Le buveur d’Encre: une belle aventure éditoriale

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Gaëlle Callac est éditrice et auteur jeunesse. Marie Desbons est illustratrice pour la même maison d’éditions nommée Le buveur d’encre/ Elles ont collaboré à la réalisation de plusieurs projets communs qu’elles nous présentent ici et qui sont à découvrir assurément…/ Propos recueillis par Julie Cadilhac- PUTSCH.MEDIA/
Gaëlle Callac:
Vous êtes tout d’abord l’éditrice de la maison du Buveur d’Encre: comment est-elle née et avec quels objectifs de ligne éditoriale ?
Le buveur d’encre a été crée en 2001 par des auteurs et des illustrateurs “jeunesse” que j’ai rejoints en 2005. Notre désir est de réaliser des livres séduisants qui ont du sens. Nous privilégions des histoires poétiques avec parfois une approche pédagogique ou tout du moins instructive. D’un point de vue formel, nous souhaitons créer un objet cohérent avec une adéquation entre le fond et la forme. Ainsi, nous accordons beaucoup de soins aux illustrations. Il faut que d’un point de vue sémantique, elles apportent une autre lecture au texte, qu’elles l’enrichissent. Nous ne négligeons rien : typographie, choix du papier et du format, impression. Nous veillons à ce que l’objet soit un bel objet fini. Chaque livre est une nouvelle aventure toujours passionnante.
Vous êtes aussi l’auteur de Céleste: La petite fille aux allumettes était-il un conte que vous lisiez souvent enfant?
CélesteJe me souviens l’avoir lu très souvent car j’avais un livre de contes d’Andersen que j’adorais.
Avez-vous choisi de faire de ce conte terriblement triste d’Andersen une histoire plus lumineuse, plus positive?

Contrairement au conte d’Andersen qui atteste de la cruauté humaine, il n’en est rien de “Céleste, une étoile dans la nuit” qui est un livre sur la réussite, le désir de postérité, sur la réalisation des rêves, ceux qui sommeillent en chacun de nous. C’est un livre très optimiste car Céleste réalise doublement son rêve : en plus de réchauffer un mendiant (ici la fillette), elle va briller pour l’éternité en devenant l’héroïne de livres (celui-là et par extension ceux de “La petite fille aux allumettes”). Il y a donc plusieurs manières de réaliser ses rêves..
Céleste est donc la troisième allumette qu’allume la petite fille aux allumettes: la plus lumineuse de toute, celle qui précède sa mort aussi?
Cette 3ème allumette lui offre un instant de bonheur, grâce à un beau sapin de Noël qu’elle peut admirer un instant. C’est pour cela que j’ai souhaité immortaliser cet instant, une belle image source de joie qui précède la fin.
La fin de Céleste insère une mise en abyme de l’album….pour que l’enfant lui-même ait l’impression d’être partie intégrante de cette histoire?
Les personnages romanesques s’incarnent grâce à la lecture. Le lecteur fait vivre Céleste encore et encore à chaque fois qu’il renouvelle sa lecture. L’enfant se sent acteur de l’histoire comme il peut aussi s’identifier à Céleste car la vie d’une allumette, de par sa fragilité et l’instantanéité de sa flamme, n’est pas éloignée de celle de l’homme.
MargueriteLorsqu’on découvre votre premier album, Marguerite, on imagine que vous tissez vos histoires à partir d’un thème que vous déclinez à plaisir…les fleurs, la lumière…est-ce qu’on se trompe?
Vous avez tout à fait raison. J’aime bien aborder un thème comme le narcissisme pour Marguerite, la réussite pour Céleste et ensuite tenter de trouver des univers différents pour chaque histoire : la nature, la boîte d’allumettes. Jouer avec les mots est un véritable plaisir. J’espère toujours que le lecteur s’amusera à son tour… Ainsi Marguerite a peur qu’on ne l’effeuille et Céleste s’enflamme, souffre…
Dans ces deux albums l’objectif était d’adopter un point de vue original (celui d’une allumette ou d’une marguerite) ?

Je n’y ai pas vraiment songé quand je les ai écrits. Le narcissisme, la beauté, l’amour m’inspiraient. J’ai songé à l’effeuillage de la marguerite (je t’aime, un peu, beaucoup, …) et bientôt “Marguerite” est devenue l’héroïne de l’histoire. Je voulais transmettre que si on est trop auto-centré, on finit par mal le vivre et que l’on risque de passer à côté de l’essentiel, ici l’amour. Ensuite, je voulais écrire une histoire sur la réussite, la gloire qui peuvent prendre forme sous divers aspects (actions humanitaires, vedettariat, etc). Et la vie de l’allumette est semblable, comme je l’ai dit plus haut, à celle des hommes, donc voilà l’histoire de Céleste qui ,comme son prénom l’indique, a de hautes ambitions.
Avez-vous réfléchi ensemble avec Marie Desbons à ce que vous attendiez des illustrations ou vous a t-elle présenté des planches qui vous ont enthousiasmé immédiatement?
Marie a présenté des croquis qui collaient immédiatement au texte, texte par ailleurs, difficile à illustrer selon moi car assez abstrait. Elle a ensuite travaillé seule dans la gamme colorée de son choix. Il n’y a eu aucune retouche de notre part si ce n’est la blondeur de la fillette qu’elle avait imaginée brune et qui est blonde d’après le texte d’Andersen.
Un nouvel album en projet? D’autres albums déjà en librairie?
Déjà sortis au “Buveur d’encre”, deux autres albums pédagogiques : “Artogenos”, une bande dessinée sur l’archéologie et “Cerise et ses amis, au rythme des saisons”, un album sur l’importance d’allier le mouvement et une alimentation équilibrée pour rester en bonne santé. J’ai par ailleurs co-écrit avec le cinéaste et ethnologue Jacques Willemont : “Lascaux, un nouveau regard”, un film sur les grottes de Lascaux (Nouveau monde éditions).
Pour le nouvel album, “Salammbô et Aimé, un air de liberté”, illustré par Carole Gourrat sortira à l’automne au “Buveur d’encre”. C’est un livre sur la possessivité et donc la liberté avec en toile de fond la musique. Dans un magnifique palais, sur une île tropicale, Salammbô et Aimé, son rossignol adoré, vivent pour leur passion de la musique. Par crainte qu’Aimé ne s’égare ou qu’il ne se fasse dévorer, Salammbô le protège dans une belle cage dorée. Mais bientôt, Aimé est las de sa captivité… J’ai écrit cette histoire pour Carole Gourrat qui voulait travailler sur un texte autour de la musique avec une jeune princesse comme héroïne. Les illustrations qui sont en cours de réalisation sont magnifiques, tout en finesse. J’ai encore d’autres textes finalisés qui sont en attente d’illustration et d’autres qui sont en cours d’écriture. Voilà pour mes albums personnels.

Marie DesbonsMarie Desbons:

Quand vous étiez petite fille, vous aimiez déjà dessiner des visages ronds et toutes vos feuilles étaient inondées de couleurs?

Du plus loin que je me souvienne j’ai toujours aimé peindre et dessiner. Je ne me souviens plus si mes personnages étaient ronds mais une chose est sûre, la couleur a toujours eu une part prépondérante dans mes dessins. J’aime associer les couleurs entre elles, créer des ambiances colorées différentes à chaque fois.
Pour Marguerite, vous avez choisi de travailler avec des superpositions ( motifs, fleurs etc…) pour montrer le côté luxuriant de la nature?
Oui, je voulais que mes pages fourmillent de détails, comme si le lecteur était un personnage minuscule qui se promenait parmi la végétation et les insectes. Je voulais faire avant tout un album riche et coloré.
margueriteQuelles techniques picturales utilisez-vous? sur quel support créez-vous vos illustrations?
Je ne travaille pas à chaque fois de la même façon. De manière générale, je réalise un premier travail à la main avec de l’encre, des crayons de couleurs et des collages. Cela me permet de donner de la « matière » à mes illustrations. Je scanne ensuite mes dessins et fais des retouches sur Photoshop. Parfois il est plus simple pour moi d’ajouter les fonds, les motifs, les petits détails sur ordinateur. Lorsque j’ai plus de temps je réalise entièrement mes illustrations à la main en utilisant des beaux papiers artisanaux que j’adore collectionner.
Avez-vous papillonné dans les champs au printemps pour créer tous ces personnages floraux? Quelles sont vos sources d’inspiration?
Tout est source d’inspiration pour moi. Une ballade, un film, un spectacle,une photo, toute forme de création… J’aime aussi feuilleter les magazines de mode et de déco, ils m’inspirent beaucoup pour les ambiances colorées notamment.
Cherchez-vous systématiquement à trouver dans vos dessins un prolongement magique à ce qui est raconté avec les mots? La boîte d’allumettes par exemple de laquelle sortent des guirlandes multicolores semble montrer cette volonté…

En effet j’aime bien que mes illustrations racontent un peu plus que le texte, qu’elles le complètent de manière poétique. Dans céleste, le texte assez court et « ouvert » m’a laissé une grande liberté et libre cours à mon imagination pour créer les illustrations.
Qu’est-ce qui vous a séduit dans l’histoire de Céleste?Céleste - plancheCe qui m’a plu, c’est l’originalité et le message positif du texte. Au départ, j’ai un peu appréhendé d’illustrer tout un album ayant pour personnage principal une allumette. Et puis assez vite les premières images sont arrivées dans ma tête car le texte est assez imagé. J’ai aussi trouvé une astuce pour rendre ces allumettes humaines et mignonnes, en les habillant d’une petite capuche rouge.
D’autres projets d’illustration?
J’ai commencé à travailler sur un nouvel album depuis un mois, d’après un texte de Jean-Marie Robillard. Il sortira – si tout va bien- fin 2011, toujours aux éditions Le buveur d’encre. L’histoire se passe à Bali… je n’en dis pas plus… Rendez-vous au salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil en décembre pour le découvrir !

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