au creux de votre paume ?

Je crée mes personnages au hasard des rencontres et des lieux. Puisque vous êtes assez friande de citations, Albert Camus disait que « créer, c’est vivre deux fois. » Alors pourquoi pas, par tranches, imaginer la vie des autres… Je ne cherche pas à faire des portraits réalistes, je n’y vois aucun intérêt et d’ailleurs je n’en suis pas capable. En traversant la France, de nuit, sur l’autoroute, je me suis permis d’imaginer la vie des personnes que j’ai croisé sur les aires de repos. Ces lieux sont vraiment étonnants, coupés de tout, on y croise des familles en demi sommeil, des VRP cocainés, des femmes seules, des hommes seuls…. C’est quoi leur vie à ces gens? Qu’est ce qu’ils font là?
Une galerie de portraits crayonnés, peut être un jour source de nouvelles, de petits récits, en musique sur « un air d’autoroute. »…on a road again…

Comment voyez-vous votre travail évoluer à l’avenir? Envie d’aborder de nouveaux thèmes, d’explorer de nouveaux univers?

Je saisis au vol des idées et des inspirations. Mon travail est aussi très lié à mon vécu et comme je ne sais pas ce que l’avenir me réserve…
Pour l’instant le dessin, la peinture et l’illustration me permettent de n’être prof qu’à mi-temps (et inversement) ce qui me convient assez… En ce qui concerne de nouveaux univers, j’ai l’âme aventureuse.

Dans quelle ambiance travaillez-vous? silence, musique, qu’est-ce qui vous porte lors d’un moment créatif?

C’est bien c’est léger comme question…Quand je peins ou dessine chez moi, c’est souvent en musique. La plupart du temps des chansons à texte dans la lignée des Têtes raides, de Padam, de Camille (pour la voix et l’ambiance)…
Pour ce qui est de certaines peintures où je me raconte, je crée inconsciemment (ou pas) un climat un peu particulier. Des fois c’est un peu dur d’en sortir….

Enfin…que lit Arno?

Je lis par période, beaucoup…
Des polars surtout, j’aime bien Adamsberg. Je suis un inconditionnel de Tolkien et de Philippe Pullman je lis aussi pas mal de SF, des BD à gogos et de la presse locale commentée au troquet le matin, autour d’un café avec mes potes. Mais mes lectures ne sont pas des sources d’inspiration pour ma peinture et mes dessins…pas encore, je préfère le vivant.
… OOOUF…. En fait, ça fait du bien de réfléchir un peu… j’avais oublié!!

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