Love me, Turkmenistan: quand un dictateur orchestre sa propre mise en scène
Par Julia Hountou – bscnews.fr/ Fasciné par la façon dont certains politiques mégalomanes se mettent en scène, Nicolas Righetti se rend entre 2004 et 2006, à trois reprises, au Turkménistan, l’un des pays les plus fermés au monde (2), pour témoigner des dérives dictatoriales du régime de Saparmourad Niazov. Arrivé au pouvoir en 1985, puis élu de 1991 à 2006 président de la République indépendante turkmène, ce dernier devient rapidement une caricature de despote.
Le photographe brosse le tableau d’un Etat pris en otage par un tyran déconnecté de la réalité. Ainsi, dès son accession à la fonction suprême, débarrassé de toute ingérence étrangère, Niazov refaçonne le pays selon ses caprices. Il démolit les immeubles soviétiques et leur substitue des constructions orientalisantes, impose des mots nouveaux dans le vocabulaire, renomme les mois de l’année d’après sa propre personne et les membres de sa famille…
Au cours de son reportage, Nicolas Righetti fige l’omniprésente figure du président qui s’affiche sur tous les supports, des bouteilles de vodka aux savons en passant par les paquets de spaghettis ou les tapis. Son visage (3) s’incruste jusque dans les espaces les plus privés, comme la salle de bains ou les toilettes. Dans ses campagnes de propagande, il se montre toujours souriant et paternaliste (4) en vue de livrer une représentation positive à son peuple et de devenir l’exemple à suivre par tous. Metteur en scène de son pouvoir, il se donne l’apparence du souverain idéal.
Stupéfait par la démesure et l’extravagance de cette aliénation collective, Nicolas Righetti montre comment Niazov – s’appropriant l’argent (5) du pays – fit ériger sur tout le territoire des milliers de statues en or à son effigie, déclinées dans diverses situations (assis, debout, lisant, posant à …