Emmanuelle Bercot : « Elle s’en va » comme un hymne à la féminité

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Par Candice Nicolas – bscnews.fr / Bettie (Catherine Deneuve) a la soixantaine. Elle est divorcée, a une fille et un petit fils qu’elle ne voit plus, et un amant qui la quitte pour une maîtresse plus jeune. Elle vit avec sa mère (Claude Gensac) avec laquelle elle tient un petit restaurant au bord de la faillite. Un jour qu’elle est en panne de cigarettes, elle prend sa voiture à la recherche d’un tabac, mais sa course va lui prendre plus de temps que prévu, et l’emmener bien plus loin qu’elle ne l’espérait.

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La réalisatrice, Emmanuelle Bercot, a composé le rôle de Bettie expressément pour Catherine Deneuve, et cela se ressent à chaque minute du film alors que la protagoniste nous conquit un peu plus à chaque kilomètre, attendrissante, fière et têtue, profondément humaine. Chaque femme peut se reconnaître en Bettie alors que l’on n’oserait tenter la comparaison avec la grande Catherine, mais ici on est toutes sœurs, et on attend toutes de la vie davantage qu’une petite pause cigarette. Qu’il est bon de voir un film aux rencontres inattendues et agréables. Ce road movie transmet son humeur positive et s’inscrit presque comme un hymne à la féminité.

L’interview d’Emmanuelle BERCOT

Comment l’idée de ce film vous est-elle venue ?
Emmanuelle Bercot : Je voulais faire un film avec Catherine Deneuve depuis longtemps, c’est une des rares artistes françaises à m’inspirer de la sorte. Comme pour la plupart des femmes de ma génération, Catherine fait partie de ma jeunesse. J’ai écrit « Elle s’en va » pour elle, c’est Catherine ma seule motivation.

Votre film est l’histoire d’une femme qui plaque tout, part faire un tour mais ne revient jamais. Pourquoi un road movie ? Il y en a très peu en France, surtout avec une sexagénaire pour héroïne.
J’avais très peu d’idées préconçues quand j’ai commencé à écrire. J’imaginais simplement Catherine, sur la route, roulant et traversant des endroits rarement vus au cinéma. Le road movie est un genre populaire mais pour moi le seul qui mette en scène un protagoniste expérimenté est le magnifique film de David Lynch, « Une histoire vraie », avec Richard Farnsworth. En fait, dans mon film, on ne voit que rarement Catherine derrière le volant, c’est malheureusement pour des questions budgétaires. Mais les rencontres que fait Bettie pendant son voyage ne se font que parce qu’elle a pris la route, c’est ce départ qui compte.

Dès que Bettie est sur la route, de nouvelles opportunités semblent s’offrir à elle, vouliez-vous faire passer un message ?
J’avais envie de raconter l’histoire d’une femme d’un certain âge et à laquelle il pouvait arriver quelque chose que personne ne soupçonnerait. Je voulais une approche optimiste liée à cette maturité. Quand vous avez trente ou quarante ans, il est encore possible de changer de vie, de refaire votre vie, mais la soixantaine franchie, c’est plus difficile. Moins de portes s’ouvrent à vous, de moins en moins d’opportunités se présentent. J’ai toujours eu peur de prendre de l’âge, ce film traite de mes propres angoisses je pense. Je l’ai écrit autant pour me rassurer que pour réconforter celles qui en ont besoin.

Pouvez-vous nous parler de la relation de Bettie avec sa mère ?
On parle moins de la relation mère-fille une fois qu’elles sont plus âgées, ou alors on met en valeur la mère vieillissante et devenue à charge. Dans le cas de Bettie, la mère est toujours la matriarche, imposante et intrusive. À soixante ans, Bettie a encore besoin de se libérer du joug maternel. J’aime cette idée de la soixantaine, Bettie est retournée vivre chez sa mère et doit se plier à ses règles. Elle a laissé sa vie se dérouler sans elle en quelques sortes, sa nouvelle histoire va commencer par une rupture, qui lui ouvre les yeux sur toutes ces opportunités manquées.

« Elle s’en va »
(R : Emmanuelle Bercot – France)
Section : Compétition
Sortie française : 18 septembre 2013 ( photo JM.Leroy)

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