Cinémed : Dede, la force des femmes dans la Géorgie traditionnelle

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Par Romain Rougé – Dans la catégorie des longs métrages de la compétition officielle du Cinémed de Montpellier, il y a souvent de petites pépites qui émergent. C’est le cas de Dede, un premier film géorgien de Mariam Khatchvani.

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Eloignons-nous un peu de la méditerranée pour se rapprocher de la mer noire et atterrir en Géorgie. Plus précisément en Svanétie, province historique située dans le nord-ouest du pays. Le film Dede nous amène à la rencontre des Svanes, un groupe ethnique.
Dede (« maman » en géorgien) est dépaysant à plus d’un titre : d’abord par les magnifiques paysages montagneux de cette région retirée, puis par les traditions, au cœur du film. Nous faisons alors connaissance avec Dina, promise en mariage à David à peine rentré de guerre. Nous sommes en 1992. David ne revient pas seul mais accompagné de Gegi dont Dina tombe amoureuse. La jeune femme va alors aller à l’encontre de l’ordre établi, jusqu’à s’opposer fermement aux lois patriarcales qui régissent son village.
De l’aveu de la réalisatrice, cette histoire est celle de sa grand-mère, ce qui donne (s’il le faut) une note extrêmement touchante à Dede. Une élégie à sa région natale aussi, à laquelle la cinéaste voue un attachement très particulier. « Pour moi, c’est un endroit paradisiaque malgré les traditions et les hivers rugueux », admet Mariam Khatchavni lors de la présentation du film. Et aux vues de la (très) belle photographie, on a plutôt tendance à la croire.

Dede : le droit des femmes en Georgie

Reste le sujet central du film, le droit des femmes et plus précisément ici, le combat de l’une d’entre elles pour vivre comme elle l’entend, à commencer par épouser un homme dont elle est réellement amoureuse. Et dans un même temps, contrer ces rapts de femmes par les futurs maris, toujours traditionnels et encore d’actualité, même si des changements ont été depuis amorcés par le gouvernement Géorgien, selon la réalisatrice. A travers le personnage de Dina, on assiste à une émancipation naissante et téméraire, notamment retranscrite dans une scène de course de cheval (là encore traditionnelle) d’une époustouflante beauté.
Côté casting, un seul acteur professionnel, George Babluani qui joue le rôle de Gegi. Les autres sont simplement des habitants du village qui n’ont rien à envier à des acteurs professionnels. Cet ancrage dans le réel qui rapproche le film du documentaire ethnographique se retrouve également dans le scénario, par exemple quand les habitants invoquent les esprits après la mort de l’un des leurs.

Des mœurs aussi mystiques que révélateurs d’une société à contre-courant. La réalisatrice révèle elle-même avoir invoqué ces esprits pour une scène qui demandait une météo neigeuse et, plus globalement, pour que le film soit bien accueilli. Lors de sa première projection au Cinémed, il semble que ces esprits aient entendu ses prières et se soient manifestés ! Dede est assurément un coup de cœur du BSC News et une belle invitation à découvrir l’un des pays les plus méconnus du Caucase. C’est aussi et surtout une envolée filmique sur cette force qu’ont les femmes à (re)prendre leur destin en main.

Dede
Réalisation : Mariam Khatchvani
Production : Vladimer Katcharava, Sam Taylor, Mike Downey, Igor A. Nola
Scénario : Mariam Khatchvani, Vladimer Katcharava, Irakli Solomanashvili
Interprétation : George Babluani , Natia Vibliani, Girshel Tchelidze, , Nukri Khatchvani , Mose Khatchvani
Géorgie/Qatar/Irlande/Pays-Bas/Croatie – 2016 – 1 h 37 mn
Compétition officielle long métrage du 39ème Cinémed de Montpellier : www.cinemed.tm.fr
Bande-annonce : https://youtu.be/O3K8W8CecKA

( Crédit photo : DR )

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