Ana Bagayan

Ana Bagayan: ses visages de poupée et ses regards aux récits en suspension

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Interview d’Ana Bagayan/ Propos recueillis par Julie Cadilhacbscnews.fr/ Ana Bagayan est américaine. Elle a étudié la peinture dans l’Art Center College of Design à Pasadena en Californie. En ce mois de février, elle expose à la  Thinkspace Gallery à Culver City. Ses peintures, dans lesquelles cohabitent des enfants dénués de sourires, des animaux plus ou moins fantaisistes et des insectes pour le moins envahissants, sont empreintes de mystère et peuvent inquiéter l’oeil observateur tant y sont distillés de nombreux éléments étranges. Des visages de poupée entourés d’une nature sauvage, des regards qui invitent à poursuivre un récit en suspension; nous vous invitons à découvrir l’univers d’Ana Bagayan…

propos recueillis par

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Vous êtes née à Yerevan en Arménie? Avez-vous vécu longtemps dans votre pays natal, quels souvenirs en avez-vous gardés?
Oui, je suis née à Yerevan et y ai vécu  pendant 6 ans avant le déménagement en Californie. J’ai quelques souvenirs très vifs d’enfance en Arménie mais c’est presque comme si tout était arrivé à quelqu’un d’autre. J’en ai surtout gardé une impression ennivrante de liberté; c’était une période d’excitation et d’exploration et, bien sûr, d’ennuis! Nous n’étions pas été enfermés pour jouer dans les cours ou les appartements d’immeubles  comme les enfants des villes d’aujourd’hui, je me suis heurtée à de nombreuses choses intéressantes dans les rues. Un de mes souvenirs préférés est d’avoir assisté au spectacle d’un cirque itinérant et d’avoir observé les funambules sur la corde raide.

Votre pays d’origine influence-t-il votre façon de dessiner?
Je pense que cette curiosité innocente qui se dégage des lieux et des créatures que je dépeins  vient pour beaucoup de mon enfance en Arménie.

Vous avez suivi les cours en Californie de l’Art Center College of Design …quelle(s) matière(s) y avez-vous étudiées?
J’ai étudié l’illustration, matière dans laquelle j’ai appris à dessiner et peindre. J’avais besoin de découvrir les techniques et d’acquérir les compétences qui me permettraient de peindre ce que je visualise.

Où vivez-vous aujourd’hui?
Je vis à Los Angeles en appartement. Bien que j’aime l’endroit où je vis, il n’influence en rien mes peintures. Il n’y a pas beaucoup de paysages naturels dans mon environnement quotidien donc ce que je peins doit naître de mon imagination.

Vous avez exposé dans plusieurs pays et notamment en Europe, en Italie et en Allemagne: dans des expositions collectives ou en Ana bagayansolo? Vous a-t-on déjà proposé d’exposer en France?
J’ai exposé en solo à Munster en Allemagne et à Rome. J’aimerais beaucoup exposer un jour en France aussi!

Par quels peintres, quels artistes en général, votre pinceau a été influencé?
Mes artistes préférés, quand j’ai découvert la peinture, étaient Mark Ryden, Joe Sorren et Eric White. Eux, en plus de nombreux artistes de la  Renaissance classique, ont eu une  grande influence sur ce que je fais…. bien que mon travail ait un peu changé ces cinq dernières années.

Vos sujets sont des enfants, toujours…parce que le monde adulte vous déplaît?
Non, c’est surtout parce que l’enfance me semble mystérieuse et que tout y est frais, nouveau et excitant!

Est-ce vous qui vous cachez derrière ces moues d’enfants?
Pas de façon intentionnelle en tous cas mais c’est vrai que je représente toujours des choses que j’aime  et ce en quoi je crois…. aussi peut-être qu’inconsciemment je me peins toujours moi-même.

Peu de sourires, des regards méfiants, étonnés ou tristes… Une image de l’enfance plutôt mélancolique, non?
L’absence de sourires les rend ambigus. Certains peuvent les trouver tristes, d’autres peuvent y voir une autre signification. J’aime laisser le récit de l’image ouvert à l’interprétation de chacun.

Vous insérez des éléments surréalistes dans vos peintures pour faire surgir un état , une émotion? Pouvez-vous nous expliquer la génèse de Phasmida par exemple?
Cette peinture faisait partie d’une série où j’imaginais des visages avec des insectes rampant dessus. J’ai toujours été fascinée et effrayée par les insectes et les poser directement sur le visage, c’était une manière de me confronter à cette phobie.

Vos personnages ont des airs de poupées….vous insistez ainsi sur leur fragilité?
J’adore les poupées et les ai utilisées comme référence dans le passé. Cela peut être une autre raison qui justifierait les rares sourires  dans mes peintures. La plupart des poupées n’ont pas de grand sourires, cela permet aux enfants d’imaginer les émotions qui les animent.

Pourtant vos sujets présentent une ambivalence intrinsèque. Ils sont innocents mais presque inquiétants à la fois, non?
Inquiétant… tout est relatif. Les choses peuvent être effrayantes et belles en même temps, cela dépend juste de comment vous les regardez.
On trouve dans vos toiles l’évocation de mythes universels comme l’histoire du péché originel par exemple…
Certaines de mes toiles sont nées d’histoires ou de contes de fées que j’appréciais étant petite. Je pense évoquer des choses que tout un chacun peut relayer.

Ana BagayanPar quoi débute une toile? Les lignes de force? le sujet? le cadre? On dirait que vous travaillez par plans, par éléments qui se juxtaposent ?
J’aime prendre un peu de temps pour laisser venir les idées et faire d’abord de nombreux dessins. Je ne planifie pas beaucoup les étapes à respecter, je préfère voir où mon imagination va conduire mon pinceau. Je travaille surtout avec des choses que j’aime dans ce monde:la nature, les beaux animaux, le mystère etc…Alors je sélectionne mes sujets favoris du moment et les peins.

Enfin avec quels outils travaillez-vous?Quelles matières?
Je travaille avec de la peinture à l’huile sur des panneaux en bois. Le processus de peinture se déroule ainsi: je scanne le petit dessin et l’imprime en plus grand format – tout dépend de la taille dans laquelle j’imagine la peinture. Alors je frotte le dos du dessin imprimé avec du charbon de bois, le transfère ainsi sur le panneau en bois, applique de la « Clear Gesso » pour sceller le dessin, le ponce jusqu’à ce qu’il soit lisse et seulement alors je peins.

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