Les Eurockéennes fêtent leur 30 ans, que retenez-vous pour cette date symbolique? Et quel chemin parcouru depuis des débuts quelque peu utopiques en 1989?
Tout d’abord, on a réussi « à garder toutes nos dents » c’est une vraie réussite car entre 10000 festivaliers en1989. En 2017, nous avons connu une édition exceptionnelle avec près de 130.000 personnes. Au fil du temps, les Eurockéennes de Belfort se sont imposées comme une marque dans le paysage des grands rassemblements musicaux français et européens. Au départ, la région de Belfort était loin d’être la région la plus rock’n’roll de France, mais grâce au soutien de la collectivité et à l’énergie sans faille des organisateurs et bénévoles, le festival a grandi, et il est devenu un incontournable en France et en Europe, malgré la crise du disque. Nous sommes fiers de voir que les Eurockéennes suscitent toujours autant d’intérêt. C’est beaucoup de travail en amont et tout au long de l’année, si nous voulons être à la hauteur de nos ambitions car nous sommes aujourd’hui un festival qui a 91% de recettes propres.
Quels seront les temps forts cette année?
Pour cette 30ème édition anniversaire, 61 concerts donneront le rythme, dans un parti pris assumé de musiques populaires toujours vivaces à travers des shows aussi grandioses qu’inédits. Prophets Of Rage, Richie Hawtin Close, Nothing but Thieves, FFF, Leon Bridges, Macklemore, Orelsan, Juliette Armanet.
« Pour cette 30ème édition anniversaire, 61 concerts donneront le rythme, dans un parti pris assumé de musiques populaires toujours vivace à travers des shows aussi grandioses qu’inédits »
Quels ont été les grands moment de ces trente dernières années ?
Ce n’était pas gagné… L’espace d’une édition, la première en 1989, les Eurockéennes s’appelaient le Festival du Ballon, puisqu’elles devaient se tenir au Ballon d’Alsace. Mais les écologistes obtiennent le déménagement in extremis sur la presqu’île du Malsaucy, que le festival ne quittera plus. Aux Eurockéennes, nous avons connu des débuts extrêmement difficiles mais nous n’avons rien lâché… En 1989, c’était le Rock avant tout et 10 000 spectateurs avec Catherine Lara en ouverture avec un orchestre symphonique. Mais déjà, Noir Désir, Elvis Costello ou encore Jacques Higelin étaient présents. Ce fut en 1990, que le festival prit le nom des Eurockéennes. En trente éditions, les Eurocks ont accueilli plus de 2,4 millions de spectateurs. En 2006, la barre des 100 000 festivaliers sur trois jours est atteinte. En 2013, pour la 25e édition, il y en a eu 127 000 sur quatre jours.
Nous avons eu la chance de conserver une programmation éclectique. Des monstres sacrés de la musique se sont succédé : Santana, James Brown, Bob Dylan, Lou Reed, The Cure, David Bowie, Depeche Mode, Robert Plant ou encore Sting… En 1995, c’est chez nous qu’est révélé le groupe britannique Oasis. The Pixies se reforment sur la scène des Eurocks en 2004. Amy Winhouse donne un de ses rares concerts en France chez nous sur la grande scène.
Et puis au fil des ans, en particulier dans les années 2000, nous nous sommes diversifiés. La scène électro est dorénavant bien représentée avec Daft Punk, Chemical Brothers, Air, Massive Attack… Le hip hop aussi avec, entre autres, Wu Tang Clan, Kanye Wets, Jay Z sans oublier la scène française avec M, Alain Bashung, Thiefaine, Higelin, IAM, Stromae, Louise Attaque… Le mot d’ordre du festival : faire découvrir, souvent avec une longueur d’avance, les stars de demain.
Trente ans, c’est souvent une date clé pour s’interroger sur les avancées d’un festival ? Comment avez-vous préparez cette édition particulière ?
Nous ne voulions surtout pas regarder dans le rétroviseur et faire une espèce de rétrospective ennuyeuse. Nous sommes un festival vivant, en mouvement. Nous devons nous focaliser sur l’avenir. Nous avons donc voulu rendre hommage à l’énergie collective qui nous fait encore tenir debout… et je le dis sans aucune démagogie. Cette année la philosophie défendue par les Eurockéennes s’affirme à travers une programmation riche et diversifiée, à bien des égards. Une variété de styles musicaux tout d’abord, mettant aussi bien à l’honneur les pointures de l’électronique et le rock incendiaire, que le renouveau de la chanson et du rap français. Mais aussi un véritable melting-pot culturel, traversant les mers et les continents, du Guatemala, jusqu’à la pointe de l’Afrique. on veut continuer à découvrir des pépites.
Pour ses trente ans, les Eurockéennes s’offrent une ouverture vers d’autres formes artistiques, comme la sculpture et la danse, est-ce cela que vous appelez « regarder vers l’avenir »?
Absolument. Le festival sortira également des sentiers battus et élargira ses horizons . Nous avons invité Saype, un artiste très talentueux qui réalisera une gigantesque fresque de Land Art . Elle sera peinte au cœur-même de Belfort. D’ailleurs j’aimerais signaler que chaque année, le Eurockéennes ne sont pas un simple festival qui s’étale sur quelques journées, mais bien une ville que nous montons ex-nihilo et que nous déconstruisons. En plus de cette ouverture à l’art visuel, nous avons eu envie de mettre l’accent sur la danse, avec le projet « Mouvement » . Nous avons invité 16 chorégraphes qui pourront improviser sur les scènes du festival. Entre la vision panoramique d’une Grande Roue au cœur des Eurocks, la pyrotechnie d’un feu d’artifice géant et les acrobaties aériennes de la Patrouille de France striant le ciel du Malsaucy, nous avons tout fait pour que cette année reste un instant mémorable. Nous espérons que le public aura envie de s’ouvrir à ces autres formes artistiques et pourquoi pas de les pratiquer… Notre envie est de susciter la curiosité des festivaliers leur montrer que pour progresser, il faut sans cesse garder en tête une ouverture d’esprit et un goût pour la différence. C’est aussi notre rôle.
« Le festival sortira également des sentiers battus et élargira ses horizons »
Depuis 1989, les Eurockéennes sont un festival militant, ce sera encore le cas cette année?
Je crois que c’est en 2003 que nous avons vraiment gagné cette image de festival militant alors que les intermittents du spectacle sont en grève dans toute la France pour défendre leur régime particulier d’indemnisation chômage. De nombreux festivals étaient menacés (Avignon et les Francofolies seront même annulés) mais à Belfort , les intermittents s’étaient prononcés contre le boycott. Ils n’avaient pas voulu priver « les gamins » de ce moment… Cette édition avait été l’occasion d’un dialogue social. Cette année on continue sur cette voie , nous allons offrir une mixité sociale aux couleurs du drapeau LGBT, avec Beth Ditto à qui nous avons laissé carte blanche pour une programmation thématique. Mais nous sommes dans le militantisme joyeux.
Alors la météo sera-elle au rendez-vous car c’est souvent l’autre acteur du festival ?
Les Eurock et la météo ça fait deux. C’est vrai que sur les rives du Malsaucy, la météo est aléatoire, c’est tout ou rien, il peut faire très chaud ou pleuvoir très fort, voire les deux. L’image du spectateur couvert de boue et drapé dans une parka ou un sac poubelle fait partie du folklore des Eurockéennes.
On croise les doigts… Et on ne s’arrête pas nous sommes déjà sur l’édition 2019 et nous avons déjà de grands artistes qui y participeront…
Programme 2018 :
Jeudi 5 juillet : Macklemore, Orelsan, Texas, Big o & Oli, Portugal. The Man, Goldlink, Carnage, Cigarettes after sex, Sampha, Tank & The Bangas, Dream Wife, Fatima Yamaha, Rich Brian
Vendredi 6 juillet : Nine Inch Nails, Prophets Of Rage, Richie Hawtin Close, Nothing but Thieves, FFF, Leon Bridges, Rilès, Pihpoh, Beth Ditto, The Black Madonna, Kiddy Smile, Sophie, Our Girl, Faka, Michelle David & the Gospel Sessions, Nakhane, Baloji, Warmduscher, Insecure Men
Samedi 7 juillet : Queens of The Stone Age, Rick Ross, Jungle, Damso, At The Drive-In, Juliette Armanet, Chronixx, Ski Mask the Slump God, Moha La Squale, BCUC, Superorganism, IAMDDB, Touts, Caroline Rose, Wednesday Campanella, Viagra Boys, Truckks, …
Dimanche 8 juillet : Liam Gallagher, Shaka Ponk, Eddy De Pretto, Lomepal, Alice In Chains, Seasick Steve, Dead Cross, Hamza, The Blaze, Marlon Williams, The Limiñanas, Zeal & Ardo
Pour plus de détails, visitez le site des Eurockéennes.
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Crédit photos : DR Clémence