Le Temps et la Chambre : une pièce, plusieurs possibilités

par
Partagez l'article !

Par Romain Rougé – Présentée les 22 et 23 février dernier sous le chapiteau de Sortie Ouest, la pièce Le Temps et la Chambre a envoûté le public par son étrangeté alliée à sa maîtrise de la narration. Retour sur cet ovni théâtral.

Partagez l'article !

Assister à la représentation du Temps et la Chambre, c’est un peu se retrouver dans le tableau Nighthawks d’Edward Hopper ou dans un épisode de la Quatrième Dimension. L’étrange pièce imaginée par le dramaturge allemand Botho Strauss casse les codes de la narration et pose un regard multidimensionnel sur les relations humaines. Le décor – cette chambre où le temps s’est arrêté – devient le théâtre d’infinies possibilités. Un lieu où les personnages et la temporalité s’entremêlent, à la lisière du tragique, du comique et du vaudeville.

C’est dans cette Chambre que la réalité la plus banale côtoie le mystique : L’Homme sans montre croise La Femme Sommeil, L’Homme au manteau d’hiver ou L’Impatiente. Tous ont en commun cet espace dans lequel se dessine l’absurdité de la vie. Un personnage représente à lui seul la gent féminine : Marie Steuber est mystérieuse et voyageuse. Elle interagit avec des hommes de passage, oscille entre raison et sentiments tous azimuts. Des hommes qui revêtiront eux-mêmes d’autres identités pour appuyer le propos de l’expérience, du vécu.

Mis en scène par Alain Françon, Le Temps et la Chambre garde son aspect « fragmentaire » assumé : exit la linéarité de l’histoire, les seuls points d’ancrage sont les liens que tissent les personnages et leurs identités aléatoires. Le travail d’écriture est en cela remarquable. Et c’est bien là la force de la pièce : on rit de l’absurdité des situations et on s’émeut des rapports humains tout en s’attachant aux personnages. Une pièce insondable, dont on ne peut que caractériser l’envoûtement qu’elle dégage.

Quand le rideau tombe, on sait que les personnages hanteront longtemps la Chambre et la mémoire du public. Un monde des possibles s’est ouvert à nous et comme dans la fameuse zone crépusculaire, on fait éclater le rationnel en sublimant l’imagination.

Le Temps et la Chambre

De Botho StraussMise en scène : Alain FrançonTexte français : Michel VinaverCollaborateur artistique à la mise en scène : Nicolas DouteyProduction : Théâtre des nuages de neige, TNS, Colline Théâtre national de ParisCoproduction : Théâtre des nuages de neige, Théâtre National de Strasbourg, Colline Théâtre national de ParisAvec le soutien de la Comédie de Saint-Etienne / DIESE / Région Auvergne Rhône-AlpesAvec : Antoine Mathieu, Charlie Nelson, Gilles Privat, Aurélie Reinhorn, Georgia Scalliet de la Comédie Française, Renaud Triffault, Dominique Valadié, Jacques Weber, Wladimir Yordanoff et la voix d’Anouk Grinberg.

(Crédit photo : Michel Corbou)

Lire aussi dans nos actualités théâtrales :

Mascarades : comédie douce-amère sur les ravages de la solitude

« Scène de la vie conjugale » : la trajectoire d’un couple en perdition

Scène Nationale de Sète : une seconde partie de saison éclectique

Begin The Beguine : John Cassavetes ou l’humanité alambiquée

Laissez votre commentaire

Il vous reste

0 article à lire

M'abonner à