De grandes organisations nationales ont appelé entre les deux tours de l’élection présidentielle à faire barrage à Marine Le Pen et ont donc laissé entendre qu’il fallait que les syndiqués apportent leur suffrage à Emmanuel Macron. Comment avez-vous compris cet appel en tant que syndicaliste, Rémy Chabbouh ?
SUD SDIS National a toujours affiché sa neutralité politique. C’est ainsi que nous avons interpellé l’ensemble des candidats plusieurs semaines avant le premier tour. Aucun d’entre eux n’a souhaité nous rencontrer. La réalité c’est que c’est toujours mieux de s’afficher aux côtés des Sapeurs pompiers lors des cérémonies : c’est bon pour les élections ! Les agents, des fonctionnaires territoriaux, que nous représentons n’ont pas à être « guidés » dans leurs choix politiques.
De plus, plusieurs centrales syndicales ont été silencieuses lorsque des milliers de soignants non-vaccinés ont été suspendus en septembre 2021. Quelle a été la position de votre syndicat à ce sujet ?
SUD SDIS National est le SEUL syndicat a avoir porté une procédure auprès de la CEDH. Non pas pour dénoncer l’obligation vaccinale, mais pour avoir un avis de cette juridiction Européenne sur les mesures prises à l’encontre des personnels refusant de se faire vacciner. A ce jour, la procédure n’a pas encore abouti. Nous sommes également à l’initiative de la modification de la loi du 5 août 2021 qui prévoyait tout de même le licenciement des non vaccinés ! Tous les syndicats (sauf CFDT) ont adhéré à la motion.
Quelles actions avez-vous engagé ?
Nous avons organisé le dépôt de plus de 400 recours auprès de la CEDH. Nous avons été déboutés en septembre 2021 sur notre procédure en référé (article 39 de la CEDH qui ne traite que de l’urgence ou non de la requête).
Nous accompagnons de A à Z juridiquement des collègues pompiers, mais aussi des soignants dans cette démarche. Nous fondons beaucoup d’espoir sur la réussite de cette procédure.
Comment voyez-vous l’avenir du syndicalisme après les Gilets jaunes, la réforme des retraites et la crise Covid19 où certains grands syndicats ont été particulièrement timides ajouté à une société qui s’appauvrit de plus en plus et dans laquelle les travailleurs sont de plus en plus précarisés ?
La branche sapeurs pompiers est relativement bien syndiquée. Bien sûr, nous souhaiterions plus. Les agents doivent comprendre que la force du nombre procure du résultat. Depuis les GJ, nous ressentons un désamour des salariés vis-à vis des syndicats et ils ont sans doute raison. La verticalité historique mise en place dans quasiment tous les OS crée la déconnection avec les réalités du terrain.
La solution passe forcément par 2 étapes, une réappropriation des syndicats par les salariés et une « horizontalisation » de la chose syndicale. De plus, en ce qui concerne le dossier des retraites, est il imaginable qu’un pompier de 60 ans se retrouve en haut de la grande échelle de 32 mètres à 62 ans ?
Sur un autre sujet, on assiste encore à des agressions contre des pompiers dans les quartiers dits sensibles, encore très récemment. Comment la situation a-t-elle évolue depuis notre dernier entretien à ce sujet ?
La situation évolue très peu, en tout cas, pas de la manière qui nous convient. Les chiffres ont baissé certes mais il faut prendre en compte le confinement et le couvre feu. Aucun texte n’est encore paru pour la mise œuvre, même de façon expérimentale, des caméras embarquées. Toujours rien à propos de l’anonymisation des dépôts de plaintes.
Les solutions existent mais il faut du courage pour les mettre en application : par exemple des tribunaux dédiés aux agressions des personnels soignants, enseignants et sapeur pompier. La justice doit passer vite et fort pour les agresseurs de ces corporations.
Y-a-t-il un risque d’explosion sociale chez les pompiers au regard d’une situation de plus en plus difficile ?
Nous ferons le point sur les dossiers en cours avec le ou la future ministre de l’Intérieur. Mais certains dossiers sont effectivement plus sensibles, voir plus explosifs que d’autres.Les revendications ne sont pas forcément d’ordre financier. Actuellement ce qui manque cruellement c’est des effectifs de pompiers dans les casernes et surtout dans les camions rouges (versus les pompiers dans les bureaux en hausse constante). Affaire(s) à suivre donc…