L’odeur de la mandarine : une chevauchée élégante et sensuelle
Par Florence Yérémian –bscnews.fr / Été 1918. Angèle a perdu son amant sur le front de guerre. Afin de pouvoir survivre et élever sa petite fille Louise, elle se fait engager comme infirmière auprès d’un colonel invalide. Ce dernier a laissé l’une de ses jambes auprès des Allemands et faute de pouvoir combattre à nouveau, il a été contraint de se replier sur ses terres,… Célibataire mais grisonnant, il tombe éperdument sous le charme d’Angèle et se hasarde à lui demander sa main. Malgré l’amitié qu’elle éprouve envers son riche protecteur, la jeune infirmière ne parvient pas à oublier les fantômes de son amour passé. Pour la sécurité de sa fille, elle accepte cependant ce mariage de raison en y posant de singulières conditions…
Réalisé par Gilles Legrand (Tu seras mon fils), ce long métrage est un pur creuset de sensualité. Tourné essentiellement en Picardie dans le château de Montmartin, il nous fait partager à huis-clos le cheminement amoureux de deux êtres blessés par la vie. C’est avec beaucoup de charme et de profondeur qu’Olivier Gourmet s’immisce dans le rôle de Charles, le colonel mutilé. Tour à tour meurtri, égrillard ou impétueux, il soupire de désir après son épouse juvénile et met tout en oeuvre pour pouvoir entièrement la posséder. Véritable femme-enfant, la belle Angèle est interprétée avec plénitude par la gracieuse Georgia Scalliet. Issue de la Comédie Française, cette actrice est dotée d’une volupté nonchalante qui s’accorde parfaitement avec son personnage: la croupe ronde et la lèvre charnue, elle a la fraicheur d’une adolescente mais le magnétisme d’une odalisque qui n’a de cesse d’ensorceler son partenaire sans vraiment vouloir se donner. De sa voix chaude et posée, cette fausse ingénue parle avec une spontanéité désarmante du désir sexuel à une époque où la femme n’avait pourtant pas son mot à dire. Aussi féminine que féministe, elle incarne avec beaucoup de justesse une protagoniste indépendante qui se laisse généreusement chevaucher par son cavalier mais refuse radicalement d’être dressée.
Fasciné par le monde animal et particulièrement par les chevaux, le réalisateur Gilles Legrand a filmé en parallèle de ce couple conflictuel, la parade amoureuse d’une jument et de son bel étalon. Confrontant la bestialité de leurs ébats équestres aux pulsions lubriques d’Angèle et de Charles, il parvient à insuffler à son scénario une dimension à la fois sauvage et charnelle qui n’est pas sans évoquer certaines scènes bucoliques de Lady Chatterley. Profitant de la beauté luxuriante des forêts de Fontainebleau et de Rambouillet, il parsème également son oeuvre cinématographique de sublimes paysages sylvestres: la scène où Angèle pénètre lascivement dans un étang en poursuivant un cerf est à elle-seule un pur moment de grâce. Exalté par la musique d’Armand Amar, cet épisode féerique nous fait indéniablement songer au mythe de Diane chasseresse poursuivant Actéon…
Partagé entre un érotisme élégant et un esthétisme léché, ce drame sentimental laisse exploser le talent et la complicité des deux principaux protagonistes: Olivier Gourmet et Georgia Scalliet. Par-delà leur remarquable performance, saluons aussi la présence d’Hélène Vincent dans le rôle discret de la gouvernante ainsi que celle du succulent Michel Robin qui compose avec beaucoup d’humour le personnage d’un prêtre quelque peu sénile.
L’Odeur de la mandarine? Un éloge métaphorique de la jouissance qui saura mettre vos sens en émoi…
L’Odeur de la mandarine
Film réalisé par Gilles Legrand
Avec Olivier Gourmet, Georgia Scalliet, Hélène Vincent, Michel Robin, Dimitri Storoge, Fred Ulysse, Marine Vallée, Romain Bouteille, Urbain Cancelier
Sortie nationale: le 30 septembre 2015
France – 2015 – 1h50
Conseillé à partir de 16 ans
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