Guillaume Fédou : un nouveau monde

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Par Laurence Biava – bscnews.fr / Le premier roman de Guillaume Fédou raconte l’histoire d’Arthur Ganate et de son séjour à New-York avec sa mère dépressive. Alors qu’il erre dans la ville « debout » pour y découvrir sa splendeur, et sa démesure, avec une nonchalance toute française, plein de ces restes d’enfance et le souvenir obsédant d’un amour ancien, il subit un voyage vite chaotique et se retrouve à vivre un cauchemar vivant : deux avions se sont écrasés sur les tours du World Trade Center.

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C’est le 11 septembre 2001 dont il devient un de ces témoins terrassé par le traumatisme de l’événement. 

Deux histoires se superposent dans ce livre, l’une servant à alimenter l’autre. Elles se répondent en partie. ll y a d’abord l’histoire personnelle avec la mère. Arthur Ganate parviendra t-il à se sortir de lui-même et de l’emprise de cette femme « yiddish » pour devenir un véritable adulte et un artiste accompli ? Ce voyage est, en quelque sorte, celui de la nouvelle chance pour une nouvelle vie.

Et puis, il y a l’autre, la plus fondamentale. Celle de l’Amérique en guerre, avec ce Sud de Manhattan qui devient le centre du monde. Le monde change autour de Ganate qui se trouve à quelques encablures des lieux de la tragédie. Oui, c’est un monde qui s’écroule, une civilisation qui bascule, et l’anti-héros se retrouve bel et bien face à lui même et face à sa condition. Sa perception du monde qui l’entoure, forcément, change aussi et on se sent soudainement plus « mortel », et plus vulnérable qu’avant.

La force du livre est de dire en substance qu’on ne peut plus se permettre d’être « décalé » comme autrefois. Que la quête de réussite, à tous points de vue a un goût âcre. Qu’à force d’avoir changé notre fusil d’épaule, nous avons fini par devenir lucides : qu’à force d’avoir soufferts, nous avons accepté la configuration de l’après 11 septembre 2001. Nous avons accepté la désillusion, les conséquences culturelles artistiques : nous avons sablé la fin de l’innocence, et les débris de ce monde des années 80/90 qu’on pensait immuable. Où le libéralisme hédoniste semblait triompher sans peine, où l’on n’acceptait pas cette révolution conservatrice dont on a tous payé le prix.
C’est un très bon premier roman très bien écrit. Sans doute est-ce le livre d’une génération, une nouvelle génération perdue, qui ne peut pas faire l’impasse sur l’après 11 septembre, sans oublier ce qui s’est passé ensuite, en France dans les années 2002.

Mon numéro dans le désordre
Guillaume Fédou
Editions Léo Scheer
252 pages – 19 euros

( crédit photo François Percheron)

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