Voilà la rentrée

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Ce titre évocateur de notre enfance est sans doute l’exclamation que nous entendons le plus au mois de septembre. Elle égale celle que nous retrouvons au mois de janvier : « c’est la nouvelle année ».
Entre « bonne rentrée » et « bonne année », le temps passe et se trouve rythmé par ces voeux que l’on se fait avant même de se dire bonjour.
Des similitudes sont à signaler entre ces deux périodes bien particulières. La première est cette odeur de « neuf ». Une nouvelle rentrée, une nouvelle année. La seconde est celle qui re-présente la somme colossale de bonnes résolutions. Elles Re-présentent, puisque chaque année, à chaque rentrée nous nous donnons de nouveaux défis.
Chaque rentrée a son lot de rituel(s). Tels des enfants marqués par nos rentrées scolaires, nous nous achetons un nouvel agenda qui égrainera une année qui reste malgré tout calquée sur le calendrier de nos années d’études (courtes ou longues), et nous nous précipitons sur les nouveautés de Septembre.
Nous parlerons plutôt de rentrées : littéraire, télévisuelle, cinématographique, politique, théâtrale, scolaire, universitaire, médiatique (presse écrite) etc.
Tout ceci a une senteur, celle de nos cartables.
Nous remplissons notre rentrée comme nous remplissions notre cartable avec une excitation enfantine. Nous sentons ces nouvelles « affaires ». Ne dit-on pas : « ça sent la rentrée ».
Une odeur particulière de re-nouveau, de rituels auxquels nous sommes attachés.

Une odeur de Livres

676 livres à « sentir » cette année. A un chiffre près, l’année aurait été diablement houleuse !
Deux avis se partagent cette année sur cette abondance de publications. L’un clame que c’est, de nouveau, l’affluence inutile, voire ridicule. L’autre, positive sur le choix donné aux lecteurs. Cette abondance tuerait-elle le livre ? Tous ces auteurs sont-ils talentueux ? La question se pose déjà alors que nous n’avons pas tout lu. L’autre question est de savoir quelle place nous donnons aujourd’hui à ce « livre » dans notre société.
A l’époque des balbutiements et de l’ « invasion » d’internet, notre société avait prévue la mort du livre. Nous l’envisagions cloué au pilori pour l’éternité. Nous pleurions déjà cet « objet » mythique, cet ami fidèle que nous tenons dans nos mains, sacrifié sur l’autel du Dieu « virtuel ». Rien de tout cela ne s’est (encore) passé.
Le livre est là et sa profusion à chaque rentrée nous montre son existence, sa volonté d’être.
Il est certain que les libraires doivent trouver de la place, et parfois même, faire des choix lorsqu’ils ne peuvent pas les accueillir tous.

Une plus grande place aux romans

Cette année littéraire sera marquée par une place plus grande faite aux romans. La mode de l’auto-analyse est passée quelque peu. Le lecteur s’est sans doute lassé des méandres psychologiques, des fantasmes avoués, des vies parallèles étalées sur la place publique. Il est fort à parier que les auto-portraits et autres triturations narcissiques ne vont pas faire recette. Mais si vous appréciez cette littérature, il y a de quoi vous satisfaire avec Amanda Sthers, Keith Me (Ed. Stock), Catherine Millet, Jour de souffrance (Flammarion), Christine Angot, Le Marché des amants (Seuil) et pour finir, l’adaptation cinématographique de La possibilité d’une île par Michel Houellebecq. Pour ne citer que les plus en vue.
Ces histoires à demi « romanesques » montrent que le livre suit la mode de la société et de l’époque qui le font naître. En ces temps de « psychanalyse » (qui n’a pas son analyste ?), le livre traduit les préoccupations humaines. Il n’est donc pas étonnant de voir ce genre s’imposer dans les librairies.
Dans cette conjoncture, les romans à proprement parlé sont une bouffée d’oxygène.

Un conseil, un café et l’addition

La rentrée littéraire signifie également des conseils de lectures en pagaille, des émissions littéraires qui rivalisent d’entrevues avec les auteurs. En ce mois de septembre nous conseillerons une émission télévisée qui amène un brin de fraîcheur, de dynamisme et de naturel : Café Littéraire présenté par Daniel Picouly. Des rubriques, des entrevues et des questions qui sortent de l’ordinaire. Un « déformatage » bien senti.
Nous ne dérogerons pas à la règle.
Les conseils de lecture(s) sont gratuits.
Nous en avons quatre : Après Le Soleil des Scorta (Prix Goncourt 2004), Laurent Gaudé nous propose La Porte des Enfers (Éd. Actes Sud). Socrate aurait approuvé ce thème très philosophique en lançant « Philosopher c’est apprendre à mourir ». Le tout est d’apprivoiser les Enfers.
Autre lecture possible : Frédéric Ciriez, Des néons dans la mer (Ed. Verticales). Hasard ou choix délibéré de l’éditeur, le fait est qu’il faut « plonger » dans ce roman pour découvrir la chair dans tous ses états. Cette descente « verticale » vers le sous-marin le plus incroyable qui soit est une étrangeté à signaler.
Thomas Pynchon, Contre-Jour (Éd. Seuil). Cet écrivain américain est… comment dire… Un OVNI. Il est Non Identifié. Il ne donne aucune entrevue, personne ne sait à quoi il ressemble, mais il est l’un des auteurs américains les plus connus des États-Unis. Ce roman d’aventure décrit la fin du XIXème siècle. Chicago, Paris, New-York, Mexique, Europe, Asie. Des voyages, des personnages plus incroyables les uns que les autres, des syndicalistes, une famille, la confrérie des « Casse Cou »… Un roman comme il en existe peu, un voyage, des rires.
Et enfin, le nouvel Amélie Nothomb, Le fait du Prince (Éd. Albin Michel). Style incontesté, elle nous sert une histoire qui pourrait se résumer par « je est un autre ». Une « prise » d’identité qui arrange tout le monde… même la veuve. Un roman pour changer d’air.
Le café ? Je vous l’offre bien sûr !

S’il fallait conclure

Fort heureusement les publications ne s’arrêteront pas en ce joli mois. Notre magazine se chargera, comme à son habitude, de vous informer des dernières publications. Il vous parlera des auteurs à découvrir, des artistes, des maisons d’éditions qui travaillent pour votre seul bonheur,. Il vous présentera des entrevues bien menées, des rubriques très intéressantes. Il aura une pagination toujours aussi impeccable, des chroniqueurs très inspirés et… ah, il faut partir. Je crois que le Café est en train de fermer !


Sophie Sendra
Docteur en Philosophie
Spécialiste de la Conscience et de la Perception
Professeur à l’IMES.

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