Libertinage : Gastronomie et littérature, accélérateurs de plaisir
Par Marc Emile Baronheid – Chroniques et anecdotes d’un monde où les soupers fins menaient davantage aux plaisirs de l’alcôve qu’à la dictature du cholestérol. Serge Safran est enfant des Lumières … tamisées.
Auteur trop rare, parce que requis par une activité éditoriale qui lui permet de déployer une curiosité et un flair enviables, il a consacré au pas de deux entre érotisme et littérature une étude qui fait aujourd’hui figure de classique. Réédition attendue et obligée, elle impose son élégante érudition dans une collection où cohabitent par ailleurs fellation, pornographie, bondage, intersexuation. Sans doute leurs anges passent-ils lorsque les convives du banquet safranesque prennent le temps de badiner. Gastronomie et littérature eurent partie liée au XVIIIe siècle, par le truchement du roman libertin, considérable accélérateur de plaisir. Lecteur encyclopédique, Safran a écumé le sujet. Il le propose à la manière d’un chef étoilé, tout en nuance, raffinement, subtilité. Produits d’appel de toutes les gourmandises, le chocolat, les huîtres, le champagne ont inspiré la littérature. Brillat-Savarin assurait que le café met en mouvement le sang dont il fait jaillir les esprits moteurs. Pratiqué par Casanova, il renvoie étonnamment à une chanson de Pierre Dudan. Et si quelque friande marquise de ce théâtre priapique dépasse les bornes de la tempérance, il se trouve toujours plus d’un gentilhomme disposé à accompagner sa capiteuse démesure. Ici tout est faste et vertige, luxe, fureur et volupté.
« L’amour gourmand – libertinage gastronomique au XVIIIe siècle », Serge Safran, La Musardine, 16 euros
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