Nathalie Rheims : « Cette deuxième vie qui m’a été offerte me fait mesurer autrement chaque seconde d’une existence qui n’aurait, autrement, pas dû être »

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Pour son vingtième roman, cette romancière fascinante revient sur la maladie génétique qui attaque les reins qui l’a frappée. Une longue épreuve qu’elle vient de traverser, pendant laquelle elle a failli perdre la vie. Un mal qui atteint les femmes de sa famille dont sa sœur, Bettina, qui elle, se fait suivre, régulièrement. Lorsque Nathalie tombe malade, son pronostic vital est engagé. Elle ne peut survivre que grâce à des dialyses. Elle raconte une année de combat, jusqu’aux heures où elle était prête à tout abandonner, à s’abandonner avant qu’un ange lui tende la main : un donneur, un ami, une âme-sœur. Un récit plein de douceur, de larmes, d’espoir et de poésie, sincère, puissant où la romancière se livre, jusqu’au bout de la nuit.

propos recueillis par

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Comment avez-vous réussi à écrire ce livre magnifique ?

Je me suis aussi posée cette question, car, au départ, si peu de temps après la greffe, cela me semblait impossible de l’écrire. Difficile de décrire, de sublimer ce que j’ai traversé, de partager ce parcours avec ceux qui, un jour, ont affaire à des questions aussi existentielles que d’avoir besoin de l’organe d’un autre pour continuer à vivre. L’écriture est, pour moi depuis 20 ans, un besoin absolu, et quoi de plus vital que d’écrire pour se sentir en vie ?

Vous doutiez-vous qu’un jour vous seriez vous aussi atteinte de la maladie qui frappe les femmes de votre famille ?

Non. Je connaissais par cœur l’histoire de ce gène familiale qui emporté toutes les femmes de ma famille maternelle. Mais j’étais dans le déni, je me suis voilé la face toute ma vie. Un matin, c’était un vendredi, je devais passer chercher ma mère après sa dialyse, elle était enchainée à cet appareil depuis 25 ans. Une heure avant de partir pour la retrouver, son infirmière m’a appelé pour me dire qu’elle venait de mourir. A partir de là, le rideau de fer est tombé.

Quels en ont été les premiers signes ?

Une immense fatigue et une perte de poids très rapide. Je ne pouvais plus rien avaler, pas même de l’eau.

Comment a fait votre sœur, Bettina, pour éviter d’en arriver à ce que vous avez vécu ?

Cette réponse n’appartient qu’à elle.

 

« Je connaissais par cœur l’histoire de ce gène familiale qui emporté toutes les femmes de ma famille maternelle. Mais j’étais dans le déni, je me suis voilé la face toute ma vie »

 

Cette maladie vous a rapproché d’elle… Comment ?

Nul doute que le fait d’être confrontées toutes les deux à un gène tueur en série nous a rapproché infiniment.

Qu’avez-vous ressenti lorsque vous étiez dans le coma ?

Pas grand-chose au début, puis, progressivement le sentiment qu’il ne suffirait que d’un souffle pour que tout s’arrête. Ensuite j’ai fait un œdème général qui a touché mon cerveau, ce furent alors des cauchemars des visions délirantes, des gens étaient présents dans ma chambre en réanimation.

Que diriez-vous de l’équipe médicale qui vous a suivie ?

Il y en a eu plusieurs, toutes plus extraordinaires les unes que les autres, de la réanimation à la greffe j’ai été portée par eux dans un combat qui semblait désespéré.

 

« Cet homme qui m’a fait un don inestimable, n’est pas musicien, ni danseur, ce serait dévoiler une trop grande part de « Les reins et des cœurs » que de répondre ici »

Vous dites que vous n’avez hérité que de « cette saloperie’ de votre mère : pourquoi ? Que s’est-il passé ? Pourquoi vous a-t-elle déshéritée ?

Il faudrait un roman pour répondre à cette question ; en fait, il existe et il a pour titre « Laisser les cendres s’envoler » (1).

Quels rapports aviez-vous avec elle ?

C’était la femme de ma vie, je pensais que rien ni personne ne pourrait jamais nous séparer.

Parlez-nous de votre merveilleux donneur, Flavien, ce musicien.

Je vais vous répondre ainsi : cet homme qui m’a fait un don inestimable, n’est pas musicien, ni danseur, ce serait dévoiler une trop grande part de « Les reins et des cœurs » que de répondre ici.

En quoi cette épreuve vous a-t-elle changé ? Vous et votre regard sur le monde ? Sur le sens de la vie ?

Ce n’est peut-être pas l’épreuve qui m’a changée, mais cette deuxième vie qui m’a été offerte et qui me fait mesurer autrement chaque seconde d’une existence qui n’aurait, autrement, pas dû être.

 

Couverture « Les reins et les cœurs » de Nathalie Rheims (© Ed. Léo Scheer)

 

 

 


« Les reins et les cœurs » de Nathalie Rheims
Éditions Léo Scheer
216 pages – 18 Euros

 


Notes :

(1) « Laisser les cendres s’envoler » de Nathalie Rheims
Editions Léo Scheer (2012)
256 pages – 19 Euros

 


(Crédit photo à la une : Nathalie Rheims ©Philippe Conrad)

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