Laurent Mucchielli: « Les élites occidentales passent leur temps à se gargariser du mot Démocratie et à donner des leçons au monde entier, alors qu’elles sont massivement corrompues »
Dans ce grand entretien, Laurent Mucchielli aborde la définition de l’intellectuel et son rôle, l’état de notre démocratie sous le prisme de la macronie, et la corruption au sein des élites occidentales. Un entretien percutant et sans concession sur l’époque que nous vivons.
Laurent Mucchielli est sociologue, universitaire et directeur de recherche au CNRS. Et ses prises de position lui ont valu bien des attaques pendant la crise sanitaire mais le sociologue poursuit son travail de réflexion.
Que penser des intellectuels sous la macronie et leur prise de position durant les gilets jaunes, la crise covid, ou encore la réforme des retraites ? La figure de l’intellectuel et sa place dans la cité ont-t-elles été abîmées ?
On peut se demander si l’intellectuel n’est pas une espèce en voie de disparition. Entendons-nous sur la définition : un intellectuel n’est pas simplement un lettré, et ne se distingue ni par son niveau de diplôme ni par ses titres ou ses fonctions et responsabilités. La plupart des personnes qui exercent une activité professionnelle dans le monde des lettres, des sciences ou des arts, ne sont pas pour autant des intellectuels.
C’est d’abord l’engagement personnel dans le débat public qui fait l’intellectuel. Ensuite, il n’y a pas d’intellectuel si cet engagement est décidé en service commandé pour une puissance politique ou économique, ou encore s’il est fait dans son intérêt personnel (intérêt économique ou intérêt de carrière par exemple). L’indépendance ou le désintéressement sont deux éléments clefs de la définition de l’intellectuel. Ceci permet de le distinguer clairement de « l’expert » qui intervient dans le débat public parce qu’il est en service commandé, parce qu’il représente certains intérêts. Comme le dit Yves-Charles Zarka, « l’expert est un mercenaire, l’intellectuel est un homme libre ».