Anny Romand

Anny Romand : la Voix des Âmes

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Entretien épistolaire entre notre chroniqueuse Sophie Sendra & l’actrice, réalisatrice et productrice Anny Romand

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Le 29 avril 2014

Chère Anny Romand,
C’est avec un grand plaisir que je vous retrouve, une nouvelle aventure épistolaire est en route…En effet, les lecteurs qui connaissent notre Magazine BSC News depuis longtemps, se souviennent sans doute de notre première correspondance en 2011, c’était à l’occasion de votre rendez-vous Une Saison de Nobel, fabuleux festival de Littérature, c’était au Grand Palais si mes souvenirs sont bons ; Harry Martinson, Winston Churchill, Albert Camus, Isaac Bashevis Singer, Mario Vargas Llosa et Gao XingJian étaient à l’honneur. L’exercice si particulier qu’est la relation épistolaire, s’est imposé à moi comme une évidence, mais il a fallu que j’apprivoise ce qui est oublié : le « dire ». Mes premières lettres étaient sans doute – trop – courtes et ne laissaient pas pleinement la place à l’échange, à l’histoire de soi ; le défaut de la retenue ? Je ne sais pas. La nécessité de l’apprentissage de ce qui était naturel, de ce qui se conjugue désormais aux temps du passé narratif ? Peut-être… C’est pour toutes ces raisons que ces lettres seront une re-découverte pour vous, et… pour moi, un prolongement de l’inachevé ! Votre nom est présent dans de nombreux films, mais c’est votre visage qui est le plus connu… Étrange… De plus, vous êtes discrète, si discrète, trop discrète. Pourtant tout le monde vous connaît ! Pourquoi cette « absence » ? En fait, je devrais dire ce « clair-obscur », car depuis Diva de Jean-Jacques Beineix en 1981 jusqu’à Pieds nus sur les limaces de Fabienne Berthaud en 2013 vous n’avez pas arrêté d’être à l’affiche : cinéma, court-métrages, télévision, théâtre, festivals de Littérature. Vous êtes également productrice, réalisatrice. A ce propos, j’ai vu Afrikann Striptease (Carnet de route) qui date de 1998. J’ai été très surprise par le sujet… un documentaire sur un tournage de film en Afrique du Sud ; vous aimez le politiquement in/correct semble-t-il (?!). Il se dégage de ce film une sensation de « malaise » face à certaines scènes. De plus c’est vous qui tenez la caméra ; nous voyons ce que vous voyez et vous mettez le spectateur à votre place d’intervieweuse, ce qui nous rapproche de vos « chauffeurs » successifs. Pourquoi avoir réalisé ce film ?
Enfin, vous semblez aimer le « décalage », les sujets qui peuvent déstabiliser, les réalisateurs qui « fouillent les âmes » (Beineix, Godard, De Oliveira, Lelouch etc.) alors que vous ne vous livrez pas facilement, vous ne cherchez pas les feux de la rampe. Cela semble paradoxal… à moins que ce ne soit encore votre personnalité faite d’oxymores, tels que le clair-obscur dont je parlais…Avant de terminer cette première lettre, je voulais vous poser une toute dernière question. A quoi ressemble votre bureau ou l’endroit dans lequel vous laissez s’exprimer votre littérature intérieure… ?
Bien à vous,
Sophie Sendra

Le 12 mai 2014 dans le train

Chère Sophie Sendra,
Comme vous le dites, prolongeons l’inachevé… pour ne jamais l’achever. Merci de me poser cette question sur mon absence, ou plus poétique, sur mon « clair-obscur ». Je n’y avais jamais pensé. Enfant, je suis peu allée à l’école et sans doute n’ai-je pas appris à être avec les autres enfants. A converser, à blaguer, très vite la conversation m’est étrangère et je me retire, je laisse planer mon esprit sur les objets qui m’entourent, les visages qui parlent, le ciel ou l’oiseau qui picore au pied de la table. La lecture m’accompagne tous les jours. Depuis l’enfance, je cherche dans les livres des réponses aux questions auxquelles mes parents ne savaient pas répondre, soit par manque de temps, soit par désintérêt pour elles ou bien l’inverse, parce que les questions les mettaient mal à l’aise. Ainsi très vite j’ai appris à ne pas chercher à apprendre auprès d’eux mais dans les livres ouverts sur le monde. Des mondes qui m’enchantaient et me rendaient la vie plus douce, plus excitante, plus belle. Et si vous parlez de mon clair-obscur, de ma discrétion j’ai dû l’apprendre des auteurs que je côtoyais et de ma grand-mère. Discrétion pour ne pas se retrouver sur le passage de la balle, du sabre, du couteau. Ce qui est à l’écran, un peu de vous, n’est déjà plus vous. Vous êtes ailleurs, anonyme, introuvable, cachée. Rester cachée pour continuer à exister, à produire, à penser sa vie (mais aussi à la panser) rester à l’abri, rester avec vous, avec vos très proches. C’est tout. Laisser sur terre une empreinte la moins coûteuse possible, sans doute.
Aimer le soleil pour son ombre. Être blonde, claire de peau et se cacher du soleil. Ne pas s’exposer, dès l’enfance le mot d’ordre de ma mère, et pourtant j’ai laissé voir mon visage, je me suis exposée à la lumière des projecteurs pour être imprimée sur la pellicule, d’une façon indélébile, visible à jamais avec de tels réalisateurs. Donner son visage, son corps est plus réel et plus grave que de donner son nom, en tout cas pour moi. Peut-être ai-je voulu me cacher tout en me montrant ? Être comédienne, n’est-ce pas comme lire des romans qui vous entraînent sur des terres étrangères. Partir à la recherche de soi à travers les personnages que l’on vous propose pour trouver des réponses à votre propre vie. Julio Cortazar pense qu’on écrit pour poser des questions alors je devais passer mon temps à trouver des questions et encore des questions dans les livres que je lisais sans jamais avoir de réponse.
Vous dites que je tourne avec des réalisateurs qui fouillent les âmes. Bien sûr, sinon quoi ?
Vous me demandez à quoi ressemble l’endroit où je laisse s’exprimer ma littérature intérieure. Et bien, je vous écris dans le train qui rallie Turin à Paris. J’étais à Turin dans le cadre d’Une Saison de Nobel où j’ai lu à la Cinémathèque de Turin avec Roberta Pazi des fragments d’une nouvelle d’Alice Munro avant la projection du film tiré de cette nouvelle : « Loin d’elle » de Sarah Polley. Merveilleux film tout en retenue.
Le train est souvent favorable à l’écriture car il procure un retrait en soi dans un brouhaha général entrecoupé d’annonces diverses et fréquentes de la Sncf car, il y a des travaux sur la voie, des arrêts en rase-campagne, un changement de locomotive, la montée de la police des frontières, les arrêts dans les gares, le passage du barista…
La vie, quoi, qui continue !
Bien à vous,
Anny Romand

Le 20 Mai 2014

Chère Anny,
En lisant et relisant votre lettre, je vous imagine dans ce train, assise, regardant les paysages ; vous inspirant des images qui défilent. Il y a quelques années était diffusée une série de documentaires qui s’intitulait « Des trains pas comme les autres ». Ces trains me fascinaient, ils étaient une invitation aux voyages… L’inspiration c’est le fait de prendre le monde comme on inspire l’oxygène pour respirer. La lettre devient ici une expiration créatrice. S’inspirer du monde, des objets, des visages c’est se remplir, créer, écrire, produire, c’est redonner au monde une partie de ces « objets » de pensée(s) tout en gardant en nous une partie d’eux-mêmes. Ils sont ainsi à jamais gravés en nous comme une empreinte indélébile. Les lectures que nous faisons enclenchent le même principe. Mais alors, Anny, toutes ces lectures – tous ces auteurs – que vous partagez lors de vos interventions et qui vous inspirent, vous constituent ?! Elles (ils) font partie, à jamais, de vous. Si j’ai bien compris, ces « livres ouverts sur le monde » vous ont donc ouverts à vous-même… ils vous nourrissent…Toute chose n’existant que par l’existence de son contraire, il est logique de penser « qu’aimer le soleil » c’est l’aimer pour son ombre. Ce principe s’applique à l’Art du « montré-caché » initié par Christo. On cache pour mieux montrer ; c’est également ce que l’on retrouve chez Paul Klee lorsqu’il explique que l’Art est la tentative « non pas de rendre visible, mais de rendre le visible » des forces qui ne se voient pas, qui ne se perçoivent pas. Ainsi, « aimer le soleil pour son ombre » c’est « rendre visible » la force de l’ombre. Nous sommes en plein Festival de Cannes. L’endroit où toutes les lumières se braquent. D’après vous, quelle est « l’ombre au tableau » de ce Festival du film ? Votre absence sans doute… nous aurions pu nous voir, boire un petit café…Annie Girardot disait que le cinéma lui avait cruellement manqué – selon moi, elle manquait beaucoup au cinéma et au public. Le cinéma vous manque-t-il en tant qu’actrice car on vous voit peu sur les écrans ?
Enfin, du 15 au 30 mai au théâtre Clavel, se joue une pièce d’Alan Ball intitulée « Power Lunch » que vous avez traduite. La province aura t-elle la chance de profiter de cette pièce ?
D’ailleurs, pourquoi celle-ci a-t-elle attiré votre attention ?
Pour tout vous dire, j’en arrive à penser que vous voyagez en « traduction »… mais peut-être ai-je tort…
Bien à vous,
Sophie

Le 02 juin 2014

Chère Sophie, qui porte le même prénom que ma grand-mère ! Vous voulez me faire « dire ». Mais qu’ai-je à dire ? Dire ce que je veux ne pas montrer. Je suis quelqu’un qui regarde, qui observe. Pas encore quelqu’un qui dit mais je voudrais y arriver, à dire ce que je vois, ce que j’observe. Dire tous les gris de l’ombre du soleil. Ayant vécu enfant en Provence, je connais la force du soleil éblouissant, aveuglant, vous enfermant en vous-même. Vous n’y voyez plus rien, ce que Van Gogh a bien montré, seulement des sensations, des vertiges, des folies colorées. La tête brûle ! En revanche, quand je pense aux gris, je vois Fernando Pessoa, seul dans les rues de Lisbonne, dans les cafés, seul avec ses doubles ! Bien sûr qu’il est très agréable d’être dans la lumière et être à Cannes pour un café m’aurait beaucoup plu. Le Festival de Cannes est très important pour la profession, il est nécessaire et indispensable, beaucoup plus que pour un seul individu. Peut-être l’année prochaine si tout va bien… avec un rôle bien sûr à défendre, sinon… Alan Ball est un magnifique auteur amoureux des femmes auxquelles il donne des rôles à leur mesure. C’est un grand honneur pour moi de le traduire avec Adriana Santini et ses 5 pièces en un acte viennent d’être éditées chez Actes sud Papiers. Il est vrai, comme vous le dites que je voyage à travers les auteurs et aussi par la traduction. Car j’ai l’impression que chaque langue fait travailler une partie différente du cerveau. Mais aussi éclaire le monde réel d’une lumière singulière, propre à cette langue, avec ses gris et ses émotions sonores.
Afrikaan Striptease s’est imposé à moi en Afrique du Sud quand je tournais en tant qu’actrice pour TF1. Durant ces quatre mois les paysages ethniques et mentaux de ce pays tout de suite après l’Apartheid, me sont apparus terriblement violents et dérangeants. Vous parlez de malaise, mais c’est exactement ce que je ressentais et ce que j’ai voulu transmettre. Et encore aujourd’hui, cette violence est toujours là. Comme pour la littérature, ce que vous avez à dire permet un échange entre individus, un dialogue, sinon ensemble vide !
Voilà, j’ai dit quelques mots pour aujourd’hui. Merci.
Bien à vous,
Anny

Le 03 juin 2014

Très Chère Anny,
Je profite d’un moment de répit entre deux cours pour répondre à vos « dires ». Je prends la plume pour rédiger cette lettre, à la terrasse d’un café, je m’inspire des couleurs, du bruit, des conversations ambiantes.Le moins que l’on puisse dire c’est que votre Grand-Mère avait un joli prénom ! J’espère qu’elle vous amenait un peu de douceur, un peu d’écoute et, peut-être, les réponses que vous attendiez, celles-là mêmes que vous vous posiez sur le monde. Nous sommes faits de racines, mais ces dernières sont comme des promesses, elles suggèrent les futures « branches » que nous faisons pousser, telles des ramifications qui s’élèvent, nous élèvent. Les lectures, les traductions, les films, les auteurs, les écrivains sont autant de « branches » qui vous – nous – font respirer. La difficulté de « dire » est due, selon Bergson, au langage lui-même. Ce dernier s’immisce entre l’objet et nous comme un obstacle. Seule l’intuition nous donnerait un accès direct à l’objet. Mais comment faire autrement que de « dire » ? Peut-être en utilisant d’autres que nous-même, qui nous permettraient de ne pas être « Lost in translation ». Ce film se termine d’ailleurs étrangement par un murmure que le spectateur devine… mais n’entend pas. Dans Afrikann Striptease vous adoptez le même principe lors de ces scènes dérangeantes : tout est « dit » parce que vous ne parlez pas à ce moment là. Sans trop m’avancer, je dirais que vous « dites » par les mots de l’Autre. Lorsqu’on est atteint de synesthésie, les mots, les lettres se colorisent, les couleurs peuvent devenir des sons, les sons des images. A force de traduire le monde réel, le vôtre, il doit s’apparenter à la palette d’un peintre. Cette « lumière singulière » doit changer au fur et à mesure du temps, c’est le principe évoqué par les impressionnistes. Quel est donc ce « peintre » au cœur de la littérature, qui a su redonner selon vous une « lumière singulière » à votre monde de perception ?
Mais parlons également de l’avenir. Allez-vous reprendre la caméra ? Un documentaire, un film, un rôle ? Enfin, donner votre voix à un texte – lui donner une âme, l’animer – fait partie de votre – ou vos – voyage(s). Dans quel « pays » littéraire voyagerez-vous dans les jours, les semaines, les mois qui viennent ?
Ma pause se termine et la feuille blanche sur laquelle j’écris prend toute la lumière du soleil, elle devient éblouissante ; seule l’ombre de ma main cache les mots qui glissent sur le papier, à l’encre noire ils se révèlent, ils deviennent « contrastes », évocations de sensations et de sentiments. Noircir une page blanche c’est ce qu’il y a de plus difficile quand on veut « dire »…
Belles couleurs et à bientôt,
Sophie

Le 05 juin 2014

Chère Sophie,
Le croirez-vous ? Je suis encore dans un train, le train qui me ramène de la Ciotat à Paris, j’écris sur une feuille blanche à petits carreaux. Le silence règne autour de moi, il est deux heures et demie, l’heure de la sieste. Et du silence merveilleux. Car je n’aime pas trop parler. Me raconter. Ma parole s’apparente plutôt à des images. Une scène, un moment de ma vie, je la vois en images dans lesquelles je visualise les expressions des personnes évoquées, la lumière qui les baigne, le lieu très précis de ce souvenir. Tout ça muet. Du cinéma muet. Comme « La Femme qui pleure » ce fameux tableau de Picasso où nous pouvons voir et entendre toute la souffrance du monde, sans un cri, sans un mot. Fantastique. Cette reproduction était sur la cheminée de ma chambre quand j’étais enfant à côté de celle d’un Miro très coloré. Voilà ce qui a dû impressionner ma pellicule sensible d’ « une lumière singulière ». La page sur laquelle je lis la vie, l’auteur qui m’a tout appris sont sans doute les traces sur la page noircie des visages. Je suis très sensible aux visages, aux corps pour tout ce qu’ils disent en silence. Avec l’Odyssée d’Ulysse de Homère et les Contes des mille et une nuits. Incroyable que je sois tombée sur ces deux ouvrages, petite fille ! Les traces sur le visage d’Annie Girardot.
Dans le film Afrikaan Striptease produit par Jean-Jacques Beineix, j’étais très attentive aux silences, aux regards, aux émotions traduites par la respiration, les hésitations, les temps de réponse, aux gestes, aux regards qui s’égaraient. La violence et les femmes. Plus la violence envers les femmes est grande, moins le pays est démocratique, avec une liberté en cage. Je suis triste de tout ce qui se passe dans le monde. Mais parfois des lumières scintillent et elles font du bien à notre âme.
Le théâtre, oui, bien sûr, peut-être à l’automne. Bien sûr les soirées Nobel à venir. J’aimerais aussi reprendre ma caméra mais le temps manque… Je verrai bien.
Ma fameuse grand-mère m’écoutait à perdre haleine, elle vivait à travers moi. Les histoires de classe, les professeurs, les élèves, je lui racontais tout. Elle adorait ça, du moins en donnait-elle l’impression. Les films que nous venions de voir et que je lui racontais à nouveau. Elle me disait toujours cette phrase qui m’enchantait : « Mais je n’ai pas vu tout ça ! » et je recommençais à lui dire…
Je vais finir ici aujourd’hui mes « dires » pour continuer mes actions.
Bien à vous sous le soleil mais toujours à l’ombre !
Anny

Le 05 juin 2014

Très Chère Anny,
Cela fait cinq fois que je recommence cette première phrase, celle qui doit débuter cette ultime lettre. Selon les correspondants, cette dernière lettre est facile à écrire et, pour d’autres c’est plus difficile… Peut-être parce que j’ai l’impression de quitter une amie, quelqu’un qu’il me semble connaître depuis longtemps. Les bouddhistes expliquent cela en parlant d’âmes qui se retrouveraient, liées par le Temps, au-delà du temps lui-même. La perception du monde a fait partie de mes recherches, j’ai conclu par un système expliquant « une théorie de la relativité de la perception ». J’ai publié quelques petits morceaux de ma thèse de Doctorat. Pour en arriver à une telle théorie, j’ai étudié des auteurs de la littérature américaine. J’aime Kerouac car en lisant ses ouvrages on entend les voitures, les trains, les villes, la musique, le jazz. Son principe d’écriture me rappelle votre façon de faire intervenir les images qui vous traversent lorsque vous écrivez, on voit ce que vous percevez. J’ai l’habitude de dire que « percevoir » c’est « percer puis voir » comme s’il fallait battre la Déesse Indienne Maya – qui jette un voile sur le monde qui nous entoure – .
Les artistes – quel que soit leur Art – ont pour rôle de nous faire découvrir ce que la Déesse Maya nous cache… ils nous livrent le monde et nous délivrent de nos illusions – ce que fait le philosophe dans l’allégorie de la caverne expliquée par Platon – C’est en fait cette « énergie créatrice » qui vous anime en nous livrant ces auteurs, en faisant ces films, en traduisant ces œuvres incontournables. « Poiein » en grec – qui donna par la suite le mot poésie – veut dire créer, faire. J’ai découvert au travers de cette relation épistolaire une poétesse. Ce que vous faites est de l’ordre du « poiein ». De plus, vous parlez d’Homère. Les Aèdes de l’Antiquité allaient de ville en ville pour conter/chanter à d’autres des épopées. L’Aède était un poète, Homère en fut un. Votre « lumière singulière » est celle de la poésie. Les Contes des Mille et une Nuits se racontent, font rêver, ils nous font voyager… tout se tient !
« Mais je n’ai pas vu tout ça ! » lors de notre première correspondance, je n’avais sans doute pas « perçu » que vous étiez l’ombre qu’on devine au détour d’un effet de lumière. La Déesse Maya m’a cachée une partie de vous, mais là j’ai eu raison d’elle car je vous vois au-delà du « dire ».
Je voulais vous remercier pour ces confidences, pour vos films, pour les auteurs que vous nous faites découvrir ou redécouvrir. Merci pour votre gentillesse, pour votre poésie, pour vos « tableaux » de vie(s), pour votre synesthésie qui change le cadre étriqué de notre perception.
A très bientôt pour un autre Voyage…
Bien à vous
Sophie

Le 06 juin 2014

Chère Sophie,
Ce ne sont plus des questions que vous me dites ! J’aime beaucoup cet échange avec vous que je ne connais pas. Ni votre visage, ni votre voix dont je ne me souviens pas. Vous parlez d’âme, de poésie, de Déesse Maya cachottière. Notre âme nous est confiée par nos ancêtres pour l’enrichir, la partager, la chanter, la donner et la rendre à la fin du parcours, à nos descendants. Et vous, vous éclairez mon âme sur son chemin afin qu’elle perce et voit plus loin, plus profondément, plus assurément, plus gaillardement. Avec la joie de vivre parce que c’est une grande joie et une bataille de tous les instants pour continuer à voir le coucher du soleil, les enfants qui jouent, le vent sur le visage, le chant de l’oiseau, jusqu’à la fin. « La perspective de la fin du monde serait parfaitement supportable si on pouvait s’en griller une après. » voilà ce que dit Horace Engdahl dans La Cigarette et le Néant (Éditions Serge Safran) dans cette « invitation à la méditation avec des moments d’intense bonheur à partager ».
Merci, je vais continuer sur cette voie, avec cette voix. Avec ce peuple de vivants et de disparus toujours présents que j’aime.
Avec affection,
Anny

S’il fallait conclure

Il existe plusieurs passions : les passions artistiques, les passions amoureuses, les passions de l’âme parmi tant d’autres. En philosophie, on nous enseigne souvent qu’il faut contrôler ses passions, il est désormais clair qu’il faille s’y adonner pleinement sans jamais renoncer à les transmettre. Anny Romand arrive à nous faire profiter des siennes, alors prenons tout, tout de suite.

Il vous reste

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