L’assassin de Bonaparte : une immersion passionnante au coeur du Directoire

par
Partagez l'article !

Par Régis Sully – bscnews.fr/ « La pourriture me fascine. Peu d’époque l’ont offerte aux observateurs avec l’amplitude de celle que nous vivons. Elle est partout… Concussions, orgies, divorces sont coutumiers, alors que la misère n’a jamais été aussi grande et les riches aussi impudents» confie un personnage à Sébastien Cronberg. Le lecteur est d’emblée immergé dans la campagne d’Italie en juillet 1796 et surtout dans la France du Directoire en décembre 1797, le 6 exactement le lendemain de l’arrivée à Paris du général Bonaparte, tout auréolé de sa campagne transalpine. Il emmène avec lui Sébastien Cronberg meurtri dans sa chair par la répression sanglante des troupes françaises qui tueront son père.

Partagez l'article !

Pour se venger, Il projette d’assassiner le général Bonaparte pour finir à son service, subjugué par le personnage. L’assassinat lors d’une fête débridée d’un affairiste comme il y en avait tant à cette époque, est à l’origine de la mission que confie Bonaparte à Sébastien: retrouver chez la victime ses lettres qui pourraient lui nuire. Cronberg part donc avec un ordre de mission bien précis. Ses pérégrinations dans le Paris de décembre 1797et de janvier 1798 est l’occasion de divaguer au gré de l’enquête dans la haute société du directoire. Le lecteur y croisera des personnages politiques de premier plan: outre Bonaparte, dont la popularité est au zénith, d’autres figures célèbres peuplent le récit: Talleyrand, Barras, Berthier, les directeurs La Révellière, Reubell et François de Neufchâteau. Les traits de ces personnages sont précis et parfois cruels. Ainsi La Révellière-Lépeaux est ainsi décrit comme « bossu, de longs cheveux frisés entourant un masque simiesque, il ressemblait, avec ses jambes longues et grêles, à une tubéreuse trop vite montée en graine». Les hommes politiques ne sont pas les seuls à peupler ce roman, les femmes célèbres accompagnent cette fiction: Joséphine de Beauharnais dont la fidélité n’est pas la vertu première, Théresa Cabarrus, l’épouse de Tallien, donnent la mesure de la frivolité de cette société thermidorienne. A côté de ces personnages réels d’autres nés de la fiction concourent à donner une image exacte de cette époque. La plupart sont des nobles émigrés qui sont revenus à la suite de la chute de Robespierre. Mais le coup d’Etat de Fructidor est passé par là( septembre 1797) les obligeant à la clandestinité d’autant plus qu’ils manigançaient un attentat contre Bonaparte à qui ils prêtaient le projet d’envahir l‘Angleterre, ce qui n’était pas complètement farfelu.
Au delà de l’intrigue que Sébastien Gronberg conduira à son terme, c’est l’originalité de cette époque qui est restituée, un univers médiocre, superficiel fait de calculs, de compromis et du souci de préserver ses intérêts. Un régime voué à disparaître. De la dureté de l’occupation de l’Italie aux divertissements des puissants on mesure la puissance d’évocation de cette fiction historique. C’ est l’un des intérêts de ce livre.

L’assassin de Bonaparte d’Hubert Prolongeau – Editions J’ai lu – 313 pages – 7,6 €

A lire aussi:

Dimitri Casalli: l’Histoire Amputée

L’Encyclopédie de la grande guerre

L’Europe barbare :  » l’histoire d’un continent qui sombre dans l’anarchie »

L’Allemagne sous la lumière crue de la fiction

Exercices de survie : le dernier ouvrage de Jorge Semprun

Marie-Pierre Rey narre une singulière rencontre franco-russe

Verdun : l’édification d’une légende ?

Henri Giraud: la patrie chevillée au corps

Laissez votre commentaire

Il vous reste

0 article à lire

M'abonner à