Interview de Marion Aubert/ Propos recueillis par Julie Cadilhac – bscnews.fr/ Marion Aubert est une jeune maman ( et deux fois!). Aussi est-on heureux qu’elle ait eu le temps de venir bavarder un peu avec nous! Marion Aubert est une comédienne pétillante. Marion Aubert écrit des pièces aussi ludiques que sensées, pour les grands et pour les petits. Et l’on répète son nom afin que vous le reteniez! Car Marion Aubert est une femme qui compte, une artiste qui fait du bien parce qu’elle n’hésite pas à répéter tout haut et bien fort ce que tout le monde pense tout bas…
S’ouvre une saison « Aubertienne »: trois de vos pièces programmées dans différents théâtres de Montpellier…une consécration? un besoin d’entendre une voix de femme? une nouvelle politique inter-théâtres qui souhaite mettre en valeur les talents de sa région?
Je ne sais ! Voilà plus de quinze ans maintenant que je vis et travaille à Montpellier. La saga des habitants du val de Moldavie a été crée en 2003 par Philippe Delaigue à Valence. Elle n’avait encore jamais été jouée à Montpellier. Le voyage en pays aubertois n’est pas du tout une pièce, ni même un spectacle, mais une soirée que nous avons imaginée pour inaugurer mon compagnonnage avec le Théâtre Jacques Cœur de Lattes. Quant à Conseils pour une jeune épouse, c’est un texte que j’ai écrit sur mesure pour Patty Hannock et Fanny Rudelle. Un texte au service de leur propre projet. Je ne vis donc pas forcément ma présence dans ces trois théâtres comme une consécration (ni comme une invasion !) Ceci dit, je suis ravie d’être invitée dans ces trois théâtres de ma région.
Qui sont les metteurs en scène de ces trois pièces? Pouvez-vous nous les présenter en quelques mots? Marion Guerrero met en scène la Saga. Elle a aussi dirigé la lecture de Voyage en pays Aubertois. Je codirige la compagnie (www.tirepaslanappe.com) avec Marion depuis près de quinze ans. Elle est sans doute la metteuse en scène la plus rompue à mon écriture. Philippe Fretun va mettre en scène les Conseils pour une jeune épouse. Philippe Fretun est un grand acteur (il a même une fiche star sur internet). Je l’ai vu jouer il y a fort longtemps, en mon adolescence. Cette année, il va jouer dans la Saga. J’ai rencontré Philippe grâce à Patty (elle est très liée à Philippe). En fait, Patty est à l’origine des Conseils, Fanny est très liée à Philippe qui est très lié à Patty qui m’est très liée. C’est comme ça que nous nous sommes finalement tous liés les uns aux autres.
Voyage en pays Aubertois est une sorte de melting-pot de vos autres pièces? d’où est née l’idée de ce Voyage? Oui. En fait, nous avons décidé d’inventer une sorte de mise en bouche pour les spectateurs du Théâtre Jacques Cœur. Je suis associée pour deux saisons au théâtre. Pour diverses raisons (financières, politiques…) nous ne pouvions jouer la Saga aux Treize Vents et à Lattes la même saison. Nous avons donc imaginé cette petite forme. Un parcours dans plusieurs textes (dont certains inédits), qui, je l’espère, donnera aux spectateurs le goût de suivre les spectacles de la Compagnie, mais aussi, du coup, de découvrir mes textes mis en scènes par d’autres dans d’autres théâtres (il y aura aussi un petit texte pour enfants : Dans le ventre du loup, une histoire dansée des trois petits cochons, dans une chorégraphie de Marion Lévy au Théâtre Jacques Cœur de Lattes et à la Grande Ourse de Villeneuve-lès-Maguelone).
Quels personnages, quelles scènes, vos spectateurs fidèles auront-ils le plaisir de retrouver? Nous avons justement choisi des scènes qui n’ont jamais été entendues ici (ah ! le plaisir de la surprise !) : des extraits du Brame des Biches (pièce écrite pour le Théâtre du peuple), des Vives (commande de l’école Charles Dullin) ou encore des Orphelines (commande du CDR de Vire). Et puis quelques chansons écrites spécialement pour Marion.
« Munie d’une guirlande d’ail et de boules de genièvre », vous êtes partie enquêter sur les drôles d’habitants de Moldavie…vous en avez ramené une pièce, Saga des habitants de Moldavie où vont évoluer des acteurs-fantômes…? Oui. A l’origine de cette pièce (et de cette expédition), une commande : celle de la Comédie de Valence en 2003. Quatre metteurs en scènes hommes (Philippe Delaigue, Christophe Perton, Richard Brunel et Olivier Werner) ont passé commande à quatre auteurs femmes (Marie Ndiaye, Pauline Sales, Annie Zadek et moi) autour du thème des fantômes, pour la troupe de la Comédie de Valence. Philippe Delaigue m’a, quant à lui, demandé d’écrire spécifiquement une pièce matériau (avec des fragments de textes).
Il y est question d’une mise en abyme du théâtre?
Oui. J’ai imaginé une troupe d’acteurs, les acteurs de la Comédie de Limoges, revenus hanter le théâtre.
Conseils pour une jeune épouse répondait à une demande de deux comédiennes, c’est bien ça?
Oui. Patty et Fanny avaient déjà réuni tout un matériau : extraits du Kamasutra, extraits de l’encyclopédie des femmes des années 1950, de magazines féminins, de vidéos sur les crimes d’honneur…) Elles m’ont demandé d’écrire un texte pour donner une colonne vertébral à leur projet. Ainsi sont nés ces Conseils.
C’est une pièce entièrement construite sur l’antiphrase?
Je ne me l’étais pas formulé ainsi ! Il y a, dans les magazines féminins, le Kamasutra ou ces textes des années 50, des conseils tout à fait incongrus parfois, d’autres fois possiblement nocifs. J’ai essayé, par l’accumulation, de rendre compte de cette incongruité et de cette nocivité.
Lorsqu’on dit de Marion Aubert qu’elle est féministe, est-elle flattée, agacée ou indifférente?
Ni flattée, ni agacée. Je dis oui. C’est vrai. Pas vous ? Vous êtes contre le vote des femmes, vous ? Contre l’égalité salariale ?
Pensez-vous que la femme, aujourd’hui, n’a pas vu beaucoup son statut changer depuis des décennies et que les machos sévissent toujours en masse mais d’une façon plus déguisée et plus mesquine?
Oui. Sans doute le statut des femmes a-t-il peu changé ces dernières années. Je n’aime guère parler de machisme, mais plutôt de réflexes comportementaux (effectivement insidieux) qui cantonnent les hommes et les femmes à des places bien trop déterminées.
Défendre la cause des femmes, est-ce un combat inutile, caduque dans notre société soi-disant égalitaire?
Ce combat n’est pas forcément épuisant, il est aussi joyeux, vivifiant. Il permet de ne pas s’endormir, d’observer sans cesse nos comportements (après, on peut écrire des bonnes pièces de théâtre). Je ne le vis pas comme un combat dont je vais sortir exsangue. Donc, oui, défendre la cause des femmes me semble un combat sinon utile, du moins toujours pertinent.
LES REPRESENTATIONS/
Voyage en pays Aubertois:
3/12/11 à Lattes (34), Théâtre Jacques Coeur
Conseils pour une jeune épouse: 3/4/5/6 avril 2012 à Montpellier, Théâtre Jean Vilar
Saga des habitants de Moldavie: 3/4/5/6 avril 2012 à Montpellier, Théâtre des 13 Vents
Dans le ventre du loup (une histoire dansée des trois petits cochons) : 30/31 mars 2012 à La grande Ourse de Villeneuve-lès-Maguelone ( 34) 1er avril 2012 à Lattes (34), Théâtre Jacques Cœur. Crédits-photo: Portrait: Antonin Clair Photo de répétition: Jeanne Roualet