Diana Stetson : l’engagement et la passion d’un peintre

par
Partagez l'article !

Par Candice Nicolas – bscnews.fr/ Le festival de Sundance est mondialement réputé pour son cinéma, mais on y croise des artistes en tous genres. Le BSC News a eu la chance de rencontrer la peintre américaine Diana Stetson lors du vernissage de sa récente exposition dans l’Utah.

Partagez l'article !

Diana, d’où êtes-vous originaire ?
Diana Stetson : Je suis née à New York, et j’ai grandi dans la Vallée de l’Hudson où les bois, les champs et le fleuve m’ont tout appris. Passer des heures chaque jour au beau milieu de la nature a été extrêmement formateur. Je voyage beaucoup, mais je suis installée dans le désert du Nouveau Mexique. La spiritualité mystérieuse du paysage et du ciel m’ont convaincue de vivre là, et m’ont inspirée depuis des décennies.

Venez-vous d’une famille de peintres ? D’artistes ?
Plusieurs artistes de ma famille m’ont inspirée quand j’étais très jeune. Mon oncle, Roger Prince, était sculpteur, sa femme, la sœur de mon père était une formidable artiste peintre de l’école Waldorf. Leurs œuvres étaient éparpillées partout dans la maison, et une des peintures murales de ma tante a été particulièrement révélatrice pour moi. Elle était au milieu de notre salle à manger, je l’ai étudiée minutieusement chaque jour, son imagerie, ses figures expressionnistes. Je me souviens d’avoir été particulièrement intriguée par sa manière de traiter les ombres et lumières. Mon père était médecin et chercheur, mais ses grandes passions étaient le piano, le violon, la sculpture sur bois. Son génie créatif passait simplement de la science à l’art, et j’ai beaucoup appris de la relation entre les deux grâce à lui. Mais la plus grande relation à l’art que ma famille a c’est certainement nos liens avec la France. J’ai une cousine écrivaine qui est mariée au photographe François Le Diascorn. J’ai voyagé avec eux en France et en Grèce pendant des années. Ensemble, nous avons travaillé sur des projets du Ministère de la Culture, « Les Animaux Magiques » et « Les Bêtes de la Mer ». François m’a enseigné beaucoup de choses quant au sérieux de la vie d’artiste. J’ai appris tellement en le regardant en action à la recherche de l’image magique, ses appareils photos autour du cou. Son engagement féroce et intransigeant dans son art a été pour moi une inspiration continue et m’a suivie tout au long du développement de mon art.

Quand avez-vous compris que peindre était ce que vous vouliez vraiment faire ?
Je me suis mise sérieusement à travailler en tant qu’artiste après avoir obtenu mon diplôme en 1985. De 1985 à 1990, j’ai surtout travaillé sur la graphie des lettres et le collage – sur papier.

Quels types de matériaux utilisez-vous principalement ? Est-ce que votre travail a directement évolué du papier à l’huile sur acrylique ? Quels supports favorisez-vous ?
En 1990, je suis tombé amoureuse de la gravure à l’eau forte pour faire des estampes. Pendant vingt ans, j’ai fait de la gravure, et je me suis spécialisée dans les dessins, peintures, collages transférés sur papier. En 2010, j’ai fait un changement colossal et ai commencé à peindre à l’acrylique et à l’huile sur des panneaux de bouleau. Changer de support est un tout nouvel engagement pour le peintre. Ces dernières années, j’ai pris conscience de la concentration et de la discipline dont j’aurai besoin pour atteindre mes objectifs. Je passe mes journées dans mon studio. À ce moment de ma carrière, j’ai atteint un âge et un seuil en tant qu’artiste, où j’ai beaucoup à dire. Pour l’instant, je suis extrêmement engagée dans mon travail, d’une nouvelle manière qui me ravie.

Où peignez-vous habituellement ? Dans votre studio ? Où vous pouvez ?
Mon studio est situé derrière ma propriété, au nord d’Albuquerque au Nouveau Mexique, près du Rio Grande et en face de la chaîne de Sangre de Cristo, la pointe sud des Rocheuses. C’est un endroit sacré où je peins en silence, ou dans un chaos de rock n’ roll (rires).

Pourriez-vous nous donner les grandes raisons qui font que vous peignez ?
Je peins pour me souvenir, pour partager de l’amour, du réconfort, mais aussi pour honorer la puissance de l’art et sa beauté. Je suis fortement engagée dans l’exploration de la beauté ; c’est une des leçons les plus puissantes que m’ait enseignée l’étude de la Nature. Il n’y a aucune fin à sa profondeur ni à sa force. La poétesse américaine Mary Oliver a écrit : « Dis-moi, qu’entends-tu faire de ton unique, sauvage et précieuse vie ? » Moi, je sais ce que je vais faire. J’ai commencé un voyage d’un sérieux extrême, et pour autant, joyeux à la fois, c’est un voyage formidable, le voyage sans fin du peintre.

On remarque une grande influence asiatique dans vos peintures, des restes de vos études au Japon et en Chine dans les années 80 ? Pourquoi êtes-vous partie là-bas ?
Après avoir obtenu mon diplôme à Reed College, j’ai obtenu une bourse pour réaliser un projet créatif, sans contraintes. Je suis partie pour étudier la calligraphie, au Japon et en Chine ; j’étais intriguée par l’aspect spirituel de la tradition artistique de ces cultures. Le célèbre calligraphe Wuciu Wong m’a recommandée à Jat See Yiu, qu’il considérait comme le plus talentueux calligraphe chinois de Hong Kong. J’ai ainsi pu rejoindre l’ile de Cheung Chau et devenir l’étudiante privilégiée de Mr. Jat. Nous ne pouvions pas communiquer par les mots mais notre relation professeur-élève était très forte et j’ai travaillé avec une très grande détermination pendant des mois sous son œil expert. Mr. Jat m’a donné mon nom d’artiste, « Red Elegance » et offert le couteau que j’utilise pour signer mon travail. Par la suite, j’ai rencontré un professeur au Japon, avec lequel j’ai aussi énormément travaillé au fil des ans. De ces deux maîtres, j’ai appris le travail de composition, la coordination œil/main, le respect des matières et l’engagement dans le travail.

Parlez-nous de cette source d’inspiration et de votre travail de composition.
J’ai fait plusieurs voyages en Asie et à chaque fois, je suis étonnée de voir comment les gens ressentent la relation des formes et de l’espace. Comment une pierre est disposée dans un jardin, où un vase est posé à côté d’une peinture, comment la brosse du pinceau s’appuie sur le papier. La sensibilité asiatique à l’espace négatif trouve un écho chez moi. En tant que peintre américaine, j’ai presque toujours inconsciemment incorporé cet espace négatif dans les images que je peins, gardant toujours un œil sur ce qui n’est pas, plutôt que sur ce qui est.

Comment choisissez-vous de faire une grande ou une petite peinture ?
Je suis de plus en plus intéressée par les grosses toiles à présent. Le format 1m20x1m20 me convient parce qu’il est pratique à manipuler dans le studio – tout ce qui est plus grand devient vite encombrant. La manière dont je peins requiert beaucoup de ponçage et de nettoyage, et les panneaux doivent être déplacés d’un bout à l’autre du studio assez fréquemment. Mais travailler sur des surfaces plus petites me semble pratiquement dévalorisant de nos jours ! J’ai passé vingt-cinq ans à faire des images plus petites, je veux passer les vingt-cinq prochaines à travailler « grand ». Une fois mes questions de logistique réglées, je travaillerais même sur encore plus grand ! Je suis grande, j’ai de la puissance, et cela me paraît normal d’utiliser tout mon corps quand je peins. J’aime cette sensation de pouvoir presque rentrer dans ma peinture.

Vous avez tout d’abord l’idée de la taille de votre peinture ou son sujet ?
La plupart de ce que j’ai envie de peindre fonctionne sur grand format. Si je travaille sur un format plus petit – pour des raisons multiples et variées – je considère généralement ce travail comme étant l’étude de quelque chose à venir, de plus grand.

Quelles ont été vos impressions après l’exposition à Park City ?
Avoir mon vernissage à la CODA Gallery pendant le festival de films de Sundance a été plus qu’un honneur pour moi, j’en ai profité du début à la fin ! La directrice de la galerie, Jen Schumacher, a fait un travail considérable, mon travail a été exposé merveilleusement. Nous avons vendu plusieurs peintures et avons reçu de très bons commentaires. J’espère que c’est le début d’une longue collaboration, qui bénéficiera à la CODA et aux collectionneurs de mes tableaux ! J’ai d’ailleurs fait un petit livre d’images que vous pouvez retrouver ici : http://www.blurb.com/bookstore/detail/3935837.

Quels sont vos prochains projets artistiques ?
En ce moment, j’explore les possibilités qui m’amèneraient à avoir un impact sur l’environnement en tant que peintre. Je pense que les artistes ont une position unique de conteurs visuels, pour créer des ponts de compréhension, et pour faciliter les changements de manière positive et éclairée. Les images sur lesquelles je travaille pour l’instant, sont celles d’animaux, et surtout d’oiseaux. Avec mon équipe, on se remue les méninges pour parvenir à la meilleure façon d’utiliser mes talents et de faire une vraie différence. C’est passionnant pour moi, et j’espère vraiment avoir quelque chose de concret à exposer l’année prochaine. En attendant, je peins !

Est-ce que l’on vous voit bientôt à Paris ?
Oui, je compte rendre visite à ma famille à Montmartre très prochainement, et à Jonchères aussi, dans la Drôme.

On se retrouve à Sausalito en automne en tous cas ?
J’espère vous y voir Candice ! J’adore ce festival, j’y ai déjà exposé et c’est vraiment un des festivals les plus accueillants que je connaisse. On pourrait faire du tourisme et visiter les musées près de San Francisco, et assister aux banquets et concerts de la cérémonie d’ouverture. J’ai hâte !

[Le ‘Sausalito Art Festival’ se tiendra du 31 août au 2 septembre 2013 , dans la région de San Francisco]

Vous pouvez suivre les actualités de l’artiste sur son site web : www.dianastetson.co

A découvrir aussi:

Le Louvre inaugure le « parcours Pistoletto »

Paris : Le Titanic au Parc des expositions…ou presque!

Des cimaises et des hommes

CAPC Bordeaux : Installation de Markus Schinwald

Opéra : Paul et Gaëtan Brizzi à la galerie Daniel Maghen

Laissez votre commentaire

Il vous reste

0 article à lire

M'abonner à