Henry James : une ambigüité « hautement civilisée »

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Par Marc Emile Baronheid – Américain qui écrivait sur l’Angleterre ou Anglais qui écrivait sur l’Amérique : l’expatriation et le cosmopolitisme affichés par Henry James, expert en chassés-croisés, n’ont pas facilité la compréhension et la réception de son œuvre.

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Longtemps admirateur de Balzac, Henry James (1843-1916) a tenu un temps sous le boisseau une ambition littéraire « qui a toujours couvé sous des dehors tranquilles », lui permettant de passer outre des souffrances inavouées. Il a longtemps oscillé entre Amérique et Europe, ses romans ne cessant de poser de manière complexe la question des rapports entre l’une et l’autre. Accaparé par des recensions, des articles critiques, des esquisses de voyages, rêvant aussi de théâtre, il ne cessera jamais de tenir le roman dans sa ligne de mire, attendant de lui la démonstration et la légitimation de son activité créatrice. Installé en Angleterre – Paris n’avait pas su lui plaire – et lancé à la conquête de Londres, il s’étonnera de « la facilité quasi absurde » de sa réussite.

A un ami projetant d’écrire un essai embrassant l’ensemble de son œuvre, il objectera en 1880 « je préférerais que vous attendiez quelques mois, jusqu’à ce que mon gros roman (à paraître cette année) soit sorti. C’est à partir de lui que, pour ma part, je prétendrai faire date ». A l’époque pourtant, on a déjà loué l’ « éblouissante agilité mentale » de ce petit-fils d’un immigré irlandais qui avait amassé dans le Nouveau Monde une fortune telle qu’il épargna à deux générations de ses descendants la « honte de faire du commerce ».

James n’a pas péché par orgueil ; ce roman supérieur sera « Un portrait de femme », histoire d’Elisabeth Archer, farouchement attachée à son indépendance, quittant les Etats-Unis pour faire son éducation sentimentale en Angleterre et en Italie. Chez James, les héroïnes éprises de liberté payent toujours leurs illusions au prix fort. Nihil novi sub sole… C’est l’oriflamme de ce volume venu rejoindre dans la collection les quatre tomes des Nouvelles complètes.

Un portrait de femme et autres romans

(en fait, les premiers de l’auteur : Roderick Hudson, les Européens, Washington Square, plus des extraits des Carnets concernant ces textes et les préfaces à l’ édition de New York)

Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade

Edition établie par Evelyne Labbé avec la collaboration d’Anne Battesti et Claude Grimal

68 euros (prix de lancement)

Fayard – 18€

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