Jean Jaurès : « Et celui qui dit la vérité….il sera assassiné »
Par Félix Brun – bscnews.fr/ Le 31 juillet 1914, Jean Jaurès est assassiné…il ne sauvera pas la paix ; son meurtrier, Raoul Villain, nationaliste exalté sera acquitté le 29 mars 1919… Un beau livre, assurément, que cette biographie illustrée de nombreux documents (certains sont inédits), et de citations qui éclairent la vie extraordinaire et lumineuse de Jean Jaurès.
Jaurès l’idéaliste, l’utopiste, auteur en 1891 d’une thèse « De la réalité du monde sensible » dans laquelle il s’efforce de rapprocher l’idéalisme et le matérialisme, le déisme et le socialisme. « Tout ce qu’on peut pressentir, c’est que l’œuvre d’art que voudra façonner d’abord et surtout la société nouvelle, c’est l’humanité elle-même. Elle appliquera toutes les énergies enfin réconciliées et organisées à assurer à tous les hommes, par un large bien-être et une activité réglée, la santé qui, dans les races un peu nobles, est un facteur de beauté. Elle fera un immense effort pour remettre les hommes en contact familier avec la nature, avec la variété des aspects et la beauté des horizons. Elle voudra perfectionner à ce point la production qu’il reste à tout homme assez de loisir et de force pour la science et pour l’art. »(Jean Jaurès 1896 La Revue Sociale) . Jaurès, chantre de la laïcité, qui mène un combat sans concession pour une école républicaine laïque : « Quiconque ne rattache pas le problème scolaire ou plutôt le problème de l’éducation à l’ensemble du problème social se condamne à des efforts ou à des rêves stériles. » (Revue de l’Enseignement Primaire 30 septembre 1906) Jaurès, modèle de l’efficacité parlementaire, qui éblouit par la conviction qu’il dégage à travers ses talents de tribun, brillant, phénoménal, à la parole aisée et puissante. Jaurès, défenseur de Dreyfus, qui dénonce avec véhémence et sans compassion un complot de la hiérarchie militaire. Cet anti-militariste se heurte à un patronat réactionnaire qui dispose de solides soutiens dans l’appareil d’Etat et dans l’Eglise. Jaurès qui croit à une patrie ouverte, démocrate, généreuse, qui refuse toute agression contre les autres nations. Jaurès qui devient la cible des caricaturistes très en verve du crayon à cette époque, victime de la presse dirigée par ceux pour qui la guerre et le colonialisme sont les bras armés du capitalisme et de leur enrichissement. Jaurès, enfin, qui est embarrassant, gêne les milieux réactionnaires qui voient en ce tribun probe et incorruptible, cet homme simple, ce travailleur acharné, l’apôtre de la paix, capable seul d’empêcher la guerre en soulevant les classes ouvrières des nations guerrières contre les instigateurs du premier conflit mondial. Est-ce pour cela qu’il fut assassiné ?
Jaurès, c’est une voix forte, attentive, respectueuse, celle d’un esprit libre, d’un messager de la liberté, de l’égalité, de la fraternité. L’intégrisme et l’extrémisme frappent toujours ceux qui disent la vérité et condamnent l’absurdité. Jaurès n’appartient à personne, et surtout pas à ceux qui se revendiquent de son discours, à ces virtuoses de la récupération….et ceux de Charlie Hebdo, tombés sous les balles, non plus…
Jean Jaurès Apôtre de la Paix
Auteurs : Guillaume Doizy et Jean-Marc Jarnier
Editions : Hugo.Image
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