Pierre Larti, pouvez-vous nous expliquer en quoi le dispositif proposé par Aurore Bergé — déléguer à une coalition d’associations le signalement et la censure des contenus — porte atteinte aux principes fondamentaux de l’État de droit et à la séparation des pouvoirs ?
La proposition portée par Aurore Bergé pose de nombreuses questions, sources de sérieuses inquiétudes :
d’une part, il s’agit à l’Etat de déléguer le contrôle d’une liberté fondamentale et constitutionnelle : la liberté d’expression, à quelques structures associatives privées. Nous ne savons pas sur quels critères telle association a été préférée à une autre.
D’autre part, nous assistons à un véritable hold up par des associations militantes d’extrême gauche sur la liberté d’expression. Le risque de censure à des fins idéologiques et politiques est réelle, et non sur une base légale. Imaginez que l’Etat envisage de confier à des associations comme Osez le Féminisme favorable au burkini ou à SOS Homophobie qui affichait qu' »un homme peut être enceint » des prérogatives exorbitantes. Sans compter que la plupart de ces structures ont un prisme politique martelé, avec une ligne anti RN, à l’image de SOS Racisme. Etes vous serein pour les personnes qui oseront écrire que seule une femme peut être enceinte ou que l’immigration n’est pas forcément une chance pour la France ?
Enfin, en ces temps d’économies budgétaires, est-ce bien raisonnable de payer des militants associatifs – par nos impots – pour exercer de telles prérogatives ?
« Nous assistons à un véritable hold up par des associations militantes d’extrême gauche sur la liberté d’expression »
Vous annoncez avoir saisi vos avocats pour contester la légalité de cette coalition sélective. Sur quels fondements juridiques vous appuyez-vous, et quelles stratégies envisagez-vous devant les juridictions nationales et européennes ?
Il est encore trop tôt pour communiquer sur une stratégie définitive ; différentes pistes sont à l’étude, tant sur le plan administratif que pénal.
🔴 Marine Le Pen, Marion Maréchal, tribune de 9 députés RN/UDR : la résistance s’organise contre le projet Aurore Bergé.
De mon côté, j’ai adressé une lettre à François Bayrou et nous mobilisons avec @ASLA_asso nos juristes pour préparer la riposte.
On ne lâche rien. 🔥 pic.twitter.com/XPYCVat224
— Pierre Larti (@pierre_larti) July 13, 2025
Concrètement, comment l’ASLA accompagne-t-elle les lanceurs d’alerte qui subissent répression ou censure? Pouvez-vous présenter vos mécanismes d’aide financière, votre soutien juridique et vos premières réussites ou difficultés?
L’ASLA propose un soutien matériel, juridique et humain : avec notamment l’étude juridique du dossier, la représentation et la conduite de la procédure par un de nos avocats.
Plusieurs dizaines de procédures ont été initiées, dont plus d’une vingtaine avec succès, d’autres étant toujours en cours.
Au titre des batailles gagnées, nous avons fait plier Meta qui avait supprimé des comptes de lanceurs d’alerte de droite, avons fait annuler des subventions versées à l’ONG pro-immigration SOS Méditerranée ou encore aidé une élue à gagner son procès contre une mosquée radicale qui l’avait traitée en justice parce que l’élue avait alerté sur les prêches radicaux et misogynes de l’imam.
Nous avons également fait sauter des interdictions de manifestation ou fait condamner un élu communiste en diffamation. Il est fini le temps où la gauche régnait impunément dans les tribunaux.
« Au titre des batailles gagnées, nous avons fait plier Meta qui avait supprimé des comptes de lanceurs d’alerte de droite, avons fait annuler des subventions versées à l’ONG pro-immigration SOS Méditerranée »
Selon vous, comment trouver l’équilibre entre la nécessaire lutte contre les contenus haineux et la préservation d’une liberté d’expression effective et non partisane ? Quelles garanties proposeriez-vous pour éviter toute instrumentalisation politique de la régulation en ligne?
La France a une des législations les plus développées sur la liberté d’expression et ses corolaires. Il suffit d’appliquer la loi : si des choses sont écrites ou dites et vont à l’encontre de ce que prévoit le droit, alors il est toujours possible de faire valoir son droit en justice : pourquoi confier le une prérogative de censure à quelques associations partisanes et politisées ?
Nous ne voulons pas d’un dispositif qui déléguerait le pouvoir de contrôle sur internet à des intérêts privés : l’Etat dispose de moyens compétents.
« Nous ne voulons pas d’un dispositif qui déléguerait le pouvoir de contrôle sur internet à des intérêts privés : l’Etat dispose de moyens compétents »
Si le projet Bergé venait malgré tout à être adopté, quelles seraient, à votre sens, les conséquences à moyen et long terme pour la démocratie numérique et le pluralisme du débat public en France?
Il y a de quoi être très inquiet : c’est l’Etat de droit et l’égalité d’accès au régulateur qu’est l’ARCOM qui s’effondrent.
Plus largement, qu’est ce que cela nous dit sur l’état de la liberté d’expression en France?
Comme toujours, dès lors que les opinions majoritaires – sur l’immigration, le wokisme, l’insécurité, tous les sondages le montrent – ne vont pas dans le sens des élites au pouvoir, on interdit, on bâillonne, on censure, au nom du bien. C’est le symbole d’un pouvoir et d’un vieux système politique aux abois.