Le mauvais temps : « C’est bon, les autres, c’est chaud, c’est nécessaire. »

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Par Mélina Hoffmann – bscnews.fr / « Sans doute, la vie n’est-elle pas faite pour les adolescents. (…) ils l’inventent pour la rendre semblable à eux mais l’illusion est brève. Lorsqu’ils s’aperçoivent que cette vie rêvée est en rupture de stock pour la plupart des dons qu’ils réclament d’elle, ils chavirent dans la mélancolie. Il n’est ni facile ni plaisant de changer de peau, d’autant moins que la mue des hommes s’accomplit à contresens, du papillon à la chenille, et que la perspective de perdre ses ailes et d’apprendre à ramper n’est pas exaltante. Alors on refuse, on se cogne contre les barreaux de la cage. »


C’est l’histoire de Monsieur Robert, cinquantenaire, veuf, mûr et lucide.

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C’est aussi l’histoire de Bob, adolescent inexpérimenté, bohème, empli des craintes, rêves et illusions de la jeunesse. C’est finalement l’histoire d’un homme à l’intérieur duquel Robert et Bob se rencontrent, se découvrent, se heurtent l’un à l’autre, tentent de cohabiter jusqu’au jour où la femme qu’il aime lui propose de la rejoindre à Amsterdam. En proie à ses impulsions d’adolescent, Monsieur Robert prend la fuite et se réfugie dans sa Bretagne natale pour prendre la mer sur son bateau. Surpris par le mauvais temps, il devra alors résister à une tempête qui se révèlera plus intérieure qu’extérieure…Cette histoire est celle d’un homme, mais c’est surtout le récit d’une naissance, celle qui survient au terme d’un long et souvent douloureux cheminement vers soi-même, vers sa propre paix intérieure, vers l’âge adulte. Un cheminement nécessaire pour apprendre à vivre avec soi, avec les autres aussi. Parce que « C’est bon, les autres, c’est chaud, c’est nécessaire. » A travers les traits du roman, Paul Guimard décrit le parcours initiatique que chacun de nous pourrait – devrait sans doute – accomplir pour réconcilier en lui l’adolescent et l’adulte qui s’empêchent d’exister pleinement l’un l’autre. Il s’agit de laisser s’éveiller cet Autre que nous cherchons sans cesse ailleurs alors qu’il sommeille en nous, tout comme le beau temps et le mauvais nous habitent avant d’être des conditions extérieures ; d’oser laisser derrière soi l’enfant rempli d’illusions et d’attentes irréalistes pour accepter enfin la vie telle qu’elle est ; de jouir pleinement des instants de bonheur avec la conscience de leur valeur et de leur impermanence qui les rend tellement précieux. « Il faudrait parvenir à cette sagesse élémentaire de considérer les ténèbres où nous allons sans plus d’angoisse que les ténèbres d’où nous venons. Ainsi, la vie prend son vrai sens : un moment de lumière. » C’est une lutte intérieure, un combat contre cette partie de soi qui nous limite, nous fait fuir quand nous gagnerions à rester, nous taire quand quelques mots pourraient tout changer, s’abstenir quand cela vaudrait la peine d’oser. Une « bourrasque intime » qui fait chavirer l’être tout entier pour le forcer à nager plutôt que de se laisser dériver par le courant sur les flots d’une vie dont il ne serait sinon que le spectateur. Un roman métaphorique plein de tendresse, de douceur et d’amertume, riche d’enseignements et de sagesse.

➤ Le mauvais temps – Guimard – Editions Folio

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