Cinémed : Manuel, la vie après l’orphelinat
Par Romain Rougé – Manuel de l’italien Dario Albertini est présenté dans la compétition officielle longs métrages du 39ème Cinémed de Montpellier. Drame social et psychologique, le film raconte la sortie de l’orphelinat d’un jeune homme de 18 ans.
Au départ, Dario Albertini réalise un documentaire. La republica dei ragazzi (2014) raconte la création d’un refuge dédié aux orphelins. Une institution d’excellence pour s’occuper d’enfants de la guerre (à sa création), touchés par le divorce (années 70) ou issus de l’immigration (beaucoup aujourd’hui). Un melting pot de jeunes qui ont un point commun : à leur majorité, ils doivent quitter la structure et vivre leur vie.
Manuel, le film, parle de cet « après ». Pour son premier long métrage, le réalisateur italien décide de donner une suite à son documentaire, sous forme de fiction. Si Manuel existe vraiment, c’est sous les traits de l’acteur Andrea Lattanzi qu’il prend corps dans la fiction. Et quel acteur. Il porte le film admirablement et, avec des dialogues limités, parvient à faire passer les émotions d’une extrême justesse, voire beaucoup d’intensité selon les scènes. Car l’histoire du film est la sienne : alors qu’il vient d’avoir 18 ans, Manuel doit quitter le refuge et retrouver sa mère, dont l’assignation à résidence sera obtenue s’il prouve aux autorités qu’il peut s’occuper d’elle.
Mais comment devient-on un adulte responsable quand les seuls repères qu’on a sont issus d’un foyer dans lequel on s’occupait de soi à temps complet ?
Le film se focalise intelligemment sur cette difficulté en suivant les étapes de Manuel pour se construire une vie d’adulte, à présent responsable. Malgré ses efforts et les quelques aides qu’il trouvera, le jeune homme n’évite pas les (vraies) crises d’angoisses liées aux incertitudes, à un avenir nébuleux.
Andrea Lattanzi fait un travail remarquable avec ce personnage à la fois perdu et déterminé, à la sensibilité exacerbée. Ses regards, ses gestes, nous emportent vers un horizon que l’on veut croire lumineux pour lui. Sous le ciel gris de sa banlieue natale, il fera des rencontres qui l’aideront à avancer, il tentera de construire une vie qui, hors foyer, n’a jamais eu de solides fondations.
Le film parle aussi de la perte de repères quand on idéalise un « dehors » auquel on n’a jamais appartenu. Car on ne saura rien de la mère (que l’on aperçoit seulement à des moments clefs du récit) ni même du passé de Manuel. Cette mise à distance permet de se consacrer pleinement sur la psychologie du personnage. On évite alors toute curiosité malsaine et réductrice pour se focaliser sur le parcours de Manuel à l’instant T.
L’originalité du propos alliée à l’intense jeu d’acteur, font de Manuel une belle surprise de la compétition longs métrages du 39ème Cinémed.
Manuel
Réalisation : Dario Albertini
Scénario : Simone Ranucci, Dario Albertini
Interprétation : Andrea Lattanzi, Francesca Antonelli, Renato Scarpa, Raffaella Rea, Giulia Elettra Gorietti
Production : Angelo Barbagallo, Matilde Barbagallo
Durée : 1h37
Film de la compétition officielle longs métrages du 39ème Cinémed de Montpellier : www.cinemed.tm.fr
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