(Vidéo) Un maire d’un petit village de la Meuse retire le drapeau européen de sa mairie en soutien aux agriculteurs
Le geste est simple, mais lourd de sens. À Evres, petit village de la Meuse, le maire Clément Fevez a publié une courte vidéo sur son compte Facebook dans laquelle il enlève le drapeau européen du fronton de la mairie. Une décision assumée, présentée comme provisoire, tant que des mesures concrètes ne seront pas prises en faveur des agriculteurs. Dans un contexte de colère agricole persistante, l’initiative a rapidement dépassé le cadre communal pour devenir un symbole politique.
Dans sa vidéo, le maire explique agir par solidarité avec un monde agricole qu’il juge abandonné par les décideurs nationaux et européens. Pas de mise en scène spectaculaire, pas d’appel à la désobéissance, mais un message clair : tant que les agriculteurs resteront étranglés par les normes, les charges et une concurrence jugée déloyale, les symboles de l’Union européenne n’ont plus, selon lui, leur place sur le fronton de la mairie.
Clément Fevez n’en est pas à sa première prise de parole symbolique. En 2024 déjà, il avait fait parler de lui en faisant installer une grande banderole le long de la ligne TGV qui traverse la commune. On pouvait y lire : « Evres, vous êtes au centre du monde ! ». Une formule volontairement décalée, qui avait interpellé voyageurs et médias.
À l’époque, le maire avait expliqué la démarche sans détour : « On a fait cette banderole pour montrer qu’on est bien ici dans les petits villages ». Derrière le slogan, une volonté assumée de rappeler l’existence de territoires ruraux souvent traversés sans jamais être regardés, ni écoutés. Une manière de dire que la France ne se résume pas aux métropoles ni aux grands axes économiques, mais qu’elle vit aussi dans ses campagnes.
Le retrait du drapeau européen s’inscrit dans cette continuité. Pour Clément Fevez, il s’agit d’un acte de pression politique. Il entend dénoncer ce qu’il considère comme une déconnexion profonde entre les politiques européennes et la réalité vécue par les agriculteurs.
Dans la nuit du mercredi 10 au jeudi 11 mai 2023, les députés ont adopté une proposition de loi rendant obligatoire le pavoisement des drapeaux français et européens sur les mairies de plus de 1 500 habitants. Un texte voté à l’Assemblée nationale, présenté comme une affirmation symbolique de l’appartenance européenne de la France. Evres, commune de moins de 1 500 habitants, n’est pas concernée par cette obligation. Le retrait du drapeau européen ne constitue donc aucune infraction mais le geste est fort. Et la viralité de la vidéo en atteste.
Le cœur du message porté par le maire est ailleurs. Il traduit un malaise démocratique et économique profond, particulièrement vif dans les territoires ruraux. À Evres comme dans de nombreux villages, l’agriculture reste un pilier de la vie locale, et la crise actuelle est vécue comme une injustice supplémentaire infligée par des centres de décision lointains.
En choisissant le terrain du symbole, Clément Fevez cherche à rendre visible une colère souvent ignorée. Comme avec la banderole installée le long de la ligne TGV, il utilise l’espace public pour rappeler que les campagnes existent, qu’elles travaillent, et qu’elles souffrent. Reste à savoir si ce type d’initiative sera entendu au-delà du buzz médiatique, ou s’il ne fera que souligner un peu plus la fracture entre la France des villages et les institutions qui prétendent la gouverner.