François Marchand : une histoire du Boboïsme

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Par Nicolas Bodou – bscnews.fr/ «Etre socialiste signifie être content de soi. C’est plus efficace et plus économique que la charité. En prime, on a une carte de donneur universel (de leçons) ».

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Paris, 2015. La ville a « évolué » ! Homogène, lisse, festive, Paris n’est plus. Le grand projet politique visant à faire de la capitale un havre de paix pour éco-citoyen a atteint son objectif. De la rue des joyeux-Kosovar au boulevard de la lutte contre l’homophobie en passant par la rue des Porteurs-de-valises, aucun espace n’est oublié pour mettre le parisien dans un bonheur hygiéniste de tous les instants. Malgré cela, de nombreuses morts inexpliquées viennent troubler la plénitude de la cité. Depuis quelques temps, les usagers de Vélib décèdent étrangement les uns après les autres. Hubert Béchetoile, maire socialiste de Paris et grand architecte du bonheur, s’inquiète. Il entrevoit un complot fasciste aux relents d’extrême droite. Moullimard, le commissaire chargé de l’enquête, ne voit pas tout à fait les choses de la même façon et préfère battre le pavé plutôt que d’épouser les théories des « grands penseurs ».

«Le petit monde parisien s’agitait de plus en plus. L’une des victimes était juive : défilé Bastille-Nation contre l’antisémitisme. Une autre était noire : re-défilé contre le racisme et l’esclavage. Une autre enfin était homosexuelle : re-re-défilé contre l’homophobie. Dommage qu’on n’ait pas trouvé de Falacha inverti parmi les victimes, ça aurait permis de n’organiser qu’une seule manifestation.»

Pour son quatrième roman, François Marchand revient avec son habituel humour noir et sa prose toujours acerbe. À travers une enquête quelque peu surréaliste, l’auteur bâti une sorte de roman d’anticipation sur cette ville martyrisée à grand coup d’idées modernes et de projets « sympathiques ».Il repeint la capitale en n’oubliant pesonne ; les musiques engagées, les rollers, les associations de toutes les couleurs, les droits-de-l’hommiste à emporter. François Marchand les éparpille à la façon d’une puzzle. Inspiré par Philippe Muray, au génie délicieux à décrire les absurdités contemporaines, François Marchand nous emmène avec talent visiter Paris, porté par une galerie de personnages comme Bernard « l’ingénieur » ; clochard en rupture totale avec le progrès, le commissaire Moullimard, qui aimerait bien prendre le temps de comprendre tant les choses perdent leur sens. Drôle, acide et lucide, voilà trois bonnes raisons de lire le dernier roman de François Marchand.

« Moullimard comprit alors que toute vie un peu cohérente était désormais impossible. Jadis, le principe, c’était « chacun dans sa cour », les bourgeois restent entre eux, les prolos aussi. Elle n’était pas très rigolo la société traditionnelle, disparue vers 1970, elle était même déprimante. Mais ça marchait : les générations se renouvelaient. Jusqu’à ce qu’une nouvelle caste, improprement appelée « bobos » apparaisse. Elle n’a rien de bohème. C’est bien pourtant une bourgeoisie, mais dégénérée, qui se déteste tellement qu’elle épouse naturellement les idées qui la feront disparaître. Il s’agit plutôt de « bogos », de bourgeois de gauche.»

Cycle mortel
François Marchand
128 pages
Edition Ecriture.
13,50 euros.

Autres titres de l’auteur : L’imposteur (2009) Le Cherche midi, Plan Social (2010) le Cherche midi, Un week-end en famille(2012) Le Cherche midi.

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