La Mission Orsenna : une vraie fausse bonne idée ?

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Par Nicolas Vidal – Promouvoir la lecture, telle est la mission que la Ministre de la Culture, Françoise Nyssen, a confié à l’écrivain et académicien Erik Orsenna. Le nouvel ambassadeur de la lecture aura la lourde charge de sillonner la France jusqu’à la fin de l’année pour rencontrer les acteurs de la promotion de la lecture ( bibliothécaires, associations, directions régionales des affaires culturelles…) afin d’écouter et de réfléchir à l’élargissement des heures d’ouverture des bibliothèques.

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S’ensuivra un débat en début d’année prochaine pour l’élaboration d’un plan “d’adaptation des horaires » au début de l’année prochaine.
Je suis effaré de voir se creuser la fracture entre la France qui lit et celle qui ne lit pas” déclarait Erik Orsenna à nos confrères du Parisien le 8 septembre dernier. Le diagnostic est pertinent mais le traitement envisagé paraît beaucoup moins efficace pour conduire cette France qui ne lit pas sur le chemin de la lecture. Cette croisade pour la lecture faisait partie du programme d’Emmanuel Macron comme l’un des fils rouge de sa politique culturelle, avec le pass culture. Néanmoins, la mission Orsenna semble manquer de clairvoyance car elle oublie un élément fondamental : la désaffection des Français pour la lecture en tant que loisir culturel et outil d’émancipation intellectuelle. Pour preuve, il suffit de se replonger dans le rapport d’Olivier Donnat, présenté en 2008 sous l’égide du Ministère de la Culture, “ les pratiques culturelles des français” qui mettait déjà en exergue ce manque cruel d’appétence pour la lecture et la littérature en général, au crédit d’une inclinaison toujours plus importante vers le divertissement et les écrans. Nous attendons à ce propos impatiemment une nouvelle édition de ce rapport.

D’ailleurs la consomation télévisuelle des Français a encore augmenté en 2017 atteignant près 4 heures par jour*. Il semblerait donc que le problème soit plus grave et plus profond dans ce rapport qu’entretiennent les français à la lecture et au livre comme source de plaisir et d’émancipation. Il est certain qu’un public restreint déjà familiarisé à la lecture trouvera du plaisir à bénéficier de ces créneaux élargis mais un fort doute existe sur un retour massif des Français dans les bibliothèques et au repositionnement central de la lecture dans leur quotidien.

A l’époque des Hanouna, Neymar et de la télé réalité, l’élargissement des heures d’ouverture des bibliothèques aura bien du mal à concurrencer le divertissement, les plaisirs hédonistes et les 4 heures de télévision quotidiennes si un projet de plus grande ampleur n’est pas mis en place pour sensibiliser la population dans son ensemble aux bienfaits de la lecture comme source d’émancipation personnelle et citoyenne. Conditionner une grande politique culturelle pour la lecture à des horaires d’ouverture de bibliothèques semble à ce jour une bien maigre réponse à un problème majeur qui frappe notre société dans son ensemble jusqu’à poser la question de son avenir démocratique.

Lire le BSC NEWS Magazine en ligne ici ( N°104 – Septembre 2017 )

(*source médiamétrie)

> Twitter Nicolas Vidal

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