Mario Draghi propose une révision des traités européens pour accentuer le fédéralisme
Lors d’une conférence donnée à Cambridge le 11 juillet dernier, l’ancien premier ministre italien a pris parti pour une réécriture des traités européens. Selon lui, la logique fédérale doit être poussée encore plus loin pour faire face aux grands enjeux de l’avenir.
Les paroles d’un eurocrate de premier rang à la retraite sont toujours précieuses. Dans la plupart des cas, le responsable en question va soit totalement désavouer l’ensemble de son œuvre, soit proposé d’aller encore plus loin dans la ligne qu’il a suivie. Mario Draghi s’inscrit dans le deuxième cas.
Accentuer le fédéralisme européen pour ‘‘faire face ensemble’’
Selon lui, « les stratégies qui assuraient autrefois notre prospérité et notre sécurité – dépendance aux Etats-Unis pour la défense, à la Chine pour les exportations et à la Russie pour l’énergie – sont aujourd’hui devenues insuffisantes, incertaines ou inacceptables » tel que sont rapportés ses propos dans un article du Corriere Della Sera. Ainsi donc, pour répondre à ces défis militaires, énergétiques et commerciaux, mais également écologiques, numériques et migratoires, comme il l’indique par la suite, l’UE doit être en capacité de mettre en place une politique budgétaire commune.
L’ancien président de la BCE assure en effet que des politiques budgétaires nationales divergentes anéantiraient l’impact des états européens sur ses défis « globaux ». « La seule option est donc de centraliser le pouvoir d’investissement sur des priorités partagées au niveau fédéral : environnement, défense, santé » estime Francesco Bertolino, l’auteur dudit article. Comme il est coutume de faire quand l’UE est confrontée à une crise, on pense immédiatement à une mutualisation des moyens plutôt qu’à une simple coopération entre les différents acteurs.
D’autant que la Commission Européenne a déjà droit de regard, si ce n’est droit de citer, dans la validation des budgets annuels des différents états.
Pour terminer, Mario Draghi s’explique sur le timing de ses déclarations par le contexte géopolitique en Europe. Selon lui, la guerre en Ukraine feraient craindre aux européens une stagnation vis-à-vis d’une intégration plus poussée des états membres, en raison de la prétendue menace russe sur le continent. Et les résultats du Brexit rendraient toutes sorties « peu attrayantes », omettant volontairement le fait que la situation sur le continent n’est guère plus brillante et que les conséquences du Brexit sur la Grande-Bretagne sont loin d’être aussi désastreuses que celles promises par les eurocrates en 2016. Cette situation rendrait donc « les coûts relatifs d’une intégration plus poussée plus faibles ». Les ‘‘coûts’’ qualifiés de ‘‘relatifs’’ par Draghi étant tout de même immense, du simple fait de la perte de souveraineté qu’ils impliquent.
( capture d’écran du discours de Mario Draghi, President of the European Central Bank – Youtube )