Les romans de l’été et les prix de la saison

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Par Emmanuelle de Boysson – « La vengeance des papillons », de Laurence Zordan (Editions des femmes), un titre bizarre. Comme si les lépidoptères, insectes en voie de disparition, pouvaient lutter contre les moulins à vent. Ici, c’est une jeune analphabète, comme Léo, dans « Illettré » de Cécile Ladjali (Actes Sud) qui s’envole, pour se brûler les ailes au soleil. Une révolte face à l’injustice dans la ligne de la maison d’Antoinette Foulque qui défendit si bien la cause des femmes.

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Les romans de l’été

L’été est la saison des thrillers : après les inondations, « Austerlitz 10.5 » d’Anne-Laure Béatrix et de François-Xavier Dillard (Belfond) fait froid dans le dos : Paris est inondé, le Louvre, pillé, des bandits sortent des eaux boueuses, trafics en tous genres, meurtres, chienlit… Pour avoir des frissons sur la plage, lire « Les racines du sang » de Natacha Calestréné (Albin Michel). L’auteur du « Testament des abeilles » revient avec un flic sous l’emprise des fantômes de son passé : meurtres en série sur fond de scandale sanitaire mondial. C’est fou comme les thrillers anticipent ce qui risque de nous arriver. Quand les femmes s’en mêlent, ça donne des personnages terrifiants, comme Kick pro des armes à feu qui maîtrise les arts martiaux dans « Pourquoi moi » de Chelsa Cain (Lattès). Chelsa prendra-t-elle la relève de Patricia Cornwell dont l’enquête « Inhumaine » mêle sciences légales, surveillance électronique et vengeance calculée (Ed des 2 Terres) ? Chez nous, l’as du thriller reste Maxime Chattam avec son « Coma des mortels » (Albin Michel). Parmi les romans historiques de l’été, je vous conseille « Mariage républicain » de François Cérésa (L’Archipel) : en Vendée sous la Terreur, Marie a été abusée par le comte de La Rose-Pitray. La Jacobine va se battre, aimer et se venger pour retrouver son fils. Cérésa serait-il notre nouvel Alexandre Dumas ? Le hussard est à la tête de « Service Littéraire », feuille de chou satirique, où la liberté de ton est de mise. En ces temps de pensée mollassonne, on est loin de « La Parisienne », de Jacques Laurent.

Philippe Jaenada aurait dû avoir le prix Livre Inter pour « La petite femelle » que j’ai adoré. Il publie aussi « Spiridon superstar » chez Incipit. Saluons cette nouvelle maison. Portée par les Éditions Prisma et Steinkis Groupe, des auteurs y racontent une première fois, qu’elle soit historique ou universelle, dans des récits mêlant fiction et réalité : « Il s’agit moins d’écrire l’Histoire que de la réécrire, sans offense pour l’Histoire, et pour le plus grand plaisir du lecteur. » Des thèmes variés, et trois premiers ouvrages qui parlent du bikini, de Marguerite Yourcenar à l’Académie et de la première édition du Festival de Cannes… « La variété des sujets dessinent une fresque passionnante, où le tragique flirte avec la comédie », expliquent les éditeurs. Incipit, terme qui désigne les premiers mots d’un texte, a vocation « à aspirer le lecteur d’un bout à l’autre, de format court, on les lit d’une traite, puis on les relit avec gourmandise ». Plusieurs auteurs se sont lancés dans l’aventure, de Nicolas Rey à Philippe Besson, François Bégaudeau, Eliette Abécassis ou Joy Sorman. Une vingtaine de titres est prévue pour les deux premières années. Les illustrations de couverture sont réalisées par des dessinateurs tels que Loustal, Mattoti, Catel, De Metter, Blain…

Premiers titres. Eliette Abécassis « Deux-pièces » : « Elle était là, presque nue, devant la piscine, à Molitor. Exposée aux yeux de tous, dans ce grand “paquebot” aux façades couleur terre de Sienne, à l’architecture des années trente… » Lors d’un défilé, la France de 1946 découvre la bombe atomique du couturier Louis Réard : le bikini. Dans le public, Gaby, une jeune fille « toute frêle, à la peau diaphane » prend des notes. Un jeune homme l’interpelle. C’est Antoine, son grand amour qu’elle n’a plus revu depuis l’Exode. Il a participé à la conception du premier maillot deux pièces… À travers cette fiction aux couleurs pâles, Eliette Abécassis explore les non-dits qui ont plané sur la Libération de la France – et de la femme. Le premier bikini… nommé ainsi après que l’atoll de Bikini, situé dans le Pacifique, ait été choisi pour être le site d’un essai de bombe atomique, essai qui a eu lieu le 1er juillet 1946. Bien que le bikini ait eu un succès modéré en France, il n’a pas été immédiatement bien accepté dans d’autres parties du monde : nombre de pays catholiques ont interdit le costume.

Autre texte : La première femme à l’Académie française… Sous l’Ancien régime, les femmes ne peuvent entrer dans des assemblées élues que si le règlement l’y autorise. « Les femmes ne sont pas éligibles, puisqu’on n’est citoyen français que lorsqu’on a satisfait à la conscription » (Duc d’Aumale, 1893). En 1980, Marguerite Yourcenar fut la première femme élue à l‘Académie grâce au soutien actif de Jean D’Ormesson. Nouvelle maison d’édition, les éditions Rabelais publient des petits bijoux, beaux livres où un auteur raconte les amours d’un grand homme et l’influence des femmes sur sa vie, comme « Picasso amoureux », de Frédéric Ferney, « Victor Hugo amoureux », de Christine Clerc et « Balzac amoureux » de votre chroniqueuse.

L’exposition Balzac et les artistes

A chacun des livres, une exposition. A partir du 17 juin, la Maison de Balzac organise une exposition « Balzac et les artistes, mythe et réalité ». De la petite table en bois sur laquelle aura été écrite La Comédie humaine jusqu’aux récents portraits de l’écrivain par Eduardo Arroyo ou Enrico Baj, en passant par les caricatures d’Henry Monnier, la Maison de Balzac évoque ainsi un écrivain façonné par son époque et ses contemporains. On sait que Balzac écrivait seul, souvent la nuit. Le cabinet de travail qui a fait l’objet d’une rénovation récente permet de l’imaginer face à lui-même, couchant sur le papier la description si précise d’un monde entièrement inventé. Avec plus de cinquante œuvres (peintures, sculptures, mobiliers, dessins…) issues des collections du musée, dont certaines jamais montrées au public, l’exposition confronte cette vision mythique du travailleur de la nuit, avec la réalité de l’œuvre d’un grand artiste marqué par la pensée contemporaine. Le foyer de l’opéra, les rédactions des journaux, les soirées littéraires offrent autant d’occasions aux artistes de se croiser.

Dans le brillant salon de Delphine de Girardin, Balzac côtoie ainsi Alphonse de Lamartine, Victor Hugo, Alexandre Dumas, George Sand, Alfred de Musset ou Franz Liszt. Ces liens plus ou moins amicaux stimulent Balzac, l’amènent à se lancer dans des entreprises parfois audacieuses, que ce soit en art ou en politique. Il n’hésite pas à solliciter tantôt des spécialistes pour mieux comprendre la musique ou la peinture, tantôt ses amis pour l’écriture d’une pièce de théâtre ou de poèmes qu’il insère dans ses romans. Leurs réalisations, des sculptures, des gravures, des pièces de théâtre ont suscité des personnages, voire une nouvelle, un roman. Cette réalité complexe a été occultée par la représentation d’abord caricaturale et progressivement héroïque de Balzac qu’ont très tôt donné les plus grands peintres, dessinateurs et sculpteurs. Leurs œuvres, depuis 1830 et jusqu’à aujourd’hui, suggèrent diverses facettes de l’écrivain dont elles enrichissent le mythe, et ces portraits de Balzac, seul ou en groupe, forment autant d’interrogations sur ce que peut être aujourd’hui comme la création artistique. L’exposition « Balzac et les artistes » confronte la vision mythique du génie œuvrant dans la solitude, et les nombreux échanges qu’il eut avec ses contemporains.

Les prix littéraires de la saison

Mes romans de l’été sont déjà ceux de la rentrée littéraire. Le « Premier Prix » de la rentrée littéraire lancé le 9 juin au restaurant La Petite Cour avec le jury du Prix L’Ile aux Livres inaugure une nouvelle distinction et sacre le roman « Règne animal ». « Au fond, pourquoi attendre ? C’est en tous les cas le parti-pris du jury du Prix Île aux Livres / La Petite Cour, qui a décidé de proposer, en plus de ses lauriers habituels, une nouvelle distinction. Son intitulé ? Le Premier Prix. Son principe : saluer, plusieurs semaines avant parution et hors de tout accueil effectif de la part des médias ou des libraires, l’un des romans de la prochaine rentrée littéraire. Après tout, la plupart des films récompensés dans les festivals de cinéma ne sortent-ils pas sur les écrans parfois longtemps après ? » a écrit Baptiste Liger dans L’Express.fr. « Règne animal » l’a donc emporté face au très beau « Au Commencement du septième jour » de Luc Lang (Stock) – étaient également en lice les nouveaux ouvrages de Jean-Paul Dubois, Véronique Ovaldé et Karine Tuil. Remarqué en 2008 avec « Une Education libertine » (Prix Goncourt du prix roman), Del Amo signe ici une grande épopée à travers le XXème siècle, « au style volontiers lyrique, autour de la souffrance animale – en l’espèce, celle infligée aux porcs – comme un miroir de la sauvagerie humaine. Nul doute que cette ambitieuse fresque de cinq cents pages sera abondamment commentée, lors de sa sortie en librairies, le 18 août prochain ».

Par ailleurs, le jury a également attribué sa récompense «traditionnelle» et, pour succéder au Voyage d’Octavio de Miguel Bonnefoy, a choisi le dixième roman de Jérôme Attal, Les Jonquilles de Green Park (Robert Laffont). Cet écrivain-parolier raconte ici les tribulations d’une poignée de gamins, amateurs des comics à super-héros, dans le Londres des années 40. Ces deux trophées seront remis officiellement sur l’Île de Ré, lors du salon L’ïle aux Livres, qui se déroulera du 5 au 7 août.

Samedi 4 juin 2016, les amoureux de la littérature étaient sur les marches de la terrasse du Belles Rives pour connaître comme chaque année depuis maintenant six ans l’identité du lauréat du Prix Fitzgerald. Marianne Estène-Chauvin, Présidente de l’Académie Francis Scott Fitzgerald et propriétaire de l’emblématique Hôtel Belles Rives, a souhaité ainsi récompenser un écrivain dont le thème de l’ouvrage évoque l’esprit du grand auteur américain par ses situations, l’atmosphère qui s’en dégage et traduit au mieux son écriture incomparable, son élégance et son art de vivre. L’Hôtel Belles Rives à Juan-les-Pins est l’ancienne maison de Scott Fitzgerald quand il résidait sur la Côte d’Azur. L’hôtel, à fleur d’eau, dans un style Art Déco, ne manque pas de faire rejaillir la douce frénésie des années folles. C’est tout le glamour azuréen qui se donne rendez-vous dans une maison où charme, sérénité et exclusivité se sont donnés rendez-vous.

L’hôtel Belles Rives se veut vraiment un lieu de vie et de partage offrant une parenthèse hors du temps, comme en attestent les cours d’initiation à la méditation qui s’y tiendront cet été, ou encore le dîner Bacchus en partenariat avec Dom Pérignon lors d’une soirée prestige qui aura lieu le 11 Juin prochain au restaurant étoilé La Passagère. Le jury était composé pour cette sixième édition de huit membres de choix. Eta Bertrand de Saint Vincent, Directeur Adjoint du Figaro et chroniqueur littéraire, Marie Dominique Lelièvre, journaliste et biographe, Eric Neuhoff, Chroniqueur pour l’émission « le Masque et la Plume » sur France Inter et Chef de la Rubrique Littéraire au Figaro, romancier, François Armanet, Chef du Service Opinion à L’Obs, Christophe Ono di Biot, Directeur Adjoint de la Rédaction du Point et animateur sur la chaîne TF1. Il est l’auteur de cinq romans et a reçu le Grand Prix de l’Académie Française en 2013. Les membres du jury ont décerné pour la première fois le prix à une femme, la belle Julia Pierpont pour « Les dix mille choses » (Stock). La lauréate a séjourné dans la chambre de Fitzgerald et reçu une dotation de 5000 euros ainsi qu’un trophée original du céramiste Claude Aïello.

Pendant ce week-end à Juan Les Pins dans l’hôtel – à l’époque, villa Saint-Louis – où Scott et Zelda sont venus de 1926 à 1929, le programme était à la fête : séance d’initiation à la méditation avec Aurélia Lanson-Villat (Meditation & the City), balade dans le Vieil Antibes : marché Provençal, brocante, Voiles d’Antibes… déjeuner à la plage Belles Rives, coquillages et crustacés… un régal ! La cérémonie de remise du Prix Fitzgerald fut ensoleillée par le discours de la propriétaire de l’hôtel Belles Rives, Marianne Estène-Chauvin. En prime, un bain de minuit au bout de la jetée. Scott et Zelda auraient aimé !

A l’occasion du 50e anniversaire de la Fondation Prince Pierre de Monaco, en présence de S.A.R. la Princesse de Hanovre, Présidente de la Fondation Prince Pierre de Monaco, des membres du Conseil Littéraire se sont réunis au Grand Véfour, à Paris, pour établir la liste des auteurs en lice pour : le prix littéraire qui honore un écrivain francophone de renom pour l’ensemble de son œuvre. Sont sélectionnés : Adonis, Charles Dantzig, Michel Del Castillo, Denis Tillinac et Michel Tremblay.

Lancé en 2011 par Alexandre Durand-Viel, directeur Général du Château de la Messardière, le Prix Messardière – Roman de l’Eté réunit les ouvrages de plus de trente maisons d’édition. L’originalité de ce prix réside dans l’échange entre les trois finalistes, les membres du jury et un public de plus de 150 personnes avant l’annonce du lauréat. Cette année, les auteurs se sont présentés face à l’assemblée avant un débat orchestré par le président du jury 2016, Jean-Marie Rouart de l’Académie française, sur le thème de « Biographie et biopic : la biographie va-t-elle supplanter le roman ? ». Le samedi 21 mai 2015, les 3 finalistes : François-Guillaume Lorrain pour « Vends maison de famille », Editions Flammarion, Nathalie Rheims pour « Place Colette », Editions Léo Scheer et Romaric Gergorin pour « Erik Satie, » Editions Actes Sud / Classica se sont livrés à un échange de grande qualité devant un large public d’amateurs de littérature et les membres du jury. Ce fut un moment riche en émotion en présence d’un parterre de passionnés présents à l’occasion du 6e Prix Messardière Roman de l’Eté. En effet, cette année encore, le Château de la Messardière a été le théâtre d’un véritable engouement populaire qui a permis à plus de 150 personnes d’avoir la chance d’échanger avec les écrivains et les membres du jury.

Vers 18h, Jean-Marie Rouart pouvait annoncer que la lauréate 2016 était Nathalie Rheims pour son roman autobiographique « Place Colette » aux Editions Léo Scheer. Un roman édité l’été dernier, presque un an plus tôt en août 2015, soulignant ainsi l’intemporalité de la littérature. La lauréate pouvait alors remercier chaleureusement le président du jury 2016 pour ce premier prix littéraire reçu après 17 romans publiés en évoquant avec émotion et pudeur sa famille, son histoire. La veille au soir, le jury avait longuement délibéré lors d’un dîner au restaurant gastronomique L’Acacia du Château de la Messardière pour départager les trois finalistes dont la diversité du propos ne permettait pas l’unanimité. Nos trois finalistes et l’ensemble du jury ont participé avec succès à la 1ère édition de « Livre en Salon » organisée par le duo de libraires de Saint-Tropez Marie Coll Pasquini et Elodie Mazuir dans le Salon des Canebiers.

Une heure trente de rencontre entre les écrivains (finalistes et jury) et leur public lors de longues dédicaces, permettant ainsi aux libraires d’écouler près de 200 ouvrages. Vive les libraires, les nouveaux princes de l’édition si convoités par les éditeurs !

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