Olivier d’Auzon: «L’Europe n’est plus une puissance : elle est devenue une tirelire »

Alors que la guerre en Ukraine se poursuit et que Donald Trump tente de transformer la diplomatie en foire aux contrats, Olivier d’Auzon dresse un constat implacable : l’Europe n’est plus qu’un spectateur payé, incapable d’incarner une puissance stratégique. Dans cet entretien sans détour, il décrypte le cynisme des grandes puissances, l’affaiblissement américain et la montée d’un monde multipolaire où les illusions européennes volent en éclats.

Vous décrivez la proposition de Zelensky à Trump comme un « deal » davantage calibré pour flatter l’ego de l’homme d’affaires que pour esquisser une véritable paix : en quoi ce glissement du langage diplomatique vers celui des contrats commerciaux illustre-t-il l’évolution des rapports de force dans les relations internationales contemporaines ?
Parler de « deal », c’est réduire la diplomatie à une opération commerciale. C’est un appauvrissement considérable du langage et de la pratique des relations internationales. La paix ne se négocie pas comme une transaction immobilière : elle se construit dans le temps, par un équilibre des forces et une vision politique. Or quel est l’intérêt pour l’Europe de continuer à financer la guerre en Ukraine ? Lorsque les chefs d’État s’expriment comme des vendeurs ou des acheteurs, c’est que la politique a abdiqué devant le marché. Cela illustre le recul des nations qui veulent agir pour elles-mêmes, et la montée des puissances qui imposent leurs conditions comme un contrat à signer.

Vous comparez les exigences ukrainiennes actuelles aux revendications tchécoslovaques de 1938 : selon vous, le risque est-il que Kiev, en affichant une intransigeance totale, se condamne à subir une « paix imposée » par les grandes puissances, à l’instar de Prague à Munich ?
L’Ukraine croit que l’Occident la soutiendra …