Après Simenon, quel roman policier en Belgique ?

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Par Marc -Emile Baronheid – bscnews.fr/ Depuis Simenon et, dans une très moindre mesure, Steeman, le roman policier en Belgique s’est fait singulièrement discret. Son salut viendrait-il du Nord, cette langue de terre dont Brel aimait à célébrer les charmes et les gourmandises ? A moins que les artistes …

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Le fin limier de la Venise du Nord. Pieter Aspe, né en 1953, est une célébrité en Flandre. Il y a publié une trentaine de romans au succès époustouflant, adaptés parfois à la télévision, autour des frasques et des succès d’un commissaire de police superbement baroque, sentimental, enquêteur hors pair aux deux talons d’achille : la chair et la bière. Son inoxydable héros s’appelle Van In. Il vit à Bruges, y traque et confond les criminels, entre deux Duvel et souvent plus car affinités, résistant peu aux charmes d’une collègue délurée, malgré les terribles accès de jalousie de sa compagne Hannelore.
Tout commence par deux mots en latin écrits sur le cadavre d’un homme. Les quelques éléments laissés par l’assassin ne mènent pas bien loin. La piste sera sinueuse et égarante, d’autant que Van In est préoccupé par son mariage prochain avec la volcanique Hannelore, juge d’instruction. Voyant son amant dans une impasse, Hannelore y va d’un conseil éclairé : « Bois une Duvel, dit-elle. Nous avons du pain sur la planche ». A mesure que Van In engloutit les bières, le lecteur est pris de tournis, dans ce roman typiquement flamand, à l’ humour de commissariat mâtiné de café du commerce. Sous l’épaisseur, l’étincelle, l’ironie, l’entreprise de décapage des mœurs et des institutions brugeoises. C’est la 13e traduction en français (avec parfois des lourdeurs) de Pieter Aspe. Comme Maigret, on peut prendre Van In en marche, à tout moment. Mais là où le flic français esquive ivresses et sollicitations galantes, son collègue du Plat Pays y plonge goulûment. Ce n’est pas San Antonio au pays de la crevette, mais rien ne dit que l’occasion, l’herbe tendre et l’on ne sait quel diable rouge le poussant, le breughelien Van In ne répondra pas à nos espoirs.

« 13 »
PIETER ASPE
Albin Michel, 18 euros

Ah Marieke, Marieke. Maxime Gillio est né en 1975. Prof défroqué, il serait capable de réciter les propriétés organoleptiques de n’importe laquelle des innombrables bières belges. Son flic à lui est anversois : le commissaire Van der Kuyp. A croire que tous les Van du pays sont soit flics, soit coureurs cyclistes. Il est flanqué de Marieke Pasquier, l’inspectrice qui possède « les plus beaux attributs de la police belge ». On a trouvé dans une chambre d’hôtel de la ville le cadavre d’un citoyen français que d’aucuns tenaient pour favori de la prochaine élection présidentielle. Ça ne vous rappelle rien ? Luc Mandoline, ancien légionnaire, embaumeur hors pair et fouineur à ses heures est envoyé en Belgique, flanqué de son inséparable Sullivan Mermet, pour noyer le poisson libidineux et lui rendre une allure acceptable. Le duo relève bientôt des étrangetés et décide d’y voir plus clair. Ecrivain ayant jeté l’encre dans la cité de Jean Bart, Gillio donne libre cours à une imagination rigoureusement délirante, déjà déployée dans ses romans précédents, dont « La fracture de Coxyde » (éditions Ravet-Anceau), farce hénaurme et gouailleuse dans laquelle il donnait sa pleine mesure. Gillio est le croisement de Bérurier et SAS. Il n’a pas son pareil pour sonder l’âme flamande et ses éclaboussements les plus paroxystiques. Même s’il lui arrive de forcer le trait, pour trouver le dernier carat belgo-belge, ce clone de primitif flamand demeure vraisemblable dans l’expérience des vases tonitruants. Corsaire du style, il est capable de rapprocher imperturbablement, à trois lignes d’intervalle, le mot « couilles » et un subjonctif en smoking. On l’aura deviné, Gillio n’est pas passible d’Académie française mais il n’en a cure.

« Anvers et damnation »
Maxime Gillio
L’Atelier Mosésu, 9,95 euros

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