Pierre Charvet :  » Offrir l’excellence musicale lors du Festival Radio France de Montpellier « 

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Par Nicolas Vidal – bscnews.fr / À l’occasion de cette nouvelle édition du Festival de Radio France et Montpellier Languedoc Roussillon, nous avons sollicité Pierre Charvet, directeur adjoint du Festival, musicien talentueux et animateur auprès des médias en tant que pédagogue sur la musique. Il a notamment présenté plusieurs émissions dont Presto ! sur France 2. Avec son enthousiasme et sa passion, Pierre Charvet nous présente cette nouvelle édition et ses nombreux événements incontournables, revient sur l’intérêt du grand public pour la musique classique et les actions à mener pour la démocratiser.

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Pour cette nouvelle édition du Festival de Radio France, quel a été le fil rouge que vous avez suivi pour bâtir cette programmation ?

Avec deux cents manifestations, une multiplicité de lieux, du classique avec l’opéra, le symphonique, la musique de chambre, du jazz, de l’électro, des films, des débats, il n’y a pas un fil rouge, mais plusieurs fils rouges ! Une seule constante : offrir l’excellence musicale au plus grand nombre.

Une nouvelle fois, le Festival donnera-t-il une place d’honneur « à la redécouverte des oeuvres oubliées » selon les mots de Jean-Pierre Le Pavec ? Et dans quelles proportions ?
C’est une des grandes qualités de ce Festival que d’avoir offert au public, depuis plusieurs années, des oeuvres qu’il n’entendait pas ailleurs. C’est même devenu une marque de fabrique, désormais imitée par beaucoup !Je pense qu’il faut bien sûr poursuivre cette tradition de faire revivre des oeuvres oubliées, mais sans non plus se préoccuper de la part de ces concerts par rapport au reste. C’est l’intérêt de l’oeuvre qui nous motive avant tout, pas simplement l’idée de faire jouer quelque chose que les autres ne joueraient pas. Cette année nous « ressuscitons » deux opéras de très grande valeur, Madame Sans Gêne, et La Vivandière. Ce dernier n’a jamais été enregistré du tout et fera sans doute l’objet d’un disque. Et le CD de l’opéra que nous avions fait jouer avec succès l’année dernière, « Thérèse », de Massenet, vient justement d’obtenir ces jours-ci un Diapason d’Or.

Qu’est-ce qui est le plus délicat à mettre en place dans un Festival comme celui-ci lorsqu’il y a une volonté manifeste d’attirer un public très large à la lumière de ce que vous disiez récemment dans une interview « Mon souhait : décomplexer le grand public vis-à-vis de la musique classique » ?
Attirer un public large, cela se fait presque naturellement par la gratuité de plus de 90% de nos concerts, ou le très faible prix des autres. Ensuite, mettre en place des politiques efficaces afin que les institutions musicales jouent un rôle davantage citoyen et pédagogique, c’est évidemment ce que je m’attacherai à développer dans les années qui viennent, c’est à mon sens une priorité urgente, même si cela relève plutôt des institutions actives sur toute l’année que d’un Festival comme le notre, très ramassé dans le temps, et qui est avant tout et par définition, festif.

Comment s’est porté le choix des trois grandes thématiques : musique et pouvoir Séquence Violon et Méditerranée ?
Ces thématiques sont davantage des pistes de réflexion que des problématiques réellement explorées à fond. À peu près toute l’histoire de la musique, tous genres confondus, est liée au pouvoir, que ce soit celui des Princes, des Églises, ou du marché. Quant à la Méditerranée, c’est un des thèmes « naturels » du Festival vu notre position géographique et vu l’importance de « Notre Mer » dans la musique classique, au sens le plus large, depuis plusieurs millénaires.

Quels sont les artistes à découvrir absolument cette année et les événements à ne manquer sous aucun prétexte ?
Difficile de faire un choix, c’est comme de demander à un parent de choisir entre ses enfants !Je vais cependant retenir les deux concerts autour de Pauline Viardot, qui sont des concerts de 18h, gratuits, à la Salle Pasteur au Corum, des concerts que seul notre Festival est capable de concevoir et de produire.Ces deux soirs qui j’espère seront magiques, nous évoquerons une des personnalités les plus fascinantes de toute l’histoire de la musique, Pauline Viardot. À la fois plus grande chanteuse de son époque, people, érudite, compositrice, intellectuelle, c’est un être hybride entre Maria Callas, Élisabeth Badinter et Paris Hilton ! Musset, Berlioz, Tourgueniev etc. tout le monde est à ses pieds. Elle n’était pas belle, elle était pire ! dira Saint Saens. Pour Clara Schumann, Pauline est « la femme la plus géniale qu’il m’ait été donné de connaître ». Nous avons constitué pour lui rendre hommage, à elle et à sa famille, un casting « All star » de jeunes musiciens français, avec les deux superbes chanteuses Sabine Devieilhe et Marianne Crebassa.

Si vous deviez présenter en seulement quelques mots le festival à un profane, que lui diriez-vous pour aiguiser sa curiosité ?
Ce que vous pouvez entendre chez nous, c’est ici et nul par ailleurs !

Votre pugnacité à la pédagogie pour la musique classique tout au long de votre carrière et ce auprès du plus grand nombre n’a-t-elle pas trouvé sa raison d’être au travers de ce Festival ?
Ce n’est pas à moi de le dire ! Mais c’est vrai qu’étant compositeur, travaillant à Radio France, originaire de Montpellier, je me sens particulièrement bien dans cette belle institution du Festival, qui n’est pas seulement un diffuseur, mais un concepteur de concerts ; et des concerts qui ont la grande ambition, ce qui me plaît beaucoup en effet, de plaire aux spécialistes comme au plus grand nombre.

Vous aviez déclaré chez l’un de nos confrères l’année dernière ( Chicxulub, 2012) :  » Je crois que si on amène les gens avec bienveillance, ils sont réceptifs « . Qu’en est-il aujourd’hui ? De plus, comment percevez-vous l’attrait de la musique classique par un public large dans les années à venir? Y a-t-il à votre avis des politiques publiques de familiarisation à mener dans ce sens ?
Il y a, à mon sens, plusieurs éléments de réponse. Oui je pense qu’il faut « défendre » la musique classique, car nous l’avons inventé, et nous y sommes très fort ! Nous sommes beaucoup plus fort en musique classique qu’en musique pop au sens large ! En forçant le trait, je dirais qu’en pop, on passe son temps à imiter les Anglo-saxons alors qu’en classique c’est nous que le mon entier imite ! Pour amener le grand public vers la musique classique, c’est beaucoup plus simple qu’on ne le croit, car c’est une culture qui fait déjà partie de l’inconscient collectif, c’est notre culture à tous. De plus, et je martèlerai toujours cette idée, je ne comprends pas pourquoi la musique classique est sans cesse ramenée à quelque chose de vieillot, ringard ou conservateur, alors qu’elle est tout le contraire ! Le langage de la musique classique est caractérisé avant tout par le fait qu’il évolue constamment, c’est une musique en révolution perpétuelle ! Ce qui explique pourquoi parfois elle a du mal a être comprise par ses contemporains. Au contraire de la pop ou de la variété justement qui ont d’autres qualités bien sûr, mais qui utilisent un langage plus conventionnel, plus conservateur, bien plus figé. Et je dis cela sans porter de jugement de valeur, car il y a des artistes pop que j’adore ! Pour sensibiliser le grand public et notamment le jeune public, à la musique classique au sens le plus large, j’ai la conviction que les grandes institutions musicales vont devoir se réformer profondément afin d’inscrire ces préoccupations d’éducations et de transmissions au premier rang de leur priorité et au centre de leur activité. Cela n’est absolument pas incompatible avec la poursuite de l’excellence musicale d’un projet artistique.

On notera qu’une grande majorité des concerts et événements proposés par le Festival de Radio France cette année seront gratuits. Avec la conjoncture économique et la baisse des budgets alloués à la culture, ce combat devient-il de plus en plus difficile ou est-ce que cette prérogative est-elle centrale pour le Festival et ne prête pas au débat ?
Il me semble en effet qu’offrir l’excellence musicale au plus grand nombre relève bien de la haute mission de service public qui est confiée à Radio France. En ce sens, la gratuité des concerts me semble aller de soi : elle permet aux familles, au public non initié ou moins favorisé économiquement d’avoir accès à des concerts de très haut niveau, qui s’adressent à la fois aux plus grands nombres et aux mélomanes les plus « pointus ».

Pour finir, si vous deviez donner une différence notable et essentielle du Festival de Radio France sur les autres festivals du genre, laquelle choisiriez-vous ?
Il n’y a pas un Festival au monde (hormis les BBC Prom’s en Angleterre) qui bénéficie autant de la force de frappe d’un groupe de communication comme celui de Radio France, qui diffuse nos concerts en direct et en différé souvent dans toute l’Europe (par le biais de L’UER), et par son site, un des plus visités qui soit, dans le monde entier. Ainsi, le Festival fait rayonner plus que tout autre, Montpellier et sa région dans le monde entier. Et cela n’a pas de prix.

> Festival Radio France Montpellier Languedoc-Roussillon – 11 au 25 juillet 2013

Pour en savoir plus sur le Festival :

> Le site officiel du Festival Radio France de Montpellier et Languedoc-Roussillon
cliquez ici
> Le site officiel de Pierre Charvet
> Le site officiel de Pierre CharvetCliquez ici
> Réservation sur le site officiel du Festival Radio France de Montpellier

( crédit photo Christophe Abramovitz)

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