Fabrice Backes: l’art du portrait

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Interview de Fabrice Backes par Julie CadilhacPUTSCH.MEDIA/ illustrations de Fabrice Backes.

Bonjour Fabrice, vous semblez affectionner l’art du portrait? Est-ce du à des influences particulières? Franchement je ne sais pas trop. Je fais du portrait depuis longtemps. J’ai fait pas mal de choses différentes, de la déco, des fresques, de la peinture abstraite, expressionniste, du paysage, de la peinture en lettres ! Mais c’est vrai que le portrait j’aime plutôt ça. Ma première influence ce sont les gens je crois. Les visages et ce que ça peut dire, tout ça. Ce qu’il y a derrière cette image. L’expressivité. Maintenant, ce que je préfère, c’est de créer moi même mes personnages; ça m’inspire davantage.
Sur quels supports travaillez-vous? Avec quels outils ? ( crayon & fusain ,huile sur toile, acrylique , pastel?)…vos travaux semblent en effet cultiver l’éclectisme…est-ce une nécessité artistique, pour vous, de changer de matériaux régulièrement? Je suis mes envies. Un jour j’aurais envie de travailler à la gouache, un autre à l’huile, au fusain, à l’acrylique, aux pastels… Ou même coloriser sur ordinateur aussi. Je ne sais pas, je projette mes images, je les imagine. Parfois je les vois lisses et brillantes, sur un support en bois, et d’autres fois c’est plus organique, plus mat, c’est bien aussi de travailler avec des outils différents. Je ne sais pas, c’est comme ça. J’essaie des trucs et je découvre des choses. Est ce que c’est une nécessité ça je ne peux pas dire, c’est juste des envies. Et tant qu’on ne me les interdit pas…
Diriez-vous que c’est le sujet qui guide le trait de Fabrice Backes? Que vous évitez les réflexes et les redites picturales? C’est vrai j’évite les redites ou les réflexes picturaux, mais j’adopte des choses en même temps. Je récolte… Mais j’essaie toujours de faire mieux ou différemment de ce que j’ai déjà fait, ça me semble normal. Quant au sujet qui guide mon trait, je dirais non. Je ne pense pas. Je lie plutôt ça à mes envies du moment. Mais peut être que j’aborde différemment un projet d’affiche punk rock qu’une illustration jeunesse. Je ne sais pas, je n’ai pas vraiment de réponse à ça.
Vous avez travaillé sur le texte des enfants monstrueux de Ludovic Huart: quels souvenirs de cette collaboration? Ludovic Huart voulait une ambiance très noire qui colle à son texte. Noire, blanche et rouge. J’ai trouvé l’expérience intéressante et j’ai eu envie de travailler d’une manière plus expressive qu’à mon habitude. Quelque chose de plus organique. J’ai travaillé au fusain, à l’encre, à la gouache, à la craie. Tout ce qui pouvait faire de beaux noirs en fait. Ça a été une expérience enrichissante.
Vous avez aussi confectionné une série de 10 illustrations pour son spectacle de théâtre « J’ai trouvé une pelle pour enterrer ma poupée » :ces dessins constituaient-ils des parties du décor? Elles étaient destinées à une exposition pour présenter le spectacle.
Vous travaillez pour les éditions La marelle, confectionnez des premières de couverture pour des romans jeunesse ( ex: les dents du bonheur)…diriez-vous que Fabrice Backesvous êtes polyvalent? Je crois. On me demande des choses qui sont parfois très différentes les unes des autres. « Les dents du bonheur » écrit par Dorothée Piatek est un roman réaliste sur des problèmes d’identification d’un garçon. Les éditions La Marelle suivent une ligne éditoriale plus graphique et délirante. C’est vrai que j’aime assez ce mélange et je peux m’adapter à différents sujets, passer d’un univers à l’autre. C’est un peu mon boulot, aussi. On me demande d’illustrer une histoire, une phrase… je réfléchis.J’essaie de mettre en image et puis voilà.
Vous pratiquez aussi la peinture sur photo? Comment se pratique cet art? J’ai travaillé sur deux séries pour des magazines, (Style Magazine et Hekmag) en collaboration avec la photographe Henrike Stahl. On avait ensemble des idées d’illustration, et j’ai participé aux prises de vue pour les poses des modèles. Ensuite les illustrations ont été réalisées soit directement sur la photo à la peinture, ou faites en peinture à part et rajoutées numériquement.
Revenons à vos superbes toiles : que voit Suzy pour serrer si fort cette peluche étrange? Ça, il faudrait lui demander! C’est un portrait que j’ai réalisé pour Coralie Datt, une photographe qui s’est créé un personnage du nom de Suzy. J’ai fait ce portrait d’après une de ses photos.
Avez-vous une fascination pour les animaux de compagnie? Un bestiaire étonnant peuple vos toiles et dans Exode, notamment, la personnification de l’animal produit une impression fascinante… Pas spécialement de compagnie, les animaux en général en fait. Quand j’étais petit je lisais des tas de bouquins sur les animaux. Ceux qui m’ont marqué le plus ce sont les livres de Christian Zuber, dont personne ou très peu de monde ne se souvient. Il présentait « Caméra au poing » aussi à la télé. Il dénonçait les massacres, ça m’a révolté à l’époque. Et puis je me perchais dans les arbres pour regarder les oiseaux à la jumelle et je les dessinais. Je n’ai aucune trace de ces dessins d’ailleurs, c’est dommage. Bref, le fait de mettre des animaux dans mes peintures, c’est venu tout naturellement. Et puis c’est venu aussi combler, renforcer une certaine solitude de mes personnages. Dans Exode, à vrai dire je ne sais pas si j’ai vraiment voulu représenter un animal. J’y vois plutôt une créature qui se fait rejeter. Un peu comme dans Frankenstein quand il est chassé et poursuivi par la population. Alors qu’on sait qu’il peut avoir des sentiments et tout ça, c’est très triste. La comparaison me vient comme ça… C’est une histoire de rejet. Alors après ça peut prendre d’autres dimensions, l’exode… Mais dans ma peinture il y a cette femme qui tient cet être par la main. Je vois quelque chose de très maternel dans son attitude. Un lien. Et moi je me dis qu’il est bien protégé. J’aime bien me dire ça. Après ça n’est que mon interprétation.
Hommard - Fabrice BackesEnfin, quels projets en cours? Des albums jeunesse en préparation? une exposition? Oui je viens de terminer un nouvel album de coloriage et la couverture d’un carnet de voyage pour les éditions La Marelle qui sortira en septembre. Là j’ai des commandes de peinture à terminer. Ensuite une affiche pour un festival de cinéma jeune public. Puis un nouveau livre que je prépare avec les éditions des Ronds dans l’O. Une expo en septembre pour l’inauguration d’une médiathèque dans les Ardennes, avec des projets perso à présenter là bas. Puis une autre expo à Paris à la galerie L’art de Rien avec Ludovic Huart, du 10 novembre au 5 décembre 2010. Voilà.
Pour retrouver Fabrice Backes: www.backsit.com

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