Frédéric Gourdon et la 7ème saison du festival Molière de Pézenas
Par Hugo Polizzi – bscnews.fr /Pézenas, ville d’adoption de Molière accueillera la 7ème édition du festival Molière, le théâtre dans tous ses éclats, du lundi 8 au dimanche 14 juin 2015, avec quelques représentations en amont de ces dates dans certaines communes voisines dès le 27 mai. La programmation ne s’oriente pas uniquement vers le théâtre, les temps forts sont pléthore : cinéma, vidéo-témoigagnes, lectures, ateliers publics, conférences, expositions d’art contemporain et de l’histoire théâtrale, visites guidées de la ville. Frédéric Gourdon, organisateur du festival, nous a exposé les lignes directrices de l’événement.
Comment le festival Molière a-t-il débuté ? Si l’on paraphrasait Molière, « le chemin [a-t-il été] long du projet à la chose » ? Quel en a été l’élément déclencheur ?
Le Festival Molière, le théâtre dans tous ses éclats a débuté en 2009. Il est né de la très forte imprégnation que Pézenas a toujours entretenu avec Molière. Ayant séjourné à Pézenas entre 1650 et 1656, Molière a toujours été présent. Ainsi, partant d’une phrase que Marcel Pagnol a dite en 1947 lors de la fermeture du théâtre de Pézenas pour des questions de sécurité, « Si Jean Baptiste Poquelin est né à Paris, Molière est né à Pézenas », la cité piscénoise sous l’impulsion de son Maire a souhaité célébrer ce grand homme de lettres. D’un week-end en 2009, le festival a duré en 2014 une quinzaine de jours. Cette année, pour des questions budgétaires notamment, le festival dure une semaine du 8 au 14 juin. Le festival se prépare tout le long de l’année et accueille tous les types de théâtre et d’auteurs, classiques et contemporains. Il ne s’arqueboute pas sur Molière mais prend appui sur lui pour offrir au public des écritures diverses et de grande qualité.
Pézenas n’est pas le seul « bastion » du festival puisque plusieurs autres communes et domaines de l’Hérault accueillent des représentations (Caux le 29 mai, Servian le 31 mai et le 7 juin, Nizas le 1er juin, Cazouls d’Hérault le 2 juin et Castelnau de Guers le 3 juin). Une volonté de décentraliser?
J’ai proposé cette décentralisation dès 2011, année de ma première direction. Il m’a toujours paru évident que des représentations qui s’inscrivent dans le Festival Molière se jouent dans les villages environnants, au même titre que Molière et sa troupe allaient jouer dans de nombreux endroits, souvent sur tréteaux et en plein air. Aller à la rencontre des gens chez eux, dans leurs villages, pour les inciter ensuite à venir à Pézenas découvrir d’autres pièces, d’autres auteurs, d’autres artistes… voilà le credo, tout simplement. Nous adressons un courrier à de nombreuses mairies autour de Pézenas au mois d’octobre de chaque année. Chaque village se positionne ensuite pour accueillir ou non un spectacle du festival. Cette année, tous les spectacles décentralisés ont lieu en amont du temps du Festival à Pézenas, à compter du 29 mai, et nous innovons avec un spectacle dans un domaine, Mas Belles Eaux, à Caux. Toutes ces représentations sont à chaque fois très bien accueillies, attirant chaque année un public de plus en plus nombreux. A l’heure des difficultés budgétaires et du recul de la culture, il importe de mutualiser les moyens et les compétences entre communes.
Parmi les auteurs entrés au répertoire de la Comédie Française, Molière est évidemment le plus joué d’entre tous. Comment le festival, selon vous, réussit-il à se démarquer des autres événements qui mettent en avant le nom et les oeuvres de Molière (notamment le Mois Molière de Versailles en juin, créé il y a 19 ans) ?
N’a-t-on pas dit que Pézenas était comme « le petit Versailles du Languedoc » ? Il ne s’agit pas de se démarquer absolument des autres festivals du même nom mais d’avoir des propositions complémentaires, différentes… Entre les représentations qui ont lieu au Théâtre de Pézenas et sur la place Gambetta sur tréteaux devant l’ancienne maison consulaire au coeur de la vielle ville, je peux sans crainte vous dire que cela est unique avec toute sa dimension patrimoniale…et moderne à la fois.
Comment se déroule habituellement la sélection des pièces qui seront représentées ? Sont-elles choisies en fonction d’un thème directeur et quels en sont les critères prédominants ? Vous tournez-vous majoritairement vers la comédie farcesque?
Il s’agit là de trouver une cohérence et une représentativité des différentes formes théâtrales. J’ai vu auparavant la plupart des pièces, exceptées certaines créations. Il y aura cette année une forme résolument contemporaine, Le monologue de la femme gelée par la Cie Tuchenn, adapté d’un roman d’Annie Ernaux ; une forme très drôle, presque farcesque, L’Illustre comédien tapissier par la Cie Bruitquicourt, sur un création originale de Philippe Van Den Bergh ; une autre création originale avec Armande Béjart, épouse Molière où théâtre, danse, musique et art lyrique s’entremêlent ; un texte au couteau, sulfureux de Ludmilla Razoumovskaia, Chère Elena, qui nous plonge dans les tensions de notre société ; une autre création du Teatro Picaro, Prêt à partir, où la fable se joue de l’histoire racontée en empruntant à la Commedia dell arte. A cela, le théâtre sur tréteaux est toujours présent avec, au minimum, 4 spectacles. Donner à voir et à entendre de nombreux auteurs, dont Molière, voilà ce qui prédomine. Le thème directeur avec de nombreuses créations est souvent le reflet de notre société lorsqu’on donne librement la parole aux auteurs et artistes.
Cette 7ème Edition du 8 au 14 juin 2015 offre une nouvelle fois une programmation riche en perspectives (représentations, conférences, lectures, rencontres, expositions et ateliers…) Le festival nous propose un Molière re-visité (Le Médecin Volant interprété en improvisation par Christelle Lefèvre et Pierre-Jean Ferrain ; Les Précieuses Ridicules mis en scène par Gérard Mascot ; Molière en 22 minutes mis en scène par Gilles Buonomo ; Mr. De Pourceaugnac représenté par la Compagnie de l’Illustre Théâtre ; El Cazamiento a la Fuerza représenté par la Compagnie mexicaine Pique repique y capoteteatro). Pouvez-vous nous présenter en quelques mots ces spectacles ?
Molière est unique car ses textes résonnent toujours, alors qu’ils ont été écrits il y a plus de 350 ans, en France et dans le monde. Ainsi, nous aurons l’immense plaisir d’accueillir une troupe mexicaine qui nous livrera sa vision d’un Molière complètement décomplexé des carcans dans lequel on l’a parfois mis. Molière est également unique parce que ses textes peuvent être représentés de mille et une façons. Dans la rue avec sur la base du canevas de l’improvisation (Le médecin Volant), sur tréteaux d’une façon très classique et très léchée (Les Précieuses Ridicules et Mr. de Pourceaugnac).
Si vous deviez mettre en lumière deux spectacles de la programmation, lesquels serait-ce ?
Je dirais La femme oiseau d’après une légende japonaise par la Cie de la mandarine blanche dans une mise en scène d’Alain Batis et Chère Elena avec Myriam Boyer mis en scène par Didier Long.
Alors que l’écrivain et éditeur français, Charles Dantzig, disait « Molière, c’est les Français », comment le festival parvient-il à attirer un public fâché avec le théâtre et plus précisément avec le théâtre classique ?
Le public est toujours la pierre angulaire d’un spectacle. Va t-il répondre présent ? Va t-il aimer ? Tout en posant toujours ces questions par rapport aux propositions qui sont faites, je lui fais confiance ! Et il me fait confiance (enfin, j’espère). Il est vrai que la moyenne d’âge du public en France est assez élevé (autour de 60 ans), mais c’est en proposant justement des formes différentes, payantes et gratuites, en salle et en plein air, que nous tentons de gagner du public. En espérant que celui-ci rebondisse d’un spectacle à l’autre, en se divertissant, en s’épanouissant, en vivant des émotions et en les partageant ! Alors non, je ne pense pas que le public soit plus fâché avec le théâtre classique qu’avec le théâtre contemporain ou tout autre forme de spectacle vivant.
Associer les publics aux pratiques théâtrales et aux questions que posent les spectacles, tels sont les objectifs.Il est à noter que le public du festival ne sera pas uniquement spectateur. Grâce aux actions culturelles, il pourra enfiler le costume de l’acteur le temps du festival. Quel est l’objectif de ces ateliers participatifs ? A qui s’adressent-t-ils principalement ?
Les tréteaux de France que dirige Robin Renucci seront présents sur le festival au travers de 3 spectacles/conférences sur l’histoire de la décentralisation théâtrale en France de 1910 à nos jours. Profitant de leur présence, nous proposons gratuitement au tout public, enseignants, jeunes des écoles primaires, collégiens, lycéens, publics « empêchés », animateurs sociaux, comédiens amateurs, des ateliers de lecture à voix haute, des ateliers de pratique théâtrale, des discussions autour de lectures théâtrales (contenus et formes), des ateliers sur le souffle, le geste, la parole…
Finissons sur une question un peu plus personnelle : s’il vous était donné de rencontrer Molière que lui diriez-vous ?
Je dirai comme Louis Jouvet, « Merci patron ! »
Festival Molière dans tous ses éclats
http://www.ville-pezenas.fr/theatre/festival-moliere-dans-tous-ses-eclats/
THEATRE DE PEZENAS
7bis rue Henri Reboul – BP 73 – 34120 PEZENAS
04.67.32.59.23 ou 06.07.31.18.26
billetterie-spectacle@ville-pezenas.fr
PERMANENCE BILLETTERIE AU THEATRE : du mardi au vendredi 16h 19h et samedi matin 10h 12H30
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