Un plan Q qui ne dépare pas des grands du genre

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Par Eric Yung – BSCNEWS.FR / Attendez-vous à savoir que « Le plan Q » titre du dernier roman de Djuro Luy n’est en rien un livre érotique. C’est un polar presque classique. Il vient de paraître aux éditions Biro & Cohen dans la nouvelle collection « Art Noir » dont la maquette est fort réussie : livre présenté en format de poche, papier épais et pagination dense dont les tranches (tête, queue et gouttière) sont unifiées en noir. Joli, réussi ! L’idée générale de ce spicilège est d’avoir demandé à des auteurs de romans noirs et policiers d’écrire une fiction ayant pour thème, uniquement, le milieu de l’art pictural. Il faut préciser ici, que Biro & Cohen Editeur est davantage connu et reconnu pour ses ouvrages sur l’art. Or, cette maison, depuis peu, a élargi son catalogue. C’est ainsi qu’elle s’est ouverte, d’un côté aux romans policiers traditionnels (avec la collection « Sentier du crime ») et de l’autre qu’elle a pris le parti de garder son identité éditoriale (celui du monde de la peinture) tout en la déployant sous forme d’ ouvrages proches des thrillers et des récits à suspense.
« Le plan Q » de Djuro Luy participe donc à installer cette collection sur le chemin voulu par l’éditeur d’autant que ce polar amorce, semble-t-il, une série -voire une saga- racontant les aventures de la détective Christine Bard-Muller. Une femme flic qui est apparue dans une enquête menée sur le vol de la Joconde sous le titre « Permettez-moi de ne pas signer », le précédent roman de l’auteur.
« Le plan Q », dans sa quatrième de couverture, nous précise que ce serait « un road-book où se rencontrent le vice et la vertu, l’art, la politique, l’Histoire, le sang et le désir ». Certes, sans aucun doute, et cela est bien dit. Et s’il est vrai que le récit suit l’ordre d’un voyage au départ de Paris jusqu’à Bratislava et qu’il est ponctué de mille et une aventures, il convient tout de même de préciser que ce polar n’est pas seulement une sorte de journal de bord tenu, au jour le jour, par la détective Bard-Muller. C’est d’abord un roman noir qui mêle subtilement suspense et intrigue psychologique. Par ailleurs, la connaissance manifeste de Djuro Luy (mais ne serait-ce pas un pseudonyme qui cacherait le véritable nom d’un homme du métier ?) pour le commerce des tableaux de maîtres, les fortunés collectionneurs, les galeristes un peu véreux et la naïveté marchande des peintres fait de ce véritable thriller une sorte de visite guidée chez les « mafieux » de la barbouille. Des truands qui, croyez-le, n’ont pas plus d’éducation que leurs confrères spécialisés dans la came, le racket ou la prostitution, d’autres univers criminels qui, a priori, sont beaucoup moins chics que celui des pinces fesses, des ventes aux enchères et des commissaires priseurs londoniens ou new-yorkais. L’éventuel lecteur qui hésiterait à lire un « polar » traitant de l’art parce qu’il s’imaginerait que la rhétorique serait trop lisse, inappropriée à ce genre littéraire, doit savoir qu’il n’y a pas de pratiques mondaines lorsque l’on veut se débarrasser d’un cadavre et surtout faire en sorte qu’il ne soit pas identifié. Pour preuve, cette courte scène :
– Jean-Claude reprit le marteau dont il s’était servi pour assommer Karol et commença à fracasser le visage du peintre étendu nu par terre (…). Il était dégoûté, le fit maladroitement, à contrecœur, tapa trop mollement.
– Vas-y frappe ! On ne va pas passer la nuit.
– Tiens, vas-y donc toi. Tu dois en avoir l’habitude, de défoncer les gueules des mecs. Quand tu ne les suces pas.
Jaja ne répondit pas. Elle prit le marteau et de façon systématique, appliquée, elle écrabouilla le nez, tapa de toute sa force sur les tempes, le front. Les yeux jaillirent de leur orbite. Le crâne était trop résistant. Jaja l’abandonna pour se concentrer sur le visage.
Convaincu ? « Le plan Q » de Djuro Luy publié dans cette nouvelle collection « Art Noir » des éditions Biro-Cohen ne dépare pas des grands classiques du polar. Il s’y inscrit même avec bonheur.

Retrouvez l’ouvrage directement sur le site de l’éditeur

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