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Jérôme Attal

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Partagez l'article !Jérôme, vous écrivez des chansons pour de nombreux artistes réputés, vous êtes également chanteur, blogueur et également auteur. D’où vous viennent ce dynamisme et cette polyvalence dans la création et pour l’écriture? La vie me laisse souvent insatisfait, je suis plus heureux quand je travaille. Alors comme j’aime bien le bonheur, j’essaie de […]

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Jérôme, vous écrivez des chansons pour de nombreux artistes réputés, vous êtes également chanteur, blogueur et également auteur. D’où vous viennent ce dynamisme et cette polyvalence dans la création et pour l’écriture?

La vie me laisse souvent insatisfait, je suis plus heureux quand je travaille. Alors comme j’aime bien le bonheur, j’essaie de travailler beaucoup. Bien sûr, le travail peut aussi être source d’insatisfaction, notamment quand j’écris des chansons pour d’autres artistes et que les décisions finales m’échappent…Cependant pour les chansons comme pour les livres, j’ai l’impression que j’ai des armes à ma portée pour lutter contre les insatisfactions liées au travail. Dans la vie souvent, les bras m’en tombent. Ce qui est assez inconfortable pour écrire.

Depuis quand écrivez-vous Jérôme ?

Dans l’adolescence, je m’étais spécialisé dans l’écriture de lettres d’amour. Mais aucune d’entre elles ne fut jamais publiée… je veux dire, acceptée. Du vivant de cet amour, du moins. Les chansons sont venues rapidement pour leur côté instantané, viscéral ; elles existent dans une forme quasi définitive sans qu’il y ait à attendre des semaines ou des mois. Le roman est un autre exercice, une autre temporalité, même si je dirais qu’écrire des chansons m’aide pour le rythme et la
musicalité des mots. Ce n’est pas que j’ai commencé à écrire des chansons, puis ensuite des romans. Ces deux désirs ont toujours existés en moi. L’écriture des chansons me semble aboutir plus rapidement, mais peut-être que chaque chanson n’est que le chapitre d’un répertoire. Pour un roman, il faut parfois attendre un temps monstre avant que quelqu’un vous fasse confiance. Longtemps, quand on me demandait quel était mon éditeur, je répondais : Html.

Y-a t-il eu un événement fondateur qui a amené cette création en ébullition permanente ?
Bon, face à cette question, j’ai toujours envie de citer la brillante idée de Gilles Deleuze qui dit que l’on se met à créer dès que l’on ressent un décalage entre ce que la vie nous donne ou permet, et ce qu’on a dans le cœur.
La vie produit des failles ouvertes. Dans les réactions des gens, dans ce qui se passe. Je dirais qu’écrire permet de combler ces failles, de réduire un écart avec quelqu’un qu’on désire ou qui nous bouleverse, ou bien de réparer un événement ou une déclaration qui nous blesse, que l’on juge insupportable.
Ecrire est un monde plus stable. Qui a quelque chose de comparable à l’enfant qui s’enferme dans sa chambre et joue avec des figurines pour recréer un monde meilleur de son point de vue. Entre la vie et l’écriture, j’ai le rapport peut-être qu’entretient un cinéaste comme Vincente Minnelli avec le réel et le rêve.

Que vous apporte l’écriture?

La sensation peut-être illusoire de doubler le temps sur son propre terrain.


Suite à la parution de “Le garçon qui dessinait des soleils noirs” chez Stéphane Million éditeur, vous avez récemment déclaré “j’aime bien l’idée de personnifier l’orgueil en une fille très altière et très haute…” ? Qu’est ce qui vous attire chez cette catégorie de femme?

Oh ! J’ai vraiment dit une chose pareille ? J’espère qu’il y avait quelque chose d’intéressant avant et après cette phrase. L’orgueil, ça sauve souvent. Comme la colère. Après, il y a plein de types qui ont l’orgueil plat. Un orgueil dont il ne sort rien. Alors, quitte à choisir et personnifier l’orgueil, je crois que je préfère parler des filles. Très haute parce qu’elle devait sans doute porter des talons…Et très altière parce qu’elle venait de m’embrasser… J’espère que c’est ça…

Où est la limite entre le chanteur et l’écrivain sur le plan de la création ?
Je dirais qu’il n’y a pas vraiment de limite. C’est comme un peintre qui aurait plusieurs supports. La peinture pour le roman, et peut-être la sanguine pour la chanson. J’essaie de bâtir un univers cohérent. Que les personnes qui me découvrent par mes chansons ne soient pas perdus dans mes romans, et vice versa. Ça part du même désir. Je me sens plus libre dans un roman parce que si je ne suis pas satisfait je m’en prends à moi-même, je sais vers qui me tourner pour tenter d’améliorer les choses. C’est plus flou avec la musique
parce qu’il y a davantage de personnes en jeu. Mais pour ce qui est d’écrire, c’est-à-dire de créer quelque chose qui nous constitue et nous représente au moment où on le fait, je ne vois pas de différence.

Vous tenez depuis près de 10 ans un journal intime sur le net. On ne peut qu’admirer votre régularité. A ce titre, est-ce pour entretenir un contact régulier avec vos lecteurs ou pour vous confronter chaque jour à cette “nécessité d’écrire et de créer”?
Oui, le Journal en ligne, c’est encore un support différent de celui des chansons ou des romans. J’ai toujours eu le goût du Journal intime en tant que genre littéraire. Mon préféré est sans doute celui de Jean-René Huguenin.
Âpre, fougueux, d’une intensité et d’une intégrité rares. Une leçon et une aide de chaque instant quand on désire de tout son cœur écrire. Parce qu’écrire c’est souvent préserver la fièvre et lutter contre le découragement. Après, parfois, Jean-René Huguenin manque un peu d’humour. Malgré son prénom. Mais il faut le lire absolument. Et son unique roman : La côte sauvage, c’est si beau. Pour revenir à mon Journal sur le net, ça a pris une réelle ampleur en raison de la régularité et de l’ancienneté, deux mots qu’on pourrait contracter en : opiniâtreté. Et puis l’outil internet est formidable parce que très vite ça dépasse les frontières et dès les premières années, mon Journal a été lu dans le monde francophone, par les étudiants des universités anglaises et américaines, qui ainsi ont un contact avec le Paris de tous les jours, et ma façon de voir les choses, une certaine communauté d’esprit avec des types comme Fitzgerald j’espère. Parce que ça parle des filles, et des impossibilités de vivre parfois à l’ombre de ces paradis et de ces enfers.


Pour finir, que diriez-vous aux lecteurs du BSC NEWS pour les inciter à lire votre dernier livre “ Le garçon qui dessinait des soleils noirs”?

Je dirais que c’est un roman épatant si on aime les histoires de cape et d’épée. Sauf qu’il se passe dans Paris aujourd’hui, et que la mode n’est plus à la cape, ni à l’épée. Alors j’ai juste gardé le cœur ardent de ces jeunes gens solitaires qui n’arrêtent pas de provoquer en duel les pauvres aptitudes de la vie à produire du soleil. On y parle d’amour fou, de musique rock, de création, d’amitié et de solitude. On y évoque aussi le shérif de l’ouest Will Bill Hicock et la chanteuse Barbara. Bref, c’est le cœur qui est en jeu, toujours, dans ce roman.

Propos recueillis par Nicolas Vidal

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