Pouvez-vous nous parler de votre rencontre avec le Jazz ?
À 20 ans je suis partie vivre à Londres après avoir refusé l’entrée des beaux arts. J’ai suivi des cours de musique dans une école londonienne. Le jazz m’était complètement étranger. Je n’avais aucune culture « jazz » et je n’en écoutais jamais. Plus l’année scolaire avançait, plus les gens me disaient que ma voix se prêtait bien à ce style. J’ai rencontré par hasard un contrebassiste qui m’a fait la même réflexion. Il m’a proposé « une session » que j’ai accepté. J’ai du fouiller dans les CD de ma colocataire et j’ai ecouté avec elle le morceau » Good morning heartache » de Billie Holiday. Il a immédiatement résonné en moi. J’ai donc appris à le chanter tout en l’écoutant. Puis je me suis essayée à quelques standards. J’ai aimé cela autant que cela me paraissait naturel. Je suis rentrée à Paris et je me suis lancée dans le Jazz.
Quel est le fil rouge entre les Beaux-Arts et la musique dans votre parcours culturel ?
Une fois acceptée aux Beaux Arts, je ne me suis pas du tout vue dans les arts plastiques. En fait, je ne me voyais pas dans cette vie. Cela a été le déclencheur pour mon départ en Angleterre puis pour faire une école de musique et décider enfin de chanter pour de vrai.
Qu’ont-ils apporté l’un et l’autre dans cet apprentissage ?
Ces deux éléments m’ont permis de me découvrir sous différentes facettes, avec d’autres styles d’expression. J’ai compris que le chant était fait pour moi. Ces périodes de ma vie se sont enchâssées pour que je puisse devenir une chanteuse de Jazz. La musique m’a amenée vers ma propre sensibilité qui avait toujours été là. En peinture déjà, mon thème de prédilection était la musique noire américaine.
On essaie bien souvent de vous attribuer des affinités musicales avec Billie Holiday. Cela vous plaît-il ou vous agace ?
Cette comparaison m’a toujours flattée, car avant même de connaître le travail de Billie, au tout début j’avais repris la version de « Don’t explain » d’une chanteuse suédoise lors d’un cours. On avait immédiatement comparé ma voix à celle de Billie Holiday que je ne connaissais pas du tout. Je m’y suis alors intéressée, mais je ne parvenais pas à faire le lien entre elle et moi. Puis je me suis plongée progressivement dans son répertoire avec une étonnante familiarité. Elle chantait le silence de tous ces sentiments qui ne trouvent pas leur place dans les mots …et qui sont si limpides dans le chant. Par contre, je suis agacée de savoir que je pourrais tenter de l’imiter.
Hush ressemble étrangement à une balade au milieu d’une profusion de mélodies qui prennent leurs racines au coeur même du Jazz. Était-ce une volonté de votre part au départ ?
La seule volonté de ce disque réside dans ce désir de chanter des choses qui me parlent et qui me plaisent sans se soucier de la cohérence et de l’homogénéité de l’album. Je voulais juste chanter ce qui me plaît.
On a l’impression que chaque titre représente à lui seul un univers. Comment fait-on pour les harmoniser sur un seul album tout en gardant une singularité de chant sur chacun ?
Le seul lien ici est ma voix et en ce sens, elle représente une certaine cohérence dans l’album. Il y a un lien avec le swing des années 30 que j’adore et que je ne souhaitais pas effacer ni laisser de côté tout en souhaitant garder des chansons de « mon temps », des chansons qui ont fait partie de mon univers bien avant le jazz.
Votre album fait la part belle à un choix audacieux de morceaux. Qu’est-ce qui vous a guidé dans cette sélection ?
J’ai eu en vérité beaucoup de mal dans ce second album à trouver les morceaux. J’ai mis du temps, car je n’avais pas une idée précise au départ. Mais en chantant, j’ai senti que mes choix de chansons étaient très disparates, entre glory box et if i were you. J’ai souhaité ce mélange qui me représente assez bien finalement.
Quel est l’apport de vos musiciens dans votre identité musicale ?
Mes musiciens représentent une part très importante de mon identité musicale. Ils sont très impliqués dans les arrangements et me conseillent souvent. Nous sommes très proches et sans eux, il n’y aurait pas cette singularité dans mes albums.
Où sera t- il possible de voir Sarah Lenka en concert dans les prochaines semaines ?
Nous serons le 18 octobre 2012 au Sunset Sunside (Paris) et le 25 octobre 2012 à l‘Opera de Reims. Et je travaille actuellement sur notre prochain album qui sera un hommage à Bessie Smith. Nous l’enregistrerons en octobre.
Le site officiel de Sarah Lenka
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