Mon Roi : Autopsie d’une passion dévastatrice, le nouveau film de Maïwenn

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Par Florence Yérémian – Le nouveau film de Maïwenn « Mon roi » est une histoire d’amour. Celle de Tony, brillante avocate pénale, et de Georgio, sorte de flambeur aussi fou que charismatique. Leur rencontre a lieu un soir de bringue au sein d’un bar parisien. S’en suit une passion vénale et dévastatrice qui va les ronger durant dix années de leur vie.

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Réalisé par Maïwenn,  » Mon Roi » est un concentré d’amour et de colère disséquant toutes les étapes de la déconstruction d’un couple : de la rencontre voluptueuse à la rupture finale, la jeune réalisatrice nous fait partager les disputes et les crises perpétuelles de son étrange tandem qui malgré leur adoration mutuelle ne parvient jamais à s’accorder… Bien que l’histoire de Tony et Georgio soit somme toute banale, elle est interprétée avec une telle intensité que l’on se laisse tumultueusement entrainer dans cette dérive passionnelle. L’ensemble du scénario repose en effet sur la prestation organique des deux principaux acteurs: Emmanuelle Bercot et Vincent Cassel.

Emmanuelle Bercot s’est récemment illustrée en tant que réalisatrice avec son film « La tête haute » ( voir notre article sur le film d’Emmanuelle Bercot). Artiste entière et singulière, elle s’approprie le personnage de Tony avec un naturel désarmant. Tour à tour heureuse, révoltée ou soumise, elle semble être constamment dans le doute et possède un regard souriant d’incertitude. Face à la figure lunatique de Georgio, elle oscille sans cesse entre l’euphorie et la détresse et nous étonne par la dépendance qu’elle voue à cet être toxique.
C’est à Vincent Cassel que revient le rôle fantasque et manipulateur de Georgio. Par-delà la clarté qui émane de ses yeux rieurs, cet acteur parvient à glisser dans son attitude autant de folie que de mystère. Son protagoniste tient en effet plus du prince machiavélique que du noble Roi : égoïste, menteur et ultra possessif, il nous fait songer à un pervers narcissique qui détruirait inconsciemment tous les êtres qu’il aime. Derrière son côté sophistiqué et seigneurial, Georgio cache pourtant bien des peines et des fêlures. Ce sont d’ailleurs ces zones d’ombres qui le rendent parfois attachant car elles montrent qu’à son tour ce séduisant satyre est aussi vulnérable.

Difficile donc de prendre parti pour l’un ou l’autre des amants car dans cette étrange chronique conjugale les deux personnages sont en souffrance. Bien que Maïwenn se soit d’avantage concentrée sur le point de vue féminin de Tony, elle n’a nullement écarté les remises en question et les errances de son partenaire. Dans son éternelle quête d’amour et de liberté, ce couple se déchire autant qu’il s’aime et ne possède hélas aucune autre solution que la chute commune…
Tourné dans un climat d’animosité et de désir, Mon Roi a la particularité d’être au plus près des corps et des sexes. Tout au long du film, l’on ressent la présence physique des acteurs autant que celle de la réalisatrice. A travers ses prises de vue frôlantes et inquisitrices, on capte les regards francs d’Emmanuelle Bercot et de Vincent Cassel, on respire leurs souffles fusionnels et l’on imagine volontiers Maïwenn avec sa caméra à bout de bras laissant ses protagonistes se dépêtrer dans leurs rôles respectifs. Cette approche très sensuelle confère à Mon Roi une facture nerveuse et spontanée qui amplifie en permanence le réalisme de ce drame passionnel. On regrette cependant le silence qui plombe trop souvent les rares dialogues de Tony et Georgio et les conduit au déclin: fort heureusement la musique de Stephen Warbeck est suffisamment puissante pour couvrir tous ces non-dits et porter les spectateurs…

Le film « Mon Roi » de Maïwenn : A voir pour le jeu intense des acteurs et la violence intériorisée qui se propage peu à peu …

Mon Roi
de Maïwenn
Avec Vincent Cassel, Emmanuelle Bercot, Louis Garrel, Isild Le Besco, Chrystèle Saint-Louis Augustin, Patrick Raynal, Paul Hamy, Yann Goven et Norman.

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