La Scribe : là où fiction et histoire se mêlent inextricablement
Par Régis Sully – bscnews.fr / Dans la postface, l’auteur affirme «qu’un roman historique est un roman avant d’être de l’histoire» . Celle-ci ne fournirait que le décor pour servir d’adjuvant au récit. Voire! Ce dernier à pour cadre deux villes de Franconie Wurtzbourg et Fulda aux confins du royaume carolingien en 799.
Chacune de ces villes possèdent un scriptorium, signe que ce sont des centres culturels importants dans cet espace occupé par les Francs. En outre Fulda est une ville épiscopale. Le décor planté, l’apport de l’histoire ne s’arrête pas là, elle fournit également des personnages. Le lecteur y croisera au détour d’une page Charlemagne qui a un rôle secondaire dans le roman contrairement à Alcuin qui en est un des héros. Historiquement Alcuin d’York a été un grand conseiller influent auprès de Charlemagne. Mais l’apport de l’histoire ne s’arrête pas là à la lecture de ce livre palpitant on ne pourra plus ignorer les différentes attributions des moines dans leur monastère: l’abbé, le prieur les doyens de l’ordre, le chantre, le sacristain le trésorier, le cellérier…on ne pourra plus ignorer non plus l’organisation interne de l’Eglise de Rome distincte des quatre patriarcats d’Orient. De même que le marché aux esclaves ou la piètre opinion des Francs à l’égard des Saxons n’échapperont pas à la sagacité des lecteurs.
Bref l’histoire est bien là et donne consistance au récit. Le lecteur ne s’en plaindra pas. Reste la fiction avec ses personnages et l’intrigue. l’héroïne Theresa, une réfugiée politique dirait-on aujourd’hui qui vient de Constantinople avec son père Gorgias a de curieux accents contemporains ainsi que son amant Izam de Padoue voir leur sollicitude vis à vis de leurs esclaves recrutés sur des critères de sélections aux antipodes de ce qui se faisait à l’époque. Voir également son comportement de femme atypique dans une société profondément misogyne. Reste qu’elle possède des qualités précieuses pour l’époque en pleine renaissance carolingienne elle sait lire, écrire et elle maîtrise le grec chose rare y compris parmi les élites carolingiennes. Grâce à ses compétences elle travaillera aux côtés d’Alcuin. En plus elle est en possession d’un précieux parchemin qui pourrait être décisif pour l’église de Rome. Qui veut s’en emparer? Qui tue pour le posséder. ? Alcuin avec l’aide de Theresa va tenter de démasquer ceux qui veulent lui dérober ce précieux document. Coups de théâtre, rebondissements tiennent en haleine le lecteur jusqu’au dénouement . Passionnant, à lire.
Antonio Garrido – La Scribe
Editions Le Livre de Poche – 12,95 euros
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