Vous aimez le rock ? Thee Oh Sees est déjà culte
Par Eddie Williamson – bscnews.fr / Offrez-vous mon album préféré de 2011, par un groupe californien qui joue désormais dans la cour des très grands du rock. San Francisco en a pondu des groupes rock incroyables, et Thee Oh Sees en fait définitivement partie. C’est une machine de guerre, un monstre à 5 membres mené par un grand malade génial nommé John Dwyer, maître de cérémonie d’une orgie rock’n’roll violente et psychédélique à consommer de préférence en concert mais qui miraculeusement garde tout son attrait sur disque.
Ah quel pied, j’vous jure. Help, sorti en 2009, était déjà fabuleux, mais alors Carrion Crawler / The Dream est le premier chef-d’oeuvre de la carrière de ce groupe. Peu importe s’ils ne font plus que de la merde par la suite, dans 20 ans on parlera de Thee Oh Sees (zi-o-ssizz) comme de ce groupe culte des années 2000 qui a terrorisé des milliers de spectateurs avec leurs performances scéniques dantesques et fait pisser de bonheur Eddie Williamson.
Concrètement, que se passe-t-il sur ce disque : vous avez deux batteurs et un bassiste qui tiennent la baraque pendant qu’un guitariste/chanteur part dans ses délires électriques, secondé par une claviériste/chanteuse. Tout ce beau monde s’est réuni un jour dans un studio, quelqu’un a appuyé sur « record » et paf, ça fait des Chocapic. L’impression d’entendre un méga-jam garage est inévitable, et même si deux morceaux (« Robber Barons » et « Wrong Idea ») sont un peu chiants (à force de triturer le même riff de guitare, il fallait s’y attendre, hein Johnny), le reste est une suite de tubes. Des tubes par lesquels tu aspires des bonbons acidulés qui t’explosent une fois sur la langue, te carbonisent l’oesophage et t’explosent une seconde fois dans l’estomac. C’est l’effet Thee Oh Sees : un rock’n’roll venimeux qui brûle tout sur son passage. Et on en redemande.
Ils savent aussi faire de la folk psychédélique, comme sur Castlemania sorti au début de l’été, et sortir des joyeusetés pop comme c’est le cas sur Help, mais en écoutant « Contraception/Soul Desert », « Heavy Doctor » ou l’épique « The Dream », c’est vraiment dans le registre frénético-garagesques que la bande à Dwyer m’éclate le plus. Tout a l’air plus « carré » et « pro » qu’auparavant. C’aurait potentiellement pu être une critique négative de ma part, mais le rock ne doit pas forcément être bordélique et amateur pour être bon, ça se saurait. Toutes ces améliorations n’ont en rien nui à la puissance ou au potentiel jouissif de leur musique. Ils sont meilleurs à leurs instruments, c’est sûr, mais la venue d’un second batteur a aussi permis de solidifier les structures des morceaux, quoique cela veuille dire. C’est un peu comme le design de ce site. Pendant un moment ça partait dans tous les sens, c’était sympa, mais une fois que tu quadrilles un tout petit peu l’affaire, c’est encore plus joli.
Avec sa voix de jeune crétin sous acide, qui pourrait parfois très bien aller au personnage vert fluo de la pochette, et son jeu de guitare incisif et carrément free-style, John Dwyer monopolise l’attention. Le groupe s’est créé parce qu’il avait besoin d’un backing-band pour donner vie à ses idées musicales tordues. Il a eu pas mal de groupes en même temps pendant un moment, mais après de nombreux changements de personnel (et de noms), la bande qui l’entoure chez Thee Oh Sees semble lui convenir parfaitement. L’impression de facilité qu’ils donnent est assez dingue. L’album a véritablement été enregistré dans les conditions du live, ce qui, à l’écoute du résultat, est plutôt impressionnant. Il faut aussi ajouter que la production est bien moins lo-fi qu’à l’accoutumée, ce qui fait plaisir. Je possède quelques 7″ des Thee Oh Sees qui labourent les tympans. « Chem-Farmer » à côté, c’est de la musique lounge.
Sérieusement (lol), Thee Oh Sees est déjà une formation culte, quoique cela veuille dire. Je n’ai pas rencontré un autre album aussi bon cette année, alors si vous aimez le rock et/ou si vous avez une confiance aveugle en mes goûts (bande de fous), allez écouter cet album.
Thee Oh Sees
Carrion Crawler/The Dream
Sortie le 15 novembre 2011 (In the Red)