Eugène Green: une certaine idée de la communauté universelle

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Par Nicolas Vidal – bscnews.fr / Eugène Green revient avec un roman qui, une nouvelle fois, cherche à confronter son lecteur avec sa propre humanité. Comme à son habitude, Eugène Green sait raconter des histoires tout en leur insufflant une dimension spirituelle qui incite à réfléchir et à prendre du recul sur notre propension à exister. S’intéresser à la communauté universelle d’Eugène Green est un geste d’engagement littéraire envers ce que la littérature a de plus précieux à nous offrir : la confrontation des idées.

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La lecture des livres d’Eugène Green est toujours une expérience particulière et personnelle. Il y a tout d’abord la confrontation à la spiritualité omniprésente dans son oeuvre. Et puis, il y a ce phrasé délicat et pesé avec autant de soin que si la vie de l’auteur en dépendait. Green aime le mot et le verbe pour notre plus grande joie.
La communauté universelle ne déroge pas à la règle de ce à quoi nous nous sommes déjà affrontés dans la Bataille de Roncevaux (paru aux Éditions Gallimard en 2010).

Le talent de Green réside dans le fait de partir d’une histoire simple et de propulser toute sa banalité dans une dimension spirituelle étonnante. Cette fois-ci, il est question d’un jeune couple de bobos au bord de la rupture. Hormis une ostentation toute particulière à se persuader qu’ils ont socialement réussi, leur existence ne repose finalement sur rien de valable. L’une est descendante d’aristocrates anglais et l’autre médecin. Mais en réalité, peu de choses les poussent à exister vraiment. C’est alors que la rupture est le parfait alibi pour acculer ce couple dans les tréfonds de leur humanité et les faire voyager jusque’à Londres, chacun de leur côté.

Eugène Green trace deux parcours initiatiques distincts, tranchants, et profonds qui confrontent chacun de ses deux personnages à une humanité qu’ils ne soupçonnent pas. Elle est autant sociale que spirituelle tout en confondant ses deux notions, car l’une ne va pas sans l’autre. Les deux anti-héros, car c’est de cela dont il est question, font la connaissance de personnages aussi divers qu’éloignés de leur classe sociale, qui les révèlent à eux-mêmes et à leur propre spiritualité. Le berceau de ce texte est en grande partie un amour total et immense qui relie entre eux ceux qui font partie de la communauté universelle « Dans la communauté universelle se trouvent tous ceux qui cherchent Dieu, qui l’ont cherché, et qui le chercheront».

Ce roman est une réflexion profonde sur l’humanité, sur sa spiritualité et sur le rapport que l’homme entretient avec la croyance, avec toutes les croyances.
Une nouvelle fois, Eugène Green malmène ses personnages pour atteindre un objectif très simple mais terriblement ambitieux : bousculer ses lecteurs et leur faire prendre conscience que la spiritualité existe même au coeur d’une existence des plus pragmatiques et des plus intéressées « Quand l’homme et la femme ne font qu’une seule chair, la Présence divine est en eux, et l’être humain redevient à la fois mâle et femelle, à l’image de Dieu. Si Adrienne est à mes côtés, Dieu ne peut être loin.»

«La communauté universelle» d’Eugène Green n’occupera probablement pas les immenses piles des livres-dans-le-vent de cette Rentrée Littéraire et c’est bien dommage. Mais celles et ceux qui auraient l’audace de s’y plonger seront happés par une plume qui  porte loin et un écrivain évoque avec brio la dimension de la spiritualité à notre époque. Et comme tous les livres d’Eugène Green, il n’y aucun prosélytisme à croire, mais une proposition sérieuse à réfléchir.

 

 » La Communauté universelle » d’Eugène Green – Editions Gallimard

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