Quand les passeurs de mort remplacent le mythe de Charon
Par Felicia Sideris – bscnews.fr/ Angel Crawford, 17ans, est une adolescente excentrique, attachante et légèrement cinglée. Passeurs de mort nous est présenté comme étant son premier roman et il relate son histoire plus que bouleversante. Après le décès de son oncle Georges, amusant personnage fasciné par les sciences occultes, elle reçoit en héritage un manuscrit et des lunettes rouges plus qu’énigmatiques. Curieuse et courageuse, elle va alors chercher à comprendre quelle est l’utilité de cet étrange cadeau. Avec l’aide de Nadir, l’infirmier qui s’occupait de son oncle, elle va découvrir que cet objet lui permet de voir la mort, ou plus exactement de voir le passage d’un individu de la vie à la mort. S’ensuit une enquête qui amènera la jeune fille à rencontrer la mystérieuse famille Cooper et à se retrouver coincée dans un tourbillon d’évènements sur lesquels elle n’a plus aucun contrôle. Elle découvrira ainsi qu’aujourd’hui, la mort est contrôlée et organisée par l’entreprise internationale Chronos Inc. qui a le monopole sur l’activité.
Dans ce roman aux allures d’enquête, Fabrice Colin, l’auteur, nous invite à réfléchir sur cette idée terrifiante qu’est la mort à travers le regard d’une adolescente; il questionne une thématique universelle avec la simplicité et la singularité de la pensée juvénile. Pour cela, il installe un style franc, sobre, souvent naïf et ponctué de remarques amusantes qui traversent l’esprit de la jeune fille. Ce roman aborde la question de la mort et de la peur jusqu’aux derniers mots, sans jamais installer de longueurs. L’intrigue se met en place très rapidement et c’est avec une écriture fluide, efficace et drôle que l’auteur nous emmène dans cette grande aventure. Le réalisme de cet univers et la banalité des personnages facilitent de surcroît l’identification du lecteur. Par moment, le contenu est tout de même un peu trop dense et l’on se demande dans quelle direction on nous mène, quel est le cap à tenir, mais cet étourdissement ne fait peut être que refléter à la perfection celui de la narratrice perdue et forcée à réfléchir sur la mort et à en comprendre les fonctionnements.
Dans le premier chapitre, Angel nous promet de devenir notre « messagère », nous apprend qu’elle est la « fille qui sait des choses que tous les autres ignorent » alors que vous, lecteurs, « Vous ne savez rien de la mort ». On s’attend donc à une personnalité combattante et volontaire. Pourtant celle-ci est vite effacée lorsqu’elle rencontre la famille maudite des Cooper sur laquelle va se recentrer le reste du récit, oubliant les questions posées au début du roman et laissant peu à peu disparaitre la détermination si attachante de la jeune fille qui avait été mise en place avec la découverte de Chronos Inc. Avec l’arrivée de cette entreprise dans la narration, on se dit que l’on va découvrir une idée inédite qui démystifiera totalement la mort en la réduisant à l’idée d’un « service » offert par une multinationale. Le bémol? Cette idée n’est pas du tout exploitée. Elle n’est présente qu’à travers une carte professionnelle trouvée par terre car ensuite, si Angel arrive à apercevoir les bureaux de loin, grâce à ses lunettes, comme une île fantôme, elle n’entrera jamais en contact avec « les passeurs » qui y travaillent. Nous n’en connaissons donc pas le fonctionnement, cette multinationale ne sert que de prétexte aux recherches d’Angel qui découvrira ainsi la famille Cooper sur laquelle se focalisera le reste de l’histoire. La fin de la lecture laisse donc tout de même le lecteur sur sa faim.
Ce roman jeunesse arrive cependant bien, sans prétention philosophique et dans un style simple et amusant, à parler de cette question importante de la peur de la mort et à nourrir les interrogations qui germent dans l’esprit d’un jeune adulte. A offrir peut-être aux ados qui s’interrogeraient sur le sujet!
Passeurs de mort de Fabrice Colin
Date de parution : 19 février 2014
Editeur: Flammarion
Prix: 14,50
A partir de 15 ans
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