François Bégaudeau : Tout sur Jeanne Moreau

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Sheila nous avait mis en appétit pour les Français moyens. Bégaudeau se donne les moyens de chanter la résistible ascension de Jacques et Jeanne Moreau. C’est irrésistible.

Jeanne aide sa mère à faire le ménage au gymnase. Jacques seconde son père dans l’entreprise familiale de maçonnerie. Il est timide et construit inlassablement des maquettes. Elle est rêveuse, collectionne les cartes postales et consigne les événements de sa vie dans l’agenda La Redoute, ce qui aurait pu drôlement aider Bégaudeau à raconter la saga familiale. Oublions les préliminaires. Ils se marient et à voir Jeanne se trémousser sur la piste de danse, on réalise que l’amour ne fait pas bouger que le cul des Andalouses. Un frigidaire Brandt les attend, cadeau des invités à la noce. On se fait la bise sur les quatre joues. Le couple commence petit. Dommage que l’heure de « Reine d’un jour », soit déjà passée. Il n’aurait pas fallu attendre le canapé-lit en promo chez Confo. C’est qu’un petit est arrivé : Daniel, because Balavoine, que la grand-mère s’acharne à appeler Dany, pas because Cohn-Bendit. L’ascenseur social fonctionne paisiblement. Un conte de fées ? A condition d’y apporter certains accommodements. A la page 69, Jeanne avoue avoir couché avec son patron assureur. Des circonstances atténuantes ? « Il habitait au-dessus de l’agence, c’était pratique ». Page 70, Jacques dit moi aussi j’ai fait des conneries. Balle au centre. Pas de quoi émouvoir la pendulette de cuivre donnée par les parents. Un scénario parfait pour « Strip Tease », magazine de la télévision belge qui déshabillait la société…

Ensuite un long fleuve tranquille ? Pas vraiment, mais le naturel et l’empathie de Bégaudeau agissent comme ces œufs de buis utilisés autrefois par les classes laborieuses pour ravauder les espérances usées. Il écrit avec ce style ébarbé qui fait mouche et rachète les boursouflures des Bernard Henry qui lévitent ou poussent des cris d’Onfray au spectacle de la modestie. Puis, avoir choisi pour titre le plus beau mot de la langue française est un gage de bonheur.

« L’amour », François Bégaudeau, Verticales. 14,50 €

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