Jean-Michel Salmon: « Le succès remarquable de cette pétition au Royaume-Uni illustre une colère qui transcende les clivages »

Dans une interview passionnante, Jean-Michel Salmon, docteur en sciences économiques et auteur du livre « Le Grand Abécédaire du Brexit », décrypte le succès fulgurant d’une pétition anti-Starmer ayant rassemblé près de 3 millions de signatures. Entre mécontentements multiples, fractures électorales et dynamiques politiques complexes, il met en lumière les défis d’un gouvernement travailliste en quête de légitimité, pris entre promesses non tenues et tensions héritées du Brexit.

Comment expliquez-vous le succès fulgurant de cette pétition, qui a rassemblé des millions de signatures en si peu de temps ?
Le nombre de signatures avoisine les 3 millions.  C’est assez amusant – et remarquable – pour une pétition dont il se dit qu’elle a pour première origine celle d’un citoyen du Shropshire, un comté rural des West Midlands en Angleterre, qui aurait googlelisé « Comment changer le Premier Ministre » et aurait obtenu comme réponse « lancer une pétition ». Légende ? Réalité ?
Au-delà de la facilité d’y souscrire et de la partager – c’est une pétition comme tant d’autres organisée en ligne sur le site de la Chambre des Communes (l’Assemblée britannique) – son succès renvoie à une certaine coagulation de nombreux mécontentements qui s’expriment sur de nombreux sujets et qui émanent d’individus dont les positionnements électoraux peuvent se révéler être aux antipodes les uns des autres.
Il y a d’abord les déçus du Travaillisme à la sauce Starmer. La ligne de ce dernier est centriste, voire de centre-droite, comme le fut la Troisième voie de Tony Blair en son temps (1997-2007). Nous y revenons en réponse à la question suivante.

« C’est assez amusant – et remarquable – pour une pétition dont il se dit qu’elle a pour première origine celle d’un citoyen du Shropshire, un comté rural des West Midlands en Angleterre, qui aurait googlelisé « Comment changer le Premier Ministre » et aurait obtenu comme réponse « lancer une pétition » »

Il y a ensuite toutes les oppositions traditionnelles aux Travaillistes, en particulier bien sûr les électeurs Tories (Parti Conservateur) et ceux du Reform UK (le parti de droite radicale relancé par Nigel Farage). Si les premiers ont du mal à digérer leur défaite de juillet dernier dans la mesure où si le scrutin fut relativement serré en nombre de votes, la victoire travailliste fut écrasante en nombre de sièges, …