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Gérard de Cortanze : « Le propre de la jeunesse est de brûler ce qu’elle a adoré »

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Partagez l'article ! Auteur de plus de 90 livres dont une saga familiale, « Les Vice-rois», prix Renaudot en 2002, Gérard de Cortanze est aussi éditeur. Après le succès des « Zazous », il raconte les sixties et la génération yéyé, à travers les aventures de François, le rocker, Antoine, fils d’ouvrier, Lorenzo, l’intellectuel, fou […]

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Auteur de plus de 90 livres dont une saga familiale, « Les Vice-rois», prix Renaudot en 2002, Gérard de Cortanze est aussi éditeur. Après le succès des « Zazous », il raconte les sixties et la génération yéyé, à travers les aventures de François, le rocker, Antoine, fils d’ouvrier, Lorenzo, l’intellectuel, fou de cinéma et champion du 800 m et Michèle dont ils sont tous trois amoureux.

Ces baby-boomers vont révolutionner leur temps grâce à leur goût du bonheur, de la fête, leurs audaces et leurs chanteurs parmi lesquels, Richard Anthony, Johnny Hallyday, Danyel Gérard, Dick Rivers ou Eddy Mitchell. Après la mort de Johnny Hallyday, ce roman éclaire les débuts du chanteur, les origines de sa passion pour le rock et son jeu de scène à la Elvis Presley. Formidablement documenté, on trouve dans «Laisse tomber les filles », tous les événements, les livres, la presse, les films et les disques qui ont marqué les yéyés. Un roman qui devrait être adapté au cinéma, enlevé, tendre, drôle, passionnant où l’on s’attache aux personnages, à leur blues, à leur fureur de vivre, leurs premièrs amours, leur quête de liberté, leur amitié et leurs passions. On écoute avec ces quatre amis, « Elle est terrible » de Johnny, on lit « Salut les copains», on va au concert de la Nation, à Saint-Tropez, on tremble quand Kennedy est assassiné, on drague accoudé au juke-box sur les Stones, on s’amuse des débuts de leur révolution sexuelle, on se souvient de nos années au lycée, on danse sur « Les demoiselles de Rochefort» et on finit par lancer des cocktails molotov. Gérard de Cortanze a l’art du portrait (mention spéciale pour la belle et éblouissante Michèle), du suspense, des chroniques d’une époque et surtout, celui de pimenter d’humour son roman épatant, comme dirait Jean d’Ormesson. Un régal de lecture !

L’idée de ce roman vous est-elle venue en écrivant « Zazous » ?
Oui, « Laisse tomber les filles » en constitue en quelque sorte le prolongement naturel. Le phénomène zazou annonçait le phénomène yéyé. Les zazous, comme les yéyés, sont des adolescentes et des adolescents qui se réunissent autour de mêmes « valeurs ». Ils ont le même âge, portent les mêmes vêtements, écoutent les mêmes musiques, dansent au son des mêmes rythmes. Les filles et les garçons zazous et yéyés trouvent dans ce collectif leur identité – à vingt ans de distance…

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire ce livre sur la génération yéyé ?
Depuis « Les enfants s’ennuient le dimanche », titre d’une chanson de Charles Trenet mais aussi de mon premier roman, je poursuis la rédaction d’un cycle qui contient une quinzaine de livres. Son objectif : raconter mon histoire de France ; celle d’un fils d’émigrés italiens hanté par une question : quelle place peut prendre un destin particulier dans l’histoire de son temps ? Il me manquait cette période des années 60, que d’aucuns nomment sixties. Il fallait que je plonge dans cette nostalgie et que j’essaie d’en donner ma définition.

Comment expliquer l’origine des yéyés, de leur musique, de leur style, de leurs engagements, de leur quête de liberté ?
Ces baby-boomers sont les enfants non seulement des zazous mais de celles et ceux qui ne l’étaient pas. Les enfants d’une génération qui a connu la guerre. Quand les chanteurs de cette nouvelle génération commencent à enregistrer leur disque la société est en pleine mutation. Génération du bonheur.Dès 1959, Richard Anthony chante « Nouvelle vague ». Johnny Hallyday, Danyel Gérard, Dick Rivers, Eddy Mitchell et les Chaussettes noires, d’autres encore lui emboîtent le pas et puisent leur inspiration dans des chansons venues des Etats-Unis ne se contentant la plupart du temps que de mettre des paroles françaises sur des chansons américaines. Teenage idole de Rick Nelson devient L’idole des jeunes chez Johnny Hallyday. Quelques fois, on ne conserve que la musique car les paroles disent totalement autre chose que la chanson originale : « The house of the rising sun » des Animals devient le Pénitencier – le bordel est devenu une prison ! Quant au mot même de « yéyé », on le doit à Edgar Morin qui l’invite lorsque dans un article du journal le Monde, il commente la nuit du 22 juin 1963. Il écrit : « une des significations du yéyé est : nous sommes jeunes. »

Comment qualifieriez-vous cette époque ?
Les yéyés naissent au cœur des Trente Glorieuses. Dans cette France-là – 50 ans nous en séparent – le chômage n’existe pas, l’individualisme forcené né de 1968 n’a pas encore droit de cité, la guerre d’Algérie vient de prendre fin, l’héroïsme n’est plus une valeur forte… Sous la grande ombre du général de Gaulle, l’homme du 18 juin revenu depuis 1958 aux affaires, c’est toute une jeunesse désireuse de consommer – elle en a les moyens –, de poursuivre des études supérieures – il n’y a jamais eu autant d’étudiants et d’étudiantes – qui prend son envol. La France n’a jamais été aussi jeune, autant tournée vers le futur. Cette jeunesse qui a dix ans en 1958 et vingt en 1968 peut revendiquer cette insouciance qui faisait tant défaut aux générations précédentes. Les années 60, c’est le temps des copains, de l’âge tendre et des têtes de bois. C’est aussi l’histoire d’un temps qui transforme le conflit des générations en « problème de société ».

Les films culte des yéyés ?
Il n’y a pas de films yéyé. Si les producteurs ont vite compris qu’ils pouvaient faire tourner des chanteuses et des chanteurs yéyé dans des films, ils ne leur proposent pas pour autant des scénarios intéressants. On peut ainsi voir Johnny Hallyday et Eddie Mitchell dans « Les Parisiennes », Sylvie Vartan dans « Un Clair de lune à Maubeuge », Françoise Hardy faire une apparition dans « Château en Suède », Sheila dans « Bang Bang ». Tous authentiques navets. Je me souviens d’une séance mémorable à l’Alhambra de Saint-Ouen du film « D’où viens-tu Johnny ». Tourné en 1963, on y voit un certain Johnny Rivière retourner sur les lieux de son enfance. Johnny Hallyday se prend pour Elvis Presley et chante plusieurs chansons entre deux chevauchées dans les marais camarguais. La plus célèbre d’entre-elles dit en substance : « Pour moi la vie va commencer – En revenant dans ce pays – Là où le soleil et le vent – Là où mes amis mes parents – Avaient gardé mon cœur d’enfant – […] – Foulant le sol de la prairie – Chevauchant avec mes amis – Pour moi la vie va commencer… » Quant au reste, il faut simplement puiser dans la liste extraordinaire des films français des années 60, dont certains excellents mais qui n’ont rien de proprement yéyé.

Leurs disques ?
Question à laquelle il est impossible de répondre. Chacun à son disque préféré, sa liste de 45 tours. Car il ne faut pas oublier que cette révolution musicale est rendue possible par la disparition des vieux 78 tours et dans une certaine mesure des 33 tours. Les formats yéyés sont le 45 tours et le disque 25 cm. Sans oublier l’apparition des postes à transistors, qui vont remplacer les lourds boîtiers de la « TSF ». L’essor des « transistors » est phénoménal : 260.000 en 1958, 2 215 000, trois ans plus tard ! Prenons six noms rien que pour l’année 1960 : Danyel Gérard chante « Tu es ma destinée » ; Johnny Hallyday, « Souvenirs, souvenirs » ; Richard Anthony, « Le p’tit clown de ton cœur » ; Les Play Boys, « Samedi soir » ; Danny Boy et « les Pénitents », « Croque la pomme » ; Les Cousins, « Kili-Watch »…

Johnny Hallyday a commencé avec les yéyés. A l’heure où il vient de mourir, comment expliquez-vous qu’il ait fait une telle carrière ? L’aimez-vous ?
C’est très intéressant ce qui vient de se passer. Un écrivain, Jean d’Ormesson, et un chanteur, Johnny Hallyday, meurent pratiquement le même jour. Cela rappelle étrangement la mort conjointe de Cocteau et d’Edith Piaf. Tous quatre sont à leur manière un morceau de nous-mêmes. Ils sont notre histoire commune, ils nous ont constitués – qu’on les apprécie ou non, ce n’est pas le problème – ils nous ont accompagnés tout au long de notre vie. Je n’ai jamais acheté un seul disque de Johnny Hallyday. Mes parents me l’interdisaient… Je vais vous faire une confidence iconoclaste : je préférais Brel, Brassens, Barbara. Mais il est bien évident que la nostalgie s’installant, cette mort ne peut pas ne pas nous toucher : c’est un morceau de nous-même qui disparaît avec Johnny, comme c’est une certaine image de la France qui s’efface avec la disparition de Jean d’Ormesson.

« Pour moi, écrire c’est travailler plus avec la mémoire qu’avec le souvenir »

En quoi ce mouvement a-t-il été à l’origine de Mai 68 ?

Le propre de la jeunesse est de brûler ce qu’elle a adoré. Après avoir vécu la consommation, la génération des baby-boomers a décidé de la rejeter. Aidée en cela par l’arrivée du protest song, du phénomène hippie, la politique a repris une place qu’elle avait délaissée. Pour faire vite, nous pourrions dire que « Les élucubrations » d’Antoine ont remplacé les paroles désuètes des chansons yéyés qui en réalité n’ont tenu le haut du pavé que quelques années…

Votre regard sur Mai 68 ? Poétique, salutaire, excessif, de la manipulation ?
Tout cela à la fois. Mon expérience de 68 est particulière. J’habitais en banlieue. A Paris, les fils de bourgeois brûlaient les voitures. Lorsque je revenais chez moi, je croisais dans les rues des ouvriers dont le rêve était justement d’acheter une de ces voitures qui partaient en fumée sur les barricades…

Que nous a apporté la génération yéyé ?
Si je voulais être synthétique, je dirais que les yéyés ont donné des couleurs à une France qui jusqu’alors vivait en noir et blanc.

Votre roman est magnifiquement documenté, truffé de détails, quelles ont été vos sources?
Un ami écrivain m’a dit un jour : tu as inventé un genre littéraire, « le roman sociologique ». C’est un bon sujet de réflexion ! J’écris toujours très vite, dans l’urgence. Mais ce travail, dans le souffle, est toujours précédé effectivement de longues et minutieuses recherches. J’adore les archives, les sources. Je deviens une sorte d’enquêteur qui ne s’arrête jamais avant d’avoir trouvé le renseignement, la précision, le détail si minuscule soit-il qui lui manquait. Pour « Laisse tomber les filles » : livres, presse, films, disques et expériences personnelles très personnelles, c’est-à-dire déformées par la nécessité d’écrire. Une réalité recomposée, construite ; une mémoire échafaudée ; un roman en tous points « prémédité ». Pour moi écrire c’est travailler plus avec la mémoire qu’avec le souvenir.

Comment avez-vous crée vos quatre garçons, François, le rocker, Antoine, fils d’ouvrier, Lorenzo, l’intellectuel, fou de cinéma et champions du 800 m et Michèle dont ils sont amoureux ? Lequel de vos personnages préférez-vous ?
Tous. Chacun représente une pièce de ce puzzle rassemblé dans ces années sixties dont tout à la fois ils sont le produit et le reflet. Savez-vous qu’en 1968, 33,8% des Français ont moins de vingt ans et les seize/vingt-quatre ans représentent à eux seuls plus de huit millions d’individus. Mais j’ai un petit penchant pour la jeune fille, Michèle, lumineuse, vif argent, de tous les combats non pas au sens strict « féministes » mais livrés au nom des femmes.

Vous êtes-vous inspiré de personnes réelles, de vous-même ?
Comment faire autrement. Je suis persuadé qu’il est impossible d’écrire un roman sans que l’on se découvre – dans les deux sens du terme : écrire, c’est se mettre à nu et trouver des choses de soi qu’on ignorait. La vérité de ce qui est raconté n’étant rien d’autre que ce processus entre celui qui raconte et ce qu’il raconte. Si je devais, en une phrase définir mon projet, je dirais que j’ai voulu écrire le roman de la génération yéyé. Un récit « cinématographique » entre « Nous nous sommes tant aimés » d’Ettore Scola et « Nos meilleures année »s de Marco Tullio Giordana.

Comment avez-vous procédé pour mêler l’histoire, les précisions en tous genres sur l’époque et la constitution du roman ?
Dès lors que vous avez trouvé la couleur, le rythme de la narration ; dès lors que vous savez ce que vous voulez dire, comment vous voulez le dire, avec quoi vous voulez le dire, les éléments se mettent en place. Presque sans vous. J’utilise souvent l’image d’un aimant puissant qui attire ce que vous avez rassemblé et qui est encore épars. La force de la narration c’est l’aimant qui attire irrésistiblement ce que vous êtes allé recueillir au cours des mois qui ont précédé la narration, au cours de la vie qui nourrit toute œuvre et dans laquelle on peu indéfiniment puiser.

laissez tomber les fillesAvez-vous la nostalgie des ces années-là ?
Je regarde assez peu dans le rétroviseur. Mes parents italiens de France m’ont appris à me tourner plutôt vers ce qui est devant, après, à penser futur, à dire « avenir ». C’était chez eux une nécessité, pour ne pas sombrer dans le désespoir. Il s’agit davantage pour moi d’une hygiène de vie, d’une manière d’être. Si je devais éprouver de la nostalgie c’est pour tout ce qui me reste à accomplir et que je n’ai pas encore fait. Il me reste beaucoup de livres à écrire, vous savez ?

Vous êtes l’auteur de nombreux ouvrages et romans, desquels êtes-vous le plus fier?
J’ai en effet publié plus de quatre-vingt livres. Tous dans la nécessité absolue et le plaisir. Je n’ai jamais écrit un livre de commande. Je n’ai toujours écrit que ce que je voulais écrire au moment précis où je voulais l’écrire. Les livres s’enchaînant de façon harmonieuse et sans heurt. C’est une mécanique mystérieuse que cette alternance entre essai et roman. C’est une certitude que celle de ce livre qui me reste à écrire et qui réunirait ces deux « genres littéraires » puisque désormais les cloisons entre les uns et les autres sont poreuses. J’éprouve une tendresse coupable pour les quatre livres de ma saga familiale « Les Vice-rois ». Mais vous parlez de « fierté » n’est-ce pas ? Alors peut-être L’an prochain à Grenade. En fait, je les aime tous. Quelle outrecuidance ! Même celui que j’ai publié par jeu sous pseudonyme et que je republierai un jour sous mon nom. Mon ami Paul Auster l’a fait avec «Squeeze play », polar publié sous le nom de Paul Benjamin…

« Zazous » et « Laisse tomber les filles » font-ils partie d’un nouveau cycle avec une suite ?
Dans « Zazous », je voulais raconter cinq ans de la vie d’un groupe d’adolescents sans peur et sans reproche, qui n’acceptent pas que la guerre et le nazisme leur volent leur jeunesse et qui s’aperçoivent en cours de route que ce qu’ils prenaient pour une agitation superficielle (danser le swing, porter des vêtements voyants, lire des livres interdits, etc.) constitue un vrai acte de résistance. A la sortie de ce livre Valéry Giscard d’Estaing m’a confié : « Vous savez, les zazous, ils nous donnaient de l’espoir ». Dans « Laisse tomber les filles », je souhaite raconter la vie de quatre adolescents – sans peur et sans reproche – qui veulent changer leur vie, qui à leur manière changent le monde et qui soudain se trouvent confrontés à l’horreur. Pourquoi tout ce chemin pour en arriver là ? se demandent-ils alors. L’immense clameur « je suis Charlie, je suis Policier, je suis Juif » est vite retombée. « Laisse tomber les filles » cependant, comme je vous le disais, n’est pas un livre nostalgique. La lutte continue plus que jamais, indispensable. Voilà pourquoi il est ponctué de références musicales à ces années sixties où la volonté de bonheur était féroce, volonté qu’il est vitale de garder intacte.

En général, quels sont vos sujets de prédilection et vos sources d’inspiration?
Ma famille et mon époque. Jorge Semprun, mon ami, me disait : « Avec la famille que tu as, tu n’as qu’à puiser dans ton arbre généalogique pour trouver un sujet ». Parlant de ma famille et de son histoire, je parle donc inévitablement de l’Histoire et de l’époque dans laquelle elle s’inscrit. Je me souviens avoir étudié à la Sorbonne, l’année qui a suivi 1968, le roman historique. Impossible, à cette époque du moins, de ne pas se plonger dans les pages du livre de Georges Lukacs intitulé justement « Le roman historique». En marxiste convaincu, il nous explique qu’un homme, une œuvre, un genre littéraire ne surgissent jamais « ex nihilo», mais sont préparés, conditionnés par un certain contexte historico-sociologique. Voilà pourquoi, pour lui, le roman historique est doublement intéressant: prenant pour objet l’histoire, il est lui-même soumis à cette histoire et baigne en elle. Je ne suis pas marxiste mais adhère à cette vision que je peux intégrer dans mon rapport à l’écriture et au roman.

Quels sont les livres qui vous ont influencé ? Et quels sont ceux qui vous accompagnent aujourd’hui ?
Enfant, je lisais les « Nous deux » et autres « Bonne soirée » de ma grand-mère (« romans feuilletons » synonymes de dévergondage). En cachette, « Le Petit Parisien », car il m’était interdit de lire le journal. Enfin, la collection, dont c’est un euphémisme de dire qu’elle était éclectique, de livres de la collection Nelson. Petits formats, recueils cartonnés. J’ai lu Balzac, Rousseau, Flaubert, Marinetti, Tolstoï, Dostoïevski, et bien d’autres comme Gracia Deledda – écrivain sarde prix Nobel de littérature en 1926 ! Puis j’ai eu la grande chance d’avoir une marraine richissime qui n’avait pas d’enfant et ne sachant donc pas ce que c’était m’offrait à Noël, dès l’âge de 5 ans : Cervantes, Platon, Montesquieu, Shakespeare, Faulkner! Mes influences : essentiellement mes amis latino-américains et espagnols qui m’ont littéralement appris à écrire – Carlos Fuentes, Julio Cortazar, Mario Vargas llosa, Alvaro Mutis, Ernesto Sabato, Adolfo Bioy Casares, Severo Sarduy…
Les écrivains qui m’accompagnent aujourd’hui : Hemingway, Giono, Virginia Woolf, Flaubert…

Vous souvenez-vous de la première phrase que vous avez écrite et du moment où vous avez eu envie de devenir écrivain ? Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ?
Ma première phrase ? Non. Je suis devenu écrivain quand j’ai comprisque l’écriture me sauverait de la solitude et qu’elle allait me rendre durablement heureux. J’avais 14-15 ans… J’écris sans difficulté aucune, toujours dans la facilité, le bonheur. Je ne souffre jamais en écrivant. Si je devais pour écrire en passer par la douleur, je n’écrirai plus : je ne suis pas assez masochiste.

Quelle est et quelle devrait être la place de l’écrivain dans la société actuelle ?
J’ai bien peur qu’elle soit négligeable. On lui préfère aujourd’hui les philosophes, les penseurs, ceux qui expliquent et analysent le monde. Un écrivain, me semble-t-il, est trop dans la fabrication, le faire, les mains dans le cambouis de l’écriture. Et pourtant, comme le rappelait une publicité Banania diffusée dans les années 60 : « On peut vivre sans Banania mais tellement moins bien. » Nous pourrions transformer cette affirmation en : « On peut vivre sans écrivain (sans littérature) mais tellement moins bien….

Finalement, à quoi sert la littérature ?
Mais à tout ! Elle est la clef qui ouvre toutes les portes ; qui éduque et apaise, qui réveille et aiguillonne, qui pose les bonnes questions, qui « permet de respirer » assure Barthes.

Gérard de Cortanze
Laisse tomber les filles
Editions Albin Michel

(crédit Photo Witi De Tera/opale/Leemage /Albin Michel )

 

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