Disiz La Peste : « Le rap est aujourd’hui ce que la chanson était hier »

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Par Jean-Christophe Mary – Avec sa verve et ses textes ciselés mêlant humour féroce et révolte douce, l’artiste s’est fait une réputation dans le monde du hip hop. A quelques jours de son nouvel Olympia, il nous en dit un peu plus sur son dernier projet né d’une collaboration avec Stromae.

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Onze albums à votre actif mais vous êtes aussi comédien au cinéma et au Théâtre. 17 ans après vos débuts, quel bilan, quel regard portez-vous sur votre longue carrière ?
Je ne regarde jamais trop en arrière. Du coup, je ne sais pas trop. Je ne collectionne pas les albums et tout ce que j’ai fait comme des trophées de chasse. Je suis depuis mes débuts toujours excité par ce que je fais maintenant pour après.

Votre univers qui est passé du rap hardcore, au rock à la musique africaine se recentre aujourd’hui autour de l’electro et la chanson. Chacun de vos albums est un nouveau concept, un nouveau virage. Vous êtes un peu à part dans le rap hexagonale?
On me dit souvent ça. Mais je ne cherche pas à me démarquer. C’est juste que je fuis l’ennui. Et refaire les mêmes choses m’ennuient. Du coup, je cherche à renouveler mes envies et ça a un effet sur ce que je produis.

Vous avez aussi plusieurs fois changé de nom au cours de votre carrière : Disiz la Peste, Disiz, Peter Punk, Inspecteur Disiz… Pourquoi ce choix ? Est-ce une manière de brouiller les pistes ? Comment le public peut-il vous suivre ?
C’est plus une volonté de ne pas m’enfermer dans une case. Également au début par manque de confiance. N’assumant pas vraiment cette aventure « rock », j’avais choisi ce pseudo mais aujourd’hui j’assume tout.

En 2013, on vous a vu aux côtés de Denis Lavant jouer Othello de Shakespeare au Théâtre des Amandiers à Nanterre. Là encore on ne vous attendait pas là. Racontez nous cette aventure .
Je donnais des cours de dramaturgie à des élèves en réinsertion scolaire âgés de 17 à 20 ans au Théâtre de l’Odéon à Paris. La personne qui m’avait fait venir là-bas m’a un jour parlé du travail Razerka Ben Sadia Lavant qui montait Othello et cherchait son Othello. Je l’ai rencontré et j’ai été galvanisé par le projet. Et puis Shakespeare, ça ne refuse pas, enfin encore moins avec le magistral Denis Lavant. Du coup j’ai dit oui. Comme ça comme pour un coup de foudre. Puis vint le jour où je devais me rendre aux premières répétitions. Je ne connaissais pas mon texte. Je me suis dit « mais pourquoi t’es tu embarqué dans ce truc trop grand pour toi ? » Mais j’y suis quand même allé. J’ai été rassuré de voir que personne ne connaissait son texte et que nous allions justement commencer le travail. C’est à ce jour ma plus forte expérience. Cette pièce m’a profondément appris sur le rapport à l’art, à ce que l’on donne de soi en tant qu’artiste et sur l’interprétation et l’authenticité.

L’écriture est votre marque de fabrique, vous jouez avec les mots et avec un vocabulaire riche. On vous sent plus proches d’Abd Al Malik, Oxmo Pucino ou Kery James que Booba, Rohff ou Kaaris…?
Je ne suis pas d’accord et pas très à l’aise avec les comparaisons. Il m’arrive d’écrire en fonction des thèmes avec une écriture plus directe, ou plus imagée, ou plus brute. Le rap est large. Et je n’aime pas les ségrégations d’où qu’elles viennent.

Vous avez collaboré avec Stromae pour ce nouvel album. Racontez-nous.
On se connait depuis un petit bout de temps. Mais nous n’avions jamais collaboré ensemble. Pour ce disque je lui ai tout simplement demandé s’il avait envie. Ca a été très instinctif. On a passé la journée a rire et faire de la musique. Paul est un génie.

Vous citez aussi Jacques Brel, Léo Ferré, Balavoine, Berger, comme des références majeures. Pas fréquent d’afficher de telles références dans le rap…
Là encore je ne vois pas les choses comme ça. Beaucoup de rappeurs citent, Renaud, Brel, Balavoine un peu moins. Moi j’aime beaucoup Alain Souchon. J’ai d’ailleurs repris sa chanson « Quand je serai KO dans Pacifique ». C’est normal que les « rappeurs » citent tous ces artistes. Le rap est aujourd’hui ce que la chanson était hier. Et en tant qu’artistes qui écrivent en langue française, nous sommes sensibles à la langue. Donc tous ceux qui la manient bien comme les artistes cités peuvent nous inspirer, comme nous aussi nous inspirons et inspirerons du futurs artistes.

Dans ce nouvel album, l’electro et la chanson tiennent une place importante. Vous aviez envie de donner une vision positive du rap ?
Non, j’avais juste envie d’illustrer mes émotions avec des mots, des musiques et des bpm adéquats. Je ne me suis pas posé la question du support ou de la catégorie musicale, si c’était rap ou pas rap. J’ai fait ce que je sentais en me sentant libre.

Le 06 décembre vous serez sur la scène de l’Olympia. C’est une consécration pour vous de jouer sur le plateau de cette salle mythique ?

C’est mon 3e Olympia. La consécration est surtout d’avoir le privilège d’intéresser encore un public et de voir que des gens s’y greffent d’année en année. Les lieux m’intéressent moins que les gens.

Quel est votre meilleur ou votre pire souvenir de scène ? Avez-vous des anecdotes à nous raconter ?

L’un des mes pires souvenirs de scène (il y en a vraiment peu), reste le jour où un ingénieur son retour (la personne qui s’occupe des enceintes sur scène pour que l’on s’entende bien) qui avait tellement bu, produisait un son absolument crade. Lorsqu’on a lui fait remarquer en plein show, il nous a envoyé balader. Il m’a gâché le plaisir et j’étais extrêmement énervé.

A part la musique , qu’est-ce qui vous passionne dans la vie ?
La boxe anglaise. La moto et les livres.

Avez-vous un « coin » secret, un endroit particulier où vous aimez flâner dans la capitale ?
Je ne vous dirais pas mes coins secrets sinon ils ne le seraient plus, mais j’en ai. Je n’aime pas plus Paris qu’une autre ville en particulier. Mais chaque fois que je rentre la nuit dans Paris je me dis à que cette ville est magnifique et que si je n’étais pas d’ici je voudrais y vivre et y écrire des textes et des textes.

Disiz La Peste
Pacifique ( Polydor ) (Photo D.R )

Disiz en concert le 06 Décembre 2017
L’Olympia. 28, boulevard des Capucines, 9e. Réservations au 0 892 683 368. A 20h. De 32 à 45 €.

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