Closed Curtain : Un film réalisé dans le plus grand secret et primé
Par Candice Nicolas – bscnews.fr / Deux âmes en fuite se retrouvent dans une maison isolée au bord de la mer Caspienne. Les rideaux sont tirés, les fenêtres sont recouvertes de noir. À l’intérieur, un homme (Kamboziya Partovi) s’enferme pour écrire un scenario, avec un chien qu’il n’a pas le droit de posséder selon les lois islamiques. Tout à coup, une jeune femme (Maryam Moghadam) et son frère s’introduisent dans la solitude de l’écrivain ; il repart très vite, mais la fille refuse de s’en aller.
Elle appartient à un parti renégat et doit se cacher des autorités, et ce en s’acharnant à nuire à la tranquillité de son hôte. Ils se barricadent tous les deux derrière les rideaux de cette villa improbable et le spectateur de se poser des milliers de questions. Est-ce un rêve ou la réalité ? Qui est vraiment cette jeune femme ? Et lui, pourquoi s’est-il donc rasé la tête ? On entend les cris de la police et le bruit des vagues, on voit les étoiles, mais ces rideaux aussi. Qui sont donc ces personnages et que représentent-ils ?
Jafar Panahi a été condamné à ne plus tourner, voyager à l’étranger, donner des interviews pendant vingt ans. C’est donc dans le plus grand secret que s’est déroulée la réalisation de « Closed Curtain ». Les deux acteurs se sont vus confisquer leur passeport par les autorités iraniennes. Malgré les difficultés extrêmes rencontrées, Jafar Panahi a reçu l’Ours d’argent du meilleur scénario pour ce film qu’il a coréalisé avec Kamboziya Partovi, l’acteur principal.
Jafar Panahi : « J’ai écrit le scenario alors que j’étais en pleine dépression, ceci m’a conduit à explorer un monde irrationnel, loin de toutes les conventions logiques. Toutefois, j’étais complètement guéri pendant le tournage et j’ai eu du mal à rester fidèle à l’état mélancolique qui m’avait permis d’écrire. La mélancolie hante mon histoire, où les personnages se reflètent l’un l’autre et où la frontière entre fiction et réalité est assez floue. ‘Closed Curtain’ recourt au changement de genres et à la mise en abime d’histoires. Quand filmer est nécessaire à la vie d’un réalisateur, il est impératif de montrer la réalité du monde dans lequel nous vivons ».
Kambozyia Partovi : « Des temps difficiles ! Il n’est plus suffisant de passer à la loupe notre travail. Ils nous examinent, nous, pour nous empêcher de produire quoique ce soit. Notre inactivité les réconforte. Mais cela n’est pas une raison suffisante pour nous d’arrêter de travailler. Au contraire, cela nous motive à travailler encore plus fort, et à n’importe quelle condition ! Quand mon ami réalisateur a vu sa vie détruite par une interdiction de travailler pendant vingt ans, j’ai décidé de faire un film en secret, avec un minimum de moyens. J’ai décidé de l’aider, parce que je crois que, en ces temps difficiles, quelqu’un doit être à ses côtés ».
« Closed Curtain » / « Pardé »
(R : Jafar Panahi et Kamboziya Partovi – Iran)
Section : Compétition = Ours d’argent du meilleur scénario pour Jafar Panahi
Sortie française : prochainement
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