« Jeunesse » : le film autobiographique de Justine Malle
Par Inès Bedrouni – bscnews.fr/ Dans « Jeunesse », Justine Malle, la fille du grand cinéaste Louis Malle, décide de parcourir les derniers mois de la vie de son père sous un angle purement autobiographique.
Elle s’appuie sur les caractéristiques « contemplatives » et « introspectives » du cinéma français pour aborder avec délicatesse la douleur de son propre passé. Le parti pris de la personnalité profondément française de cette réalisation, qui est revendiquée tout au long du film, n’est cependant pas toujours très subtil. Les plans larges sur une voiture qui s’enfonce dans un paysage champêtre par exemple, ne relève ni d’une originalité florissante, ni d’une esthétique remarquable qui saurait légitimer la présence de ce stéréotype. Mais même si le spectateur a pu, plus d’une fois, anticiper les choix visuels et techniques à cause du manque d’originalité, les plans qui se présentent comme très picturaux sont souvent réussis et ont le mérite de s’approprier avec finesse la charge émotionnelle du discours tenu. La dimension autobiographique apporte d’office au scénario une singularité que l’on retrouve dans la symbolique de la réalisation. Ce qui se manifeste, par exemple, avec des métaphores de la disparition du père qui s’immiscent de plus en plus régulièrement et donnent une profondeur à l’histoire que l’on ne perçoit pas spontanément. Mais cette dimension se manifeste également à travers la distance qu’établit Esther Garrel, l’actrice principale, avec le spectateur, qu’elle saura anéantir progressivement, en faisant naître chez lui un sentiment d’empathie de plus en plus envahissant. Elle a effectivement la particularité de ne sourire que très rarement et de prendre une distance, comme par sécurité avec tous ceux qui l’entourent. C’est, en parallèle, ce qui pourrait expliquer le fait que Justine Malle considère son film comme une définition de la jeunesse, comme l’annonce le titre. C’est effectivement une phase existentielle où la distance est un mot d’ordre puisqu’elle est la seule arme contre la réalité dont bénéficient ceux qui en souffrent. C’est ce désir de fuite par la fuite dans le désir qui sera traduite à l’écran par Justine Malle à l’âge de ses vingt ans. A travers l’aspect du film français par excellence, cette dernière cherchait sans nul doute à exprimer sa quête passée de la figure masculine, la seule qu’elle croyait apte à combler le vide paternel : « Chez la fille il n’est pas de désir plus grand que celui de la protection du père. » Freud.
• Date de sortie 3 juillet 2013 (1h 15min)
• Réalisé par Justine Malle
• Avec Esther Garrel, Didier Bezace, Emile Bertherat…
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