Angoulême 2015 : l’exposition passionnante sur l’univers, les influences et les méthodes du scénariste Fabien Nury
Par Julie Cadilhac – bscnews.fr/ W.E.ST, XIII Mystery, Silas Corey, La mort de Staline, Mort au Tsar, Atar Gull, Tyler Cross…autant de titres consacrés par le public et la critique auquels l’exposition rend hommage. Le choix d’une mise en scène avec la présentation de nombreuses planches originales commentées par Fabien Nury et ses partenaires de création est fort pertinente : le public y découvre ainsi un artiste profondément rigoureux et exigeant, aux univers passionnants. En fin d’exposition, on trouve d’ailleurs une bibliographie, une filmothèque, un lexique, une liste d’influences et une méthode d’écriture en cinq phases » développement, écriture, découpage, dessin et accompagnement », utile pour tous ceux qui sentiraient pointer en eux des désirs de carrière dans le neuvième art…
Au gré des panneaux, on pioche d’abord parmi les réflexions de Pierre Alary » Je n’ai jamais autant travaillé qu’avec lui », « Pour Fabien, l’essentiel, c’est le récit. Pas besoin de tout révéler, il laisse au lecteur un vrai rôle d’interprète. » Au passage, on admire le graphisme des planches de Silas Corey aux Galeries Lafayette à l’encre de chine et, guère plus loin, celles du mouchoir meurtrier tombé par inadvertance, au début du tome 1 de Mort au Tsar. Puis se présente l’univers singulier d’Atar Gull et Tyler Cross, imaginé avec le dessinateur Brunö, qui affirme que Fabien Nury a eu une influence majeure sur son dessin, qu’il y a eu un avant et un après. A propos de la scène de la pendaison dans Atar Gull, Fabien Nury confirme son caractère perfectionniste: » l’alliage de sensualité, de fantastique et de macabre m’est apparu immédiatement parfait, et c’est l’une des rares séquences que je n’ai pas voulu retoucher. » Plus loin, à propos de la planche 74 qui raconte le départ de la Jamaïque d’Atar Gull, Brunö, évoquant les modifications demandées par le scénariste qui préférait que l’on ne montre pas un port et ses bateaux mais plutôt un aperçu lointain de l’île, dit : » Pour moi, Fabien est l’ami du dessinateur dans la mesure où la première case de la version définitive de cette planche, en l’occurrence, a demandé beaucoup moins d’énergie et est finalement beaucoup plus forte. »
Le visiteur découvre ensuite la série récompensée par de nombreux prix prestigieux de la bd, Il était une fois en France. En dessous des planches originales, sont exposés des « brouillons » de planches et des extraits de scenarii que l’on peut confronter à la planche finale située juste au dessus. Lire les commentaires permet de mieux saisir la richesse des effets voulus; on peut constater ainsi qu’à la dernière case du tome 4, à la toute fin de la mise en scène de la Marseillaise, » les quatre coups de tambour à la fin sont évoqués par les tirs d’obus des chars. » On apprend également que les césures de dialogue sont une des spécialités du duo Nury/ Vallée : « Il y en a énormément dans Il était une fois en France, et leur emplacement est un élément capital pour la fluidité de la lecture. Le » Bordel de…….Meeeeerde! » sur deux cases en atteste. » Et, pour le plaisir des yeux, de surcroît, on goûte au trait précis et habile de Sylvain Vallée.
Enfin, pour clôturer avec humour cette formidable exposition, vous aurez l’occasion de voir une planche d’une fable écrite dans le cadre d’un recueil publié chez Dargaud, les Fables de la Poubelle,qui narre « l’histoire d’un poulpe psychopathe qui commence par un génocide de crevettes, avant de manipuler un crapaud de mer amoureux d’une sole »…Bref, tout un programme! Foncez!
Fabien Nury
Exposition Festival d’Angoulême 2015
Espace Franquin, boulevard Berthelot
Commissariat: Fabien Nury
Graphisme et scénographie: Philippe Ghielmetti
Du jeudi 29 janvier au dimanche 1er février 2015
Crédit-photo: Expo Fabien Nury. Fabien Nury. Espace Franquin. © 9eArt+, photo Jorge Fidel Alvarez
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