Le Front populaire : un moment de forte mobilisation
Par Régis Sully – L’ « Histoire du Front populaire » de Jean Vigreux retrace un épisode majeur de l’histoire de la France contemporaine. Mais la victoire des partis de gauche aux élections de mai 1936 n’est que l’aboutissement d’un processus commencé au lendemain des émeutes du 6 février 1934 perçues comme une menace à caractère fasciste contre le régime républicain.
Il est vrai que l’arrivée d’Hitler au pouvoir en 1933, la présence de Mussolini à la tête de l’Italie contribuaient à légitimer de telles craintes. Au-delà de la réponse à une situation politique bien particulière, l’arrivée de la gauche au pouvoir est le fruit également de la crise économique qui frappe la France plus tardivement que les autres pays. Et l’auteur de retracer les effets sur le terrain des conséquences de cette crise comme les marches des chômeurs et notamment celle qui s’est déroulée du 18 novembre au 2 décembre 1933, comme également la lutte des paysans contre les saisies effectuées à l’encontre de leurs exploitations croulant sous les dettes. Lutte qui met en concurrence le parti communiste très actif dans ce domaine avec les agrariens et surtout les comités de défense paysanne de Dorgères.
L’enchaînement des événements politiques qui vont conduire à la victoire électorale du Front populaire est restitué avec clarté, ainsi que la pause puis l’ effacement progressif en 1938. Du pacte d’unité d’action signé officiellement le 27 juillet 1934 entre le parti communiste et le parti socialiste, première pierre de l’édifice, jusqu’à la prise de fonction du gouvernement de Léon Blum en juin 1936, le Front populaire avait le vent en poupe. Mais ce succès est non seulement l’affaire des appareils politiques et en particulier du parti communiste avec l’aval de l’internationale mais également d’une mobilisation sans précédent d’une partie de la population.
Car cette période là fut « un moment de forte mobilisation » pour reprendre le titre d’un chapitre du livre. Les associations enregistrent un afflux de nouveaux adhérents mais ce sont les organisations syndicales et surtout la CGT qui comptait en 1937 jusqu’à 4 950000 adhérents. Les partis politiques en profitent également ceux de gauche mais aussi ceux de droite ainsi le Parti social français devient un parti de masse. Car le Front populaire n’a pas que des partisans mais il faut nuancer même à l’intérieur des groupes sociaux et des corps constitués et on lira avec intérêt le dernier chapitre du livre sur l’attitude des élites, de l’église, du patronat et de l’appareil d’Etat.
Au total un livre passionnant sur une période qui a marqué durablement le pays.
Histoire du Front populaire
L’échappée belle
Jean Vigreux
Tallandier
Prix 22,90€
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